La place de la religion, de la Perse à l’Iran.
Les différentes religions et leurs places de la Perse à l’Iran… Bien que par souci de ré-information et afin de pouvoir éviter les clichés courants en occident sur la différence entre antisionisme et antisémitisme ma troisième chronique ai portée sur les relations entre l’Iran et le judaïsme, je trouvais qu’au final, il était dommage d’aborder la religion hébraïque sans aborder l’histoire religieuse de l’Iran. Depuis l’ancien empire Perse, tolérance est traditionnellement maître mot en ce qui concerne les différentes pratiques religieuses acceptées par les populations persanes au sein de leur patrie.
En guise d’introduction, citons l’article 13 de la constitution actuelle, reconnaissant que certaines minorités « dans les limites de la loi, sont libres d’accomplir leurs rites religieux et d’agir, en ce qui concerne le statut personnel et leur enseignement religieux, selon leur liturgie »
Au VIIème siècle avant Jésus-Christ, pour la première fois, une religion monothéiste est introduite en Perse : le Zoroastrisme. Jusque là, seule l’idolâtrie faisait office de religion. Cette nouvelle religion est plus précisément une immense réforme de la principale religion polythéiste du pays, le Mazdéisme. Avec le Zoroastrisme, il n’y a plus qu’un seul Dieu unique, Ahura Mazda, ancien dieu central de du Mazdéisme, dont le statut était semblable à celui de Zeus chez les grecs, et les anciennes divinités mineures deviennent des saints, dont la plus connue est Mithra. Le Prophète d’Ahura Mazda est connu en occident sous les noms de Zoroastre et Zarathoustra, ainsi que Zardost en persan et Zerdest en kurde. Cette grande réforme religieuse trouvera principalement sa source dans le Kurdistan iranien actuel. Développé sous les Achéménides, dont le plus célèbre empereur fut Cyrus, le conquérant de Babylone (voir chronique 3) le zoroastrisme n’est cependant pas promu religion d’état. En effet le pouvoir royal jugera indécent de privilégier une religion par une autre. Lors de la chute des achéménides provoquée par Alexandre le Grand, celui-ci brûlant la quasi-totalité des bibliothèques dela Perse (exceptés quelques traités de science et de philosophie ramené en Grèce constituant la majeure partie de la science « grecque ») une grande partie de l’Avast, le livre sacré des zoroastriens, sera détruit. La religion ne mourra cependant pas, et passera même au rang de statut d’état sous les sassanides, dernière dynastie de la perse préislamique. Suite aux conquêtes arabes et à la chute du dernier empereur préislamique Yazdgard III, les arabes détruiront également une grande partie de l’Avast, ce qui fait que seul un quart du livre sacré de cette religion nous est parvenu aujourd’hui. La pensée zoroastrienne n’a plus évoluée depuis. En 2005, la population zoroastrienne en Iran était estimée à 90 000 membres, vivant principalement à Yazd, ainsi que dans les grandes villes iraniennes mais leur nombre ne cesse de chuter. Bien qu’ayant été persécutés longtemps par les arabes, dans les périodes oùla Perse était gouvernée par un pouvoir sunnite ainsi que sous le règne du dernier empereur Mohammed Reza Pahvali, cette situation n’a plus lieu d’être aujourd’hui, les zoroastriens bénéficiant même d’un siège de député au Majlis leur étant réservé.
Pour la communauté juive iranienne, voir la chronique 3.
Les premières communautés chrétiennes se formèrent au Ier siècle après Jésus-Christ. La première église fut construite dans la capitale de l’époque (ville qui gardera ce titre jusqu’à l’invasion arabe commandée par Omar ibn al Khattab) Ctésiphon. Cependant, aussi bien sous la dynastie sassanide que sous le Califat, puis la dynastie des omeyyades (la Persefaisant alors partie du monde musulman) la population chrétienne chutera fortement pour deux raisons différentes. Lors de la dynastie sassanide, car de nombreux chrétiens jugés comme des espions romains, souvent à tort furent expulsés du pays. Lors de l’arrivée de l’Islam en terre Perse, une majeure partie des chrétiens fit le choix de la conversion, sachant qu’à cette époque le califat avait fermement interdit le massacre de chrétiens, car considérés comme « gens du Livre ». Sous la dynastie Saffavide (1501-1736), les guerres turcos-persanes faisant rage dans le territoire de l’actuelle Arménie pour la domination de cette région, lieu de vie de la majorité chrétienne, au gré des victoires et défaites contre les ottomans la population chrétienne en Perse évoluait fortement. Depuis le traité de Qasr-i-chirin fixant la frontière entre empires Perse et Ottoman en 1639, la situation des chrétiens en perse n’a plus tellement évoluée. De nos jours, la communauté chrétienne est estimée à 200 000 membres, dont un peu plus de 180 000 sont de rite chrétien arménien. Ils bénéficient d’un représentant au Majlis. Cependant beaucoup de chrétiens iraniens ne s’estime pas respecté, supportant mal le fait de devoir s’en tenir à la séparation des sexes imposée par la loi iranienne ainsi que de devoir pour les femmes porter le hijab, jugeant que ces mesures ne sont pas conformes à leurs traditions. Mais cependant, le Noël arménien (6 janvier) est fêté librement à Téhéran, l’Iran étant même à l’occasion de cette date un des rares pays de la région à autoriser la représentation du personnage du Père Noël (jugé trop « blasphématoire dans les théocraties du Golfe) et les églises de Téhéran ont toujours put organiser leur messe sousla République Islamique.La langue arménienne est également librement enseignée. En dehors de la capitale, la communauté chrétienne est très peu présente, excepté Ispahan.
La dernière communauté c n’ayant pas été encore abordée est celle représentant aujourd’hui entre 98 et 99% de la communauté iranienne : la communauté musulmane, dont un peu plus de 87% appartient au courant chiite et entre 11 et 12% au courant sunnite. La religion musulmane s’implante en Perse suite à la chute de Yazdgard III, et entre 642 et environ 820, elle est une province des califats Bien-Guidés (Omar ibn al Khattab, Uthman et Ali ibn Abu Talib) puis appartiendra aux califats omeyyades et abbassides. Entre 820 et 1005, différents royaumes, tous musulmans, se forment au sein de cette province, l’unité de la Oumma(communauté musulmane) se fissurant et plusieurs états musulmans se créant hors de la tutelle de l’Arabie. L’Iran connaitra une renaissance culturelle (poésies, peintures et littérature) et scientifique entre les Xème et Xième siècle lorsque les seldjoukides unifient une grande partie de l’ancien empire perse et lui permettent de retrouver une partie de leur prestige d’antan. La doctrine majoritaire de l’état est alors l’islam sunnite, imposé en grande partie plus par la force qu’autre chose. Un chiite appartenant à la branche des ismaéliens (représentant environ entre 5 et 7% des chiites d’aujourd’hui à travers le monde et ayant totalement disparus aujourd’hui) nommé Hassan Sabbah fonde dans la cité forteresse d’Alamut la secte des Assassins. Ce groupe est notamment montré dans le « block-buster » américain Prince of Persia au sein de leur cité d’Alamut, mais dans un contexte aussi bien politique que religieux totalement erroné, et ceux dont la vision des Assassins se limite à ce film n’en savent que des idioties. Descendre ce film en raison des erreurs culturelles et historiques monumentales reviendrait à tirer sur l’ambulance zigzaguant au bord d’un précipice, c’est pourquoi nous nous en passerons par simple décence. La secte des Assassins (surnommée aussi les buveurs de haschisch) pratiquait l’assassinat politique de dirigeants seldjoukides afin de lutter contre le pouvoir tentant d’imposer le sunnisme par la force. Suite aux invasions mongoles de 1220 et à la prise d’Alamut, les buveurs de haschisch seront écrasés et le chiisme ismaélien a complètement disparu de Perse au cours de cette période, pour ne plus jamais y revenir. En 1501, lors de l’avènement de la dynastie Saffavide, le Shah Ismaïl fait du chiisme duodécimain la religion d’état. A l’inverse du sunnisme reconnaissant après la mort du Prophète les 4 califats bien guidés, les chiites reconnaissent la légitimité du 4ème calife Ali ibn Abu Talib, gendre et cousin du Prophète directement, le désignant 1er Imam. Les califats d’Abu Bakr, Omar ibn al Khattab et Uthman sont jugés comme illégitimes. Les chiites, selon leur courant, reconnaissent légitimes un certains nombre d’Imams, tous descendants du prophète et jugés Infaillibles : Ismaéliens et duodécimains s’accordent sur les six premiers Imams : Ali ibn Abu Talib, Hassan, Hussein (les deux petits fils de Mohammed), Ali-as-Sajjad, Mohammed-al-Baqir et Jafar-as-Sadiq. Cependant à la succession de ce dernier, un problème se pose : son fils ainé devant lui succéder est décédé avant lui. Les ismaéliens considèrent son fils ainé Ismaël comme 7ème Imam puis le fils ainé de ce dernier comme 8ème Imam, alors que les adeptes du chiisme duodécimain (appelé aussi Jafarisme, du nom du 6ème Imam en ayant été certes pas le fondateur, mais un de ceux l’ayant le plus promu ; enseigné et détaillé) suivirent le fils cadet de as-Sadiq, Moussa-al Kazim, puis Ali Reza al Ridha, Mohammed-al-Taqi, Ali-al-Naqi, Hassan-al-Askari puis enfin Mohammed-al-Mahdi, ayant disparu mystérieusement enfant et, pour les chiites duodécimains, a été occulté sans être décédé. Toujours en vie, il est selon la doctrine jafarite censé revenir le jour du jugement dernier, alors que la doctrine sunnite reconnait certes sa venue au jour du jugement dernier mais considère qu’il n’est encore jamais né.
Cette doctrine chiite, une fois désignée religion d’état, verra progressivement le nombre de ses fidèles croître à travers le temps. A partir de ce moment, le principal combat que connaitra la religion chiite désormais majoritaire sera la révolution blanche, lorsque le dernier Shah d’Iran Pahvali souhaitera occidentaliser le pays en le rendant laïc, interdisant également le port de la barbe et du voile afin de limiter la visibilité de la religion. Cependant sa révolution blanche sera un échec complet, et ne fera que précipiter sa chute en 1979, où l’Iran devient une république islamique. La religion d’état est alors l’Islam, sans précision de courant. Bien que les chiites sont ultras-majoritaires, cela met sur un même pied d’égalité les deux courants, les sunnites n’étant ainsi pas considérés comme une minorité religieuse. C’est pour cela qu’ils n’ont pas de siège les représentant au Majlis.
Une toute dernière communauté religieuse existe en Iran, estimée entre 100 et 300 000 membres (aucun chiffre officiel n’existant à propos de cette communauté) : les baha’is. Il n’est pas dans l’habitude de ces chroniques de critiquer le pouvoir iranien en place, celles-ci visant à réinformer face à la propagande occidentale sur l’Iran, cachant ainsi qu’il fait bien mieux vivre en Iran qu’on veuille nous le faire croire, mais ces chroniques se veulent objectives et doivent critiquer le pouvoir iranien lorsqu’il est en faute. En effet, la communauté baha’i est la seule à souffrir de persécutions de nos jours en Iran, nombre de ses membres étant emprisonnés arbitrairement et subissant parfois des conversions forcées. Cette situation, surtout de la part d’un état qui part son histoire a un des peuples les plus tolérants au monde, est honteuse, l’Iran n’étant pas pour une fois un modèle en ce qui concerne la question de la religion. J’espère de tout cœur que le président iranien Mahmoud Ahmadinejad et le guide suprême Seyyed Ali Khamenei ouvriront les yeux sur ce comportement, et réparerons la seule tache au bilan de la question de la tolérance religieuse en Iran. La communauté baha’i, en dehors de l’Iran, est principalement et en grande majorité basée… à Haïfa, en Israël.
Pour terminer cette chronique, je tiens à terminer cette chronique sur une note positive, en signalant qu’en dehors de la question baha’ie, dela Perseà l’Iran, ce pays a toujours été un grand modèle en ce qui concerne la question religieuse, etla Franceavec sa Saint-Barthélemy devrait prendre exemple et se taire.
Je tiens à remercier mon frère de combat Allain Jules ainsi que la modératrice. Je tiens également à remercier Nordine, à qui je dédie cette quatrième tribune. Sans toi, je n’aurais pas eu accès à une source importante pour la rédaction de cette chronique mon frère, encore une fois merci.
Je vous dis à très bientôt, à la semaine prochaine,
Salaam ahlikoum !
Jafar