D’aucuns penseraient que le cyclisme n’est qu’une affaire de kilométrages filmés en plongée dans le décor fluide et apathique de quelques paysages remarquables du territoire français. Une séance d’endurance pour le téléspectateur chaque été au mois de juillet. Des heures de vacuité interminable sur l’écran avant que ce peloton ne se décide enfin « à mettre en route ». L’affaire, d’une « belle échappée » filmée en plan serré depuis la moto accréditée pour s’approcher au plus près des audacieux guerriers à la manœuvre. « Le bon coup du jour », mais « repris » heureusement ! juste avant la séquence en plan large de « l’emballage final » et les interviews des principaux leaders avant de rendre l’antenne à la régie publicitaire. Cette idée commode d’un divertissement télévisuel convenu à l’avance pour rassurer tout le mode en n’inquiétant personne… Et je pensais : « Du grand spectacle des courses cyclistes comme la matière d’un combat épique entre les préjugés récurrents des amateurs d’apéro à la plage, et ce corolaire d’une difficulté à prouver le contraire chaque fois qu’il manquerait des bretzels dans le paquet de petit gâteaux ».
Oui, bon, je sais ! Vous me l’avez déjà dit… Cette propension à m’étendre dans ces carcans de la pensée baroque et post-moderne, au lieu de vous envoyez tout cru une de ces bonnes formules toutes prêtes à avaler dans les soirées politiques. D’aucuns… oui ! penseraient… que nul n’est besoin de se mettre dans tous ses états pour si peu, et ils auraient surement leurs raisons. Une simple question d’horizon… Tout ça pour en venir au fait de quelques jours passés sur les routes pour suivre des courses par étapes du mois de mai dans le cadre d’un boulot de reporter à France Télé.
Derrière la caméra principale : Jean-Marie Baverel piloté par Arsène Perros
"Le Tour du Jura" et puis dans la foulée, "le Tour de Franche-Comté" la semaine suivante. Cette sorte de digression d’un grand barnum sportif cycliste dans la grande machinerie audiovisuelle du printemps au lieu-dit d’une frontière franco-suisse plutôt perméable ces temps-ci d’un changement majeur de politique en France. quinze jours de poésie et d’art lyrique sur d’immenses chemins de traverse et leurs profils, oui, nietzschéens. De la grande littérature philosophique accrochée aux pentes abruptes d’un massif jurassien qui n’en demandait pas tant. Voilà comment tout a pris corps dans ma mémoire d’un souvenir de tournage "homérique". Tout sauf cette platitude annoncée. Tout sauf ses poncifs attendus. Mais plutôt un plan de tournage à la convenance des événements .Un grand moment de suspense en réalité comme on dit des films de genre et du cinéma populaire. Ce style d’un temps suspendu au fil de la tension médiatique… Un numéro d’équilibriste à la fortune des aléas et des coïncidences… De quoi se régaler un peu d’une belle corde à sauter dans laquelle on peut encore se prendre les pieds en se marrant.
Pour la manière ensuite : Chaque soir, une fois passée la ligne d'arrivée avec les coureurs et à l'heure de la remise des récompenses sur le podium de la ville étape, les images tournées depuis la moto embarquée dans la course doivent être numérisées, montées et commentées sur des machines installées préalablement au moins pire des possibilités proposées par la géographie du terrain de réception... Un travail minutieux de mise en forme qu'il faut encore envoyer par satellite à la station de télévision de Besançon. "Juste à temps", c'est-à-dire bien souvent "juste" quelques secondes avant le Direct quotidien prévu dans l'édition du soir. Une course contre la montre où chaque membre de l'équipe présente sur place doit tenter de jouer sa partition sans une fausse note. Moins d'une heure après les derniers interviews enregistrés auprès des voitures d'équipes, l'oreillette crépite déjà pour préciser le temps accordé aux invités prévus dans le journal. L'heure, ultime... ou tout s'enchaine sans répit. L'envoi des images et du son au camion satellite, la course pour rejoindre le lieu du Direct et l'invité choisi en fonction des événements sportifs de la journée... Une course... contre le chronomètre, un smartphone collé à l'oreille pour rester en liaison avec la régie finale et continuer d'envoyer des photos sur le Blog Cycliste... préciser, l'orthographe du nom de la ville d'arrivée, celui du vainqueur de l'étape, celui d'un directeur sportif ou des bénévoles de l'organisation qui font l'objet d'un reportage ce soir-là. Le décompte de la scripte fait basculer alors d'un coup cette course infernale, dans l'univers intime et calfeutré d'un échange solennel avec le spectateur. L'exercice est rapide et forcément très intense où l'on doit essayer de dire l'essentiel dans la fenêtre exigeante d'un temps réduit le plus souvent à son comble. Juste la loi du genre vous me direz !... Mais chacun voit midi à sa porte, pour rester dans le principe télévisuel des jolis poncifs et des adages commodes. Ce moment où votre "invité" et vous, voyez le temps filer à l'allure folle d'une descente de l'Alpe au meilleur de sa forme.
Le temps, un peu plus tard... dans un café ou une chambre d'hôtel, de trouver une prise de courant pour recharger l'ordinateur, de trouver une connection quelqu'elle soit sur un réseau ou un autre pour continuer de transmettre le flux d'infos qui bourre un peu depuis le début de l'après-midi. (Une mine posée d'entrée par les gars d'Étupes dans la perspective d'une sortie de champ rapide dans le décor du peloton. Cette folle poursuite des hommes de Nogent pour maintenir leur maillot jaune bien dans l'axe des caméras. Cette bosse qui finira par tout faire exploser de la belle hiérarchie promise sur le papier. Un sprint de folie après le raid de quelques costauds jusqu'à la ligne d'arrivée...) Un paquet d'heures de boulot encore après la pause de 20H (le casse croute gargantuesque pour ne pas être obligé de tout digérer d'un coup, et trois ou quatre éclairs au chocolat empilés pour donner un peu de corps au café). Le temps de trier, de sélectionner et de procéder au traitement des photos ; de monter l'ensemble des bonus vidéos (portraits, interviews, rencontres, plus belles images...) Le temps de rédiger quelques faits de course, et puis de tout mettre en ligne avant l'heure du petit déjeuner. Une nouvelle course aux points chauds pour rester dans le "timing" des événements en évitant "les bordures"... et ne pas frustrer nos internautes les plus assidus.
Le dernière étape sur le Tour de Franche-Comté. Toute l'équipe s'est donné rendez-vous sur la place de l'église St Pierre à Luxeuil-les-Bains. Ce jour là, la course quitte les faubourgs de la ville avant l'heure de diffusion du journal de la mi journée. Nous décidons alors de mettre en boite un "plateau" qui remplacera la réalisationd'un Direct (impossible à cette heure) sur le lieu du départ de la cinquième et dernière étape vers la Planche-Des-Belles-Filles. Où quand le principe d'improvisation devient forcément un caractère récurrent du métier de reporter.
Des reportages chaque jour et des directs TV midis et soirs dans les JT de France 3. Plusieurs dizaines de vidéos fabriquées sur la route, et visionnées "20 000 fois" par les internautes. Au total... plus de 5000 visiteurs uniques sur le Blog Cycliste de Franche-Comté pendant ce mois de mai. Un sacré boulot d'équipe. JLG
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L'ÉQUIPE DE FRANCE TÉLÉVISION RED/ Jean-Luc GantnerIMAGE /Jean-Marie BaverelIMAGE/ Denis ColleIMAGE/ Jean-Pierre GrandidierSON/ Simon Hil MONT/ Eric DebiefSATELLITE/ Philippe Drouot