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J’voudrais pas crever seule un soir de Noël

Publié le 10 juin 2012 par Yelyam
J’voudrais pas crever seule un soir de NoëlToujours la même rengaine : Joyeuses fêtes, Joyeux Noël.
Et comme d’habitude, faire semblant que je m’en fous.

Oublier qu’il y a de ça longtemps, c’était une fête qui se fêtait joyeusement. C’était du temps de l’enfance et de l’innocence. Depuis, l’âge adulte m’a rattrapée.

Rentrer la tête dans les épaules, ne pas entendre les bons voeux. Et surtout, surtout, me faire un point d’honneur de ne pas y répondre. Mais ne pas toujours réussir.

Laisser mon regard voguer au-dessus de tout : des décorations un peu kitsch présentes partout dans la ville, des colis empaquetés entre les mains des passants. Les voir se presser pour acheter un dernier cadeau. Songer, et presque en jouir, que personne ne se presse pour m’en acheter un. Et que je n’en achèterai pour personne non plus.
Y voir un souffle de liberté.

S’en foutre vraiment. Ou en tout cas faire semblant, la plupart du temps. Ne pas trop savoir sur quel pied danser : balancer entre les deux sentiments, selon l’heure, le lieu, le moment…

Passer la soirée seule.
Pas pour pleurer. Non.
Pour se laisser, malgré tout, happer par la magie de l’instant, que l’on rate s’il y a trop de monde, trop de bruit, trop à manger sur la table.

Etre égoïste, profondément égoïste. Egoïstement seule, pour le plaisir de ma seule compagnie.
Et aussi car je ne sais jamais si je vais rire ou pleurer, et qu’il est bon de rire entourée, mais que je peux rire toute seule. Et que si je pleure, je préfère ne pas être accompagnée.

Marcher dans les rues de la ville un peu vide, pas assez vide, pas assez froide.

Faire des rencontres et des découvertes, qui ne changeront pas le cours de ma vie mais qui laisseront de bons souvenirs, pendant longtemps, pour remplacer de vieux souvenirs qui depuis trop longtemps laissent un arrière goût mélancolique aux sentiments.

Penser très fort à lui. Découvrir, en plein centre de Bruxelles, un endroit qu’il aurait adoré, qui ressemble au Casablanca de ses années de jeunesse avant que je ne sois née, avant même qu’il ne pense que cela pouvait être possible que j’existe.
Ecouter Oum Kalsoum et boire du thé.

Ne pas oublier de manger une pâtisserie, comme on le faisait ensemble en cachette.
J’ai toujours une pensée pour sa gourmandise quand je me laisse aller à la mienne. Et je succombe bien souvent.

Il est parti il y a longtemps, mais les années passent et la perte est plus grande car il rate de plus en plus d’épisodes de ma vie trépidante.

Je crois qu’il aurait bien aimé la femme libre, indépendante et originale que je promettais de devenir.

Je crois que j’aurais bien aimé le vieil homme curieux du monde, ouvert aux autres et à l’humour décalé qu’il n’a pas eu le temps de laisser mûrir.

J’ai trinqué à sa mémoire. Pas à sa santé, lui qui est mort, forcément un peu seul, un soir de Noël.


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