La convoitise est souvent présente quand on voit d’autres personnes attiré par un objet. Les auteurs des publicités l’ont sûrement bien compris. Il se peut que généralement la vue d,un objet n’évoque aucun intérêt mais voir une personne s’y intéressé et le désir de l’acquérir devient présent
Nuage
Cet objet tant convoité
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Les objets possèdent la valeur qu’on veut bien leur accorder. En fait, cette valeur augmente quand l’objet est désiré par d’autres, que ce soit un aliment, un vêtement ou tout autre accessoire.
Des chercheurs français ont montré que ce phénomène n’avait pas seulement une assise psychologique. Mathias Pessiglione et ses collègues de l’Inserm ont montré qu’il dépend aussi de mécanismes cérébraux bien précis, indispensables à cette contagion du désir.
Le désir mimétique revisité
L’exemple du jouet prisé par tous les membres d’un groupe d’enfants illustre bien le pouvoir d’attraction d’un objet sur un autre. Pourquoi les enfants désirent-ils tous le même jouet, alors qu’il en existe d’autres tout aussi attractifs dans la pièce?
Cet attrait s’appelle le désir mimétique. Il a été décrit pour la première fois dans les années 1960 par le philosophe français René Girard. La valeur de l’objet ne tient pas à ses qualités intrinsèques, mais au fait qu’il est convoité par d’autres.
M. Girard décrit le phénomène comme une sorte de contagion motivationnelle d’un individu à l’autre pour l’obtenir. Ainsi, plus les gens s’intéressent à l’objet, plus celui-ci devient séduisant.
Des bases cérébrales
L’équipe française a voulu mieux comprendre les mécanismes cérébraux à l’origine de ce phénomène. Pour y arriver, elle a étudié les comportements et l’activité cérébrale de 116 adultes. Les chercheurs les ont installés dans des appareils d’imagerie par résonnance magnétique (IRM) et ont diffusé des dizaines de petites vidéos présentant des objets différents, convoités ou non. Par exemple, une part de gâteau montrée du doigt par un comédien semblant saliver à l’idée de la manger, puis abandonnée sur une table dans une autre vidéo. Les participants devaient, chaque fois, indiquer une note de désirabilité de 1 à 10. Résultats : les objets convoités par d’autres ont obtenu de meilleures notes que ceux auxquels personne ne s’intéressait.
Les chercheurs ont pu observer en parallèle l’activité cérébrale des sujets soumis à ces évaluations. Ils ont constaté deux phénomènes déjà connus :
- ►Le premier est l’activation d’une zone appelée système des neurones miroirs quand un sujet observe une action. Cette région s’active dès qu’un individu fait un geste ou voit quelqu’un d’autre l’effectuer. Cela permet de comprendre l’action d’autrui.
- ►Le second est l’activation d’une autre zone appelée système cérébral des valeurs lorsque le même sujet observe un objet séduisant.
Les auteurs ont observé un troisième phénomène, inconnu à ce jour. Lorsqu’un participant observe un comédien voulant se procurer quelque chose, l’activation du système des neurones miroirs stimule le système cérébral des valeurs. Par conséquent, la valeur accordée à l’objet augmente, tout comme le désir de l’obtenir.
« Le fait d’observer un individu voulant se procurer un objet augmente son propre désir pour cet objet. » — Mathias Pessiglione
Selon M. Pessiglione, ces travaux montrent bien que le désir est contagieux et à l’origine d’un mécanisme cérébral. Il ajoute qu’un dysfonctionnement des zones impliquées pourrait peut-être expliquer certains problèmes de sociabilité, par exemple chez des enfants autistes qui n’accordent pas la même valeur aux objets que les autres ou ne s’intéressent pas aux mêmes choses.
Le détail de ces travaux est publié dans le Journal of Neuroscience.