On dirait qu’il y a des pédophiles partout. Est-ce qu’ils sont plus qu’avant ? L’être d’Internet donne t’il un outil pour les cyberprédateurs pour échanger avec d,autres semblables des photos de victimes mineurs ? Peut-On en venir a bout ?
Nuage
Plus de pédophiles, mais une traque plus intensive
ILLUSTRATION: LA PRESSE
Anabelle Nicoud
La Presse
Plus de signalements, plus d’accusations. Au cours des dernières années, le phénomène des cyberprédateurs sexuels et des consommateurs de pornographie juvénile, loin de s’essouffler, a pris de l’ampleur, démontrent des chiffres compilés entre 2009 et 2011 par le Centre national de coordination contre l’exploitation des enfants de la GRC (CNCEE), que La Presse a obtenus.
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Des pédophiles cachés derrière les écrans d’ordinateurs et de téléphones intelligents? L’image est toujours d’actualité. Pire: au cours des dernières années, la pornographie juvénile se fait de plus en plus violente.
«Les choses qu’on voit ici sont épouvantables, dit Bob Resch, officier responsable des opérations du CNCEE. Les sévices sur les enfants sont beaucoup plus violents, explicites, visuels et audio.»
Créé en 2004 par le gouvernement fédéral pour contrer l’exploitation sexuelle des enfants au Canada, le CNCEE travaille en collaboration avec les corps de police canadiens, mais aussi internationaux, comme Interpol ou Europol.
Au cours des trois dernières années, le CNCEE a reçu un nombre grandissant de plaintes, de signalements et de demandes d’aide, en grande majorité pour des sites web comportant de la pornographie juvénile et des infractions liées à la pornographie juvénile.
En 2009, le CNCEE en recensait plus de 3000. Un an plus tard, ce sont plus de 4974 plaintes et signalements qui ont été déposés au CNCEE et 3491 pour les trois premiers trimestres de l’année 2011.
Ces signalements peuvent provenir de différents corps de police internationaux et nationaux, mais aussi du site cyberaide.ca
Les corps de police prennent en effet les menaces et l’exploitation dont les enfants sont victimes très au sérieux. Au Québec, province où le CNCEE confie le plus d’enquêtes au Canada après l’Ontario, la Sûreté du Québec a ainsi annoncé au printemps l’ajout d’une vingtaine de policiers à son escouade spécialisée dans la recherche de cyberpédophiles et le démantèlement de réseaux pédophiles.
De plus en plus d’accusations
Au cours de la dernière décennie, une nette tendance à la hausse du nombre de personnes accusées de pornographie juvénile et de leurre s’est dessinée au Canada.
En 2003, moins de 200 personnes ont été accusées d’infractions de pornographie juvénile dans tout le pays. Sept ans plus tard, elles ont été un peu plus de 500 à répondre à des accusations de ce type.
Les accusations de leurre ont elles aussi grimpé au cours des dernières années. Moins de 10 personnes ont été visées, en 2003, par ce type d’accusation. En 2010, ils étaient près d’une centaine.
«On sait que la pédophilie n’est pas un phénomène nouveau. Le problème, avec l’internet, c’est que le criminel a un certain sentiment d’anonymat et de distance. Ils ont l’impression qu’ils ne se feront pas attraper», observe Marc-André Léger, chargé de cours à l’Université de Sherbrooke et spécialiste de la sécurité informatique.
«La cyberdépendance et les problèmes liés au cybersexe sont de plus en plus importants: ça ne va pas en diminuant. Mais d’un autre côté, on attrape de plus en plus de [prédateurs] grâce aux outils de sensibilisation et de dénonciation. Les enquêtes débouchent sur des arrestations», poursuit M. Léger.
Le nombre grandissant de signalements comme de mises en accusation témoigne aussi d’une sensibilité accrue du public et des policiers à l’égard de la production et de la consommation de pornographie juvénile virtuelle.
On peut penser notamment au succès, aux États-Unis, de l’émission de télé To Catch a Predatoret, au Québec, aux récents reportages de l’émission J.E., de TVA.
«Ce qui change, c’est qu’on peut identifier ce qui se partage aujourd’hui sur les ordinateurs. Avant, il n’y avait pas de façon de partager des photos pornographiques. Aujourd’hui, on a des méthodes de communication plus efficaces que par le passé», souligne M. Resch.
La supervision parentale, meilleur outil de lutte
Depuis la fin des années 90, l’organisation à but non lucratif Enfant-Retour a donné des ateliers de prévention à plus de 150 000 enfants du Grand Montréal. Mais selon Pina Arcamone, directrice générale, aucun outil ne remplace la supervision parentale.
«Il faut prendre le temps de connaître nos jeunes, de voir quels sites ils fréquentent», explique-t-elle.
C’est aussi aux parents qu’Enfant-Retour offre des ateliers de formation pour les tenir à jour sur les dernières évolutions technologiques. «Avant, on pouvait mettre l’ordinateur de famille dans une salle accessible. Mais maintenant, les jeunes peuvent se brancher partout, grâce à leur téléphone. Il faut alors s’assurer que l’enfant va appliquer les mêmes règles de sécurité.»
- Avec la collaboration de William Leclerc