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sourceLapresse.ca Publié le 12 juin 2012 à 07h23 | ...

Publié le 12 juin 2012 par Cheaplabel


Tout en reconnaissant au nom de la liberté... (Photo: Robert Skinner, archives La Presse) Agrandir Tout en reconnaissant au nom de la liberté d'expression le droit de Fred Pellerin de porter le carré rouge, la ministre Christine St-Pierre a déclaré: «Mais nous, on sait ce que ça veut dire, le carré rouge: ça veut dire l'intimidation, la violence; ça veut dire aussi le fait qu'on empêche des gens d'aller étudier.» Photo: Robert Skinner, archives La Presse

sourceLapresse.ca  Publié le 12 juin 2012 à 07h23 | ...
Marc Cassivi
La Presse

On peut être de gauche ou de droite. On peut être pour ou contre une hausse des droits de scolarité. On peut trouver que les atteintes aux libertés fondamentales de la loi 78 sont justifiables dans une société libre et démocratique. Mais quand on est ministre, quand on est ministre de la Culture dans un contexte de crise sociale, on ne peut se permettre de déclarer que le carré rouge porté par des milliers de citoyens - pour la très grande majorité pacifique - est un symbole de «violence» et d'«intimidation».
De la part d'un clown qui blogue anonymement de son demi-sous-sol à Saint-Augustin-de-Desmaures, on peut admettre pareille ânerie. De la part d'un ministre, c'est un dérapage en règle. Un mensonge irresponsable, tellement grossier qu'il ne se qualifie pas comme un sophisme.
Un ministre a plusieurs responsabilités. Celle, entre autres, de faire preuve de discernement et de bonne foi dans ses déclarations publiques. Celle, de façon générale, de calmer le jeu, plutôt que de jeter de l'huile sur le feu.
Jeter de l'huile sur le feu, c'est pourtant ce que le gouvernement Charest, avec toute son arrogance, tout son mépris et son cynisme, s'applique à faire depuis le début de ce conflit. Un conflit qui s'est transformé en crise sociale, à force d'entêtement d'un gouvernement impopulaire qui a laissé pourrir la situation et qui pourrait ironiquement en profiter.
Jeudi, le conteur Fred Pellerin a refusé d'être fait chevalier de l'Ordre du Québec, en raison de la crise actuelle. «Je m'en voudrais de célébrer et de trinquer à l'honneur de ce peuple dans le contexte actuel, où même notre démocratie se fait secouer par la base», a-t-il écrit.
La réponse de la ministre de la Culture est venue vendredi matin. Une réponse interprétée par plusieurs (j'en suis) comme une provocation et une désinformation d'une inavouable bêtise. À fortiori de la part d'une ex-journaliste.
Tout en reconnaissant au nom de la liberté d'expression le droit de Fred Pellerin de porter le carré rouge, la ministre a déclaré: «Mais nous, on sait ce que ça veut dire, le carré rouge: ça veut dire l'intimidation, la violence; ça veut dire aussi le fait qu'on empêche des gens d'aller étudier.»
«Nous», au gouvernement, on «sait», semble-t-il. Paradoxalement, Marc Parent, le directeur du Service de police de la Ville de Montréal, qui est sur le terrain, refuse d'associer le carré rouge à la violence. «Ça n'a rien à voir», a-t-il déclaré hier. Il n'a pas eu le mémo du bureau du premier ministre? Le «nous» de la ministre St-Pierre ne serait pas inclusif?
Je ne sais pas s'il faut parler dans ce cas précis de mauvaise foi ou de crasse incompétence, mais en matière d'intimidation, on ne fait guère mieux que la déclaration sans nuance de Christine St-Pierre.
Le plus grave, c'est que ce discours simpliste, découlant d'une logique binaire que ne renierait pas George W. Bush («Vous êtes avec nous ou avec les terroristes»), semble avoir été assimilé par l'ensemble des ministres du gouvernement Charest.
La ligne de parti est claire et a pour objectif de stigmatiser tous ceux qui, même de la manière la plus pacifique et symbolique, contestent l'intransigeance du gouvernement dans son combat contre les étudiants.
Des gens «violents» qui pratiquent «l'intimidation», selon la logique tordue de la ministre de la Culture. Comme Pierre Lapointe, qui portait le carré rouge jeudi dernier, lors du spectacle d'ouverture des FrancoFolies? Ou Ariane Moffatt, qui a joué de la casserole et chanté jeudi 17 mai 2012, inspirée par la crise actuelle, dimanche soir au Métropolis? Des gens comme les employés du Théâtre d'Aujourd'hui, que j'ai vu porter fièrement le carré rouge à la boutonnière, pendant le OFFTA?
Je comprends, quand les esprits s'échauffent, que personne n'est à l'abri d'une ineptie. Je comprends aussi que ce gouvernement semble prendre les gens pour des abrutis, dupes de ses stratégies de relations publiques. En tentant stupidement de diaboliser des milliers de citoyens qui s'affichent en faveur de la justice sociale.
Des milliers de citoyens qui dénoncent la violence et l'intimidation - celle du gouvernement, des policiers, comme celle des casseurs. Et qui portent le carré rouge, non pas, comme le prétend la ministre St-Pierre, pour empêcher des gens d'étudier, mais pour que, justement, tout le monde ait le droit d'étudier.


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