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Comment J’ai Tué Marion C.

Publié le 26 mai 2012 par Betacon @dido_m

Je me souviens de cette époque où l’on était jeune et insouciant. On s’était pris un semblant d’appartement dans une des banlieues parisiennes. L’appart’ en soi n’était pas si cher quand on avait eu un salaire fixe. Mais la vie de comédien… Vous savez… Des hauts… Des bas… On fait comme on peut.

J’avais quitté ma fac d’art dramatique parce que je voulais qu’elle puisse s’épanouir dans ce qu’elle faisait. J’ai commencé à travailler pour que l’on puisse manger… Pour qu’elle ait un jour une chance de monter sur les planches. Elle voulait faire du Théâtre, elle voulait devenir une star.

Quand nos profs en commun s’étouffent de colère quand ils ont appris que j’avais laissé tomber une si prestigieuse école alors que j’avais énormément de talent pour une fille qui ne savait jouer que  le rôle de l’arbre dans la belle au bois dormant.
Mais je m’en foutais de ce qu’ils pouvaient dire, je savais qu’elle n’avait pas des masses de talent en elle, mais elle me rendait heureux.
Elle, on l’appelait Marion, avant.

Marion avait de beaux yeux, n’en avait pas tellement dans la tête, mais assez pour ne pas être acceptée en tant que mannequin.
Avec les amis de l’école, qui commençaient à s’éloigner, on lui avait trouvé quelques petites pièces… Elle n’était que figurante la plupart du temps, mais ça la rendait heureuse Marion.

Mais le temps avançait et ça ne lui suffisait plus … Elle en voulait plus … Elle commençait déjà à changer … Avec des coups fourrés elle réussit à avoir le second rôle dans une pièce mise en scène par son cousin Laurent. Le réalisateur de la série Highlander présent dans la salle tomba sous le charme de ses yeux… Elle s’envola donc pour la première fois en direction de N.Y City.
Elle n’était plus la même à son retour … Entre des « I wanna go to… » et les « Ho, si tu avais vu Brad, il était so beauty… ». Je ne savais pas encore qui était ce Brad …

Je le savais, je l’avais compris, on ne vivait plus dans le même monde, l’appartement à ce moment là, c’était elle qui le payait …

Pour un homme, se sentir inférieur dans un couple, c’est le début de la fin, ça commence par payer le loyer et ça finit par contrôler ta vie. Je ne pouvais l’accepter, me réfugiant dans l’alcool je suis devenu agressif … La poussant à s’éloigner et à se réfugier dans la drogue. Chacun se paie ce qu’il peut. Elle sniffait avec Brad, moi je sirotais ma bière avec le clodo du coin de la rue d’en face.

Elle partait pour des tournages… Moi je n’étais jamais totalement sobre. J’avais tout fait pour elle… Et je me sentais trahi …

Un jour en rentrant je pus apercevoir que l’appartement était encore plus vide qu’à son habitude. Les placards étaient presque vides, abritant encore quelques uns de mes tee-shirts. Je compris vite ce qui se passait, mais je ne voulu pas y croire, cela ne devait jamais arriver, on s’était promis le bonheur éternel, même si ce dernier nous avait quitté quelques décennies plus tôt. Jusqu’au moment où je vis un bout de papier posé là, sur ce lit où l’on s’était dit « je t’aimerai pour toujours… ». En écrivant ces mots, je me rendais compte que j’étais le seul à les dire. L’inscription furtive sur ce morceau de feuille déchirée se voulait rempli de compassion, mais le seul sentiment que j’avais pu ressentir était de la trahison.

« Désolée »
Un seul mot, le seul mot que je m’étais promis de ne plus jamais prononcé.
Les 15 jours qui suivirent cette découverte, je ne m’en rappelle plus. Le flou total. Entre drogue et alcool, rien n’allait plus … Jusqu’au jour où je me suis réveillé dans des draps blancs. Je n’en avais pas vu de tels depuis longtemps. J’étais à l’hôpital.

En sortant de l’hôpital je m’étais promis de l’oublier. De ne plus penser à elle.

Ce n’était sans compter sur le succès médiatique qu’elle avait eu… Entre son nouvel amant qui s’était défenestré sous ses yeux et un Oscar pour la représentation la plus merdique d’Edith Piaf que j’ai pu voir. Elle était sur tous les écrans, toutes les affiches … Elle était partout …

J’avais regardé tous ses passages, dans tous les films qu’elle avait fait. Sans le vouloir j’apprenais toutes ses répliques. J’avais même acheté une perruque pour lui ressembler quand je jouais (mieux qu’elle) ses propres rôles. Les professeurs n’avaient pas tort. J’avais du talent. Et cette catin me l’avait saboté.

Au début, je ne voulais pas la tuer … Puis en regardant ses passages TV dans des interviews ou dans des shows, j’ai pu constater qu’elle ne me remerciait jamais. Elle m’avait oublié. D’ailleurs, elle ne m’avait jamais rappelé. Je lui avais laissé des centaines de messages jusqu’à ce qu’elle change de numéro.
L’envie de me venger grimpait en moi tel un volcan en éruption.
J’avais commencé à tout planifier … Un jour elle reviendra sur Paris. Un jour elle regrettera d’être revenue sur Paris.

A la Télévision, ils disaient qu’elle était la compagne d’un jeune acteur/réalisateur qui portait comme prénom de Guillaume. L’information passa dans mon cerveau telle une joute électrique qui absorba mes pensées dans une abîme de douleur.
En reprenant mes esprits ainsi que mes facultés mentales, je me dis qu’un ou deux meurtres ne changeraient rien à ma destinée, de toute façon elle le fera souffrir lui aussi, je n’aurais qu’à lui infliger tout ça dans un laps de temps plus petit.

J’avais lu beaucoup de livres sur le meurtre parfait, mais à chaque fois le tueur se faisait prendre. Entre mes recherches sur Internet et mes souvenirs de quelques bons livres, sorti un mélange bien… Perfect.
Je n’avais qu’à me glisser dans la chambre d’hôtel de luxe comme si de rien n’était et je ferais ce que j’ai à faire.

Après deux mois de recherches et de préparations acharnées, j’étais l’employé model dans cet hôtel où elle vivrait ses derniers plaisirs, personne n’aurait à me soupçonner…
Les télévisions du monde entier annonçaient son arrivée en fanfare après la fin du tournage de son dernier film, qu’elle viendra présenter à Paris.
Le jour de son arrivée, à l’hôtel, je m’étais proposé d’accompagner madame et son prince charmant à leur chambre en portant leurs biens.
Elle ne m’avait pas reconnu… Elle m’avait regardé droit dans les yeux, de cet air hautain que bon nombre lui reproche, en m’ordonnant de ne pas chiffonner ses nombreuses robes de grandes marques… Que, dit elle, je ne pourrai jamais payer à ma compagne… Ma seule et unique réponse fut : « Bien sur madame, je suis désolé madame. »

Elle allait souffrir, c’était juste une question de quelques heures…

Vers 17h, j’avais demandé ma soirée au chef du personnel prétextant me sentir mal.
Je suis parti me préparer… Pour mon grand retour, le moment que j’attendais depuis tant d’années, elle allait enfin le dire … Elle allait enfin avouer que si ce n’était pas moi, elle ne serait rien aujourd’hui …
A 20h, muni d’un passe-partout des chambres de l’hôtel, je me suis dirigé vers celle où elle était, avec son beau blond de compagnon. Je ne devais pas reculer, c’était ma seule chance, mon unique espoir de retrouver pendant quelques secondes l’être tant aimé du passé.
D’un couloir perpendiculaire j’entendis un claquement de porte … Je ralentis, à cette heure ci, il ne devait pas être là, il était de sortie. Je ne devais pas reculer… Je le tuerai en premier, sous ses yeux, comme ça, si elle l’aime, elle souffrira autant que j’ai souffert et elle mourra à son tour!

J’ouvris la porte… Et me glissa dans cette chambre… Une seule lumière allumée, celle de la chambre où ils se trouvaient… Des semblants de sanglots se faisaient entendre en provenance de la source de lumière …
En m’approchant je fis tomber un vase qui s’écartela en plusieurs morceaux en provoquant un énorme vacarme.
A ce bruit, les sanglots diminuèrent d’intensité et je sentis des pas venir vers moi.
Pris de panique je me suis caché derrière un porte manteau, en espérant que dans le noir je ne sois pas visible…
La porte de la chambre s’entrouvrit et je pus entendre sa voix :

…Guillaume, c’est toi…? T’es revenu ..?

Mais quelque chose n’allait pas, sa voix était si … Faible.

Je ne la voyais pas encore… Elle répéta cette phrase encore une fois.. Quand soudain, je pus enfin l’apercevoir… Elle était là, à quatre pattes, rampant dans la presque pénombre de cette lumière tamisée où était plongée l’entrée de la suite… Je n’avais pas encore remarqué les nombreux bleus sur son corps.. Mais j’avais vite réussi à distinguer cet œil au beurre noir qu’elle arborait sur son doux visages… Qui avait plutôt l’air d’une scène de crime avec cette lèvre en sang.

C’était elle… Elle était là…  Mais elle avait tellement changé!
Elle me regarda longuement, je ne sais toujours pas si elle m’avait reconnu. Je ne suis même pas sûre de l’avoir moi-même reconnue.
M’excusant du dérangement occasionné en prétextant m’être trompé de chambre et sortant comme si je n’avais rien prévu.
En refermant la porte je cru entendre mon nom, mais ne faisant même pas l’effort de rouvrir la porte.

Je me dirigeais vers un destin, aujourd’hui, qui était mien. Laissant là, cette star internationale que les gens appellent désormais, Marion Cotillard.

Crédit photo : Yaniss Ghanem


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