« L’Histoire est toujours écrite par les puissants » se lamente-t-on entre deux louches de caviar au café de Flore. « Et pour cause ! Lorsque les tribus primitives prennent la plume, c’est pour se la mettre dans le cul ! » plaisante-t-on lorsque l’ambiance se fait plus conviviale, plus propice aux confidences. Les journalistes, économistes et autres observateurs de la marche du monde sont pourtant témoins depuis quelques décennies d’un phénomène qui tend à flatter l’égo de l’éminence hégémonique. Quelques nations, tels le Brésil, la Chine, ou l’Inde, tentent d’imiter notre modèle de développement pour, à leur tour, goûter aux joies de la suprématie rutilante. En bons historiens du présent, ils nomment ces audacieuses contrées, les pays émergents. Des pays surgis du néant pour se précipiter dans le vide.
À eux les téléviseurs couleurs plasmas, les grands prix de Formule 1, les appareils à raclette, les stock-options et les subprimes, les tapis de douche antidérapants Ikéa, les Maxi best of Big Mac Huile de Palme, les brosses à dents électriques à régulateur de fluor, les mélopées de David Guetta, l’accès à chiennesenchaleur.com illimité, le poker en ligne avec les conseils de Patrick Bruel traduits en 127 langues, les concours de tuning pour camion… Et à eux également, une espérance de vie plus longue !! Antidépresseurs vendus séparément.
Bienvenue donc à tous ces nouveaux pays qui nous font l’honneur de tenter de nous ressembler, et grâce à qui nous nous sentirons bientôt moins seuls dans l’impasse. Un mimétisme mortifère qui n’est pas sans poser la question des limites de l’imitation.
Un exemple inédit de servitude volontaire, de colonialisme consenti. Un mode de vie peu compatible avec un épanouissement durable de l’ensemble des habitants de la planète. Un modèle de développement économique basé sur l’exploitation des plus faibles. Avilissant l’Homme et son environnement, souillant peu à peu l’espace vital encore disponible. Altérant, détériorant, rongeant.
Oxydant.
Guillaume Meurice
13/06/2012