Magazine Humeur
Pour tous, c'était LA maison. Personne n'y habitait. Tout le monde y venait.
Week-ends, vacances : les uns, les autres s'y rendaient, parfois s'y croisaient, parfois non.
C'était de ces lieux où l'on vient trouver un silence. Le sien, peut-être bien. Niché là, qui sait ?
Entre prairies et forêt. Oiseaux. Sons de la nature, incongrus parfois.
Le printemps et l'été recueillaient de larges suffrages, évidemment, et il arrivait qu'embouteillages soient au rendez-vous.
L'on improvisait alors.
Qui songeait à la moue passait son chemin.
L'automne et l'hiver, c'était plus clairsemé. Il était rare que LA maison reste vide bien longtemps. Beaucoup avaient la clé.
C'était Suzanne était la maîtresse des lieux. Elle avait ainsi voulu ce lieu. Les règles d'ailleurs étaient simples : tous laissaient aux suivants de quoi tenir quelques jours.
On refaisait les stocks qu'on vidait.
On s'amusait, aussi, en laissant des denrées surprenantes.
On allumait vannes et robinets en arrivant. On fermait le tout en partant.
La cagnotte réglait les impôts et les factures.
Nadia avait logiquement choisi de venir se déposer ici. Déposer était le mot juste.
Elle sourit en découvrant des pois chiches dans la réserve. Elle dénicha une boite de thon et des bretzels. Elle en fit repas.
Les premiers jours, le sac avait traîné dans l'entrée et elle sur le canapé. Elle sortait peu. Le temps de quelques cigarettes. De quelques larmes.
Elle prenait des douches sans mousse. Dormait beaucoup.
Le temps filait entre les gouttes.
Elle les avait surpris. Lui. Elle.
Elle n'encaissait pas.
Le portable éteint, elle ne l'avait pas rechargé. Elle ne voulait personne. Elle avait juste trouvé l'énergie de remplir un sac et de partir. Mâchoires bloquées. Encore maintenant.
Elle avait débarqué là, heureuse que la clé soit dans son vide poche.
LA maison serait parfaite.