On ne se lasse pas de découvrir la collection INA/Comédie-Française lancée voici quelques temps par les Éditions Montparnasse.
L’on retrouve donc, la troupe de la Maison de Molière dans tous ses états. C’est la larme à l’œil que l’on revoit nos chers disparus: les Gence, Deiber, Etcheverry, Ducaux… dans trois spectacles enregistrés au Théâtre de l’Odéon en 1971 et 1973.
Impossible d’adresser le moindre reproche sérieux à ces captations qui firent un temps les beaux soirs de l’O.R.T.F.
La classe, l’élégance, la grâce, le sourire sont les maîtres mots pour les Fausses Confidences dans la régie piquante et gourmande de Jean Piat, ici Dubois plein d’humour et de malice.
Sentiments amoureux et conditions sociales sont luxueusement et jubilatoirement mis en évidence dans un écrin sorti de chez Watteau ou Chardin. Le trio féminin, Denis Gence, Micheline Boudet, Paule Noëlle joue du texte noir et or de Marivaux comme une chatte avec une jatte de lait. D’une noblesse rare également, le Dorante du juvénile Simon Eine, avec un joli travail sur la fragilité, le mystère et la passion. Un rien marionnette par contre le Lubin de Jean-Luc Moreau. Bernard Dhéran et Jacques Eyser faisant mieux que de simples et intelligentes apparitions. Plus que du théâtre filmé, la vie, légère et profonde, la comédie des sentiments dans sa vérité première.
En octobre 1959, Jean Giraudoux fait son entrée officielle au Français avec Electre en présence du Général de Gaulle et André Malraux. Pierre Dux en assume la mise en scène dans un astucieux décor et les costumes de Georges Wakhévitch. Sur ce grand mythe de l'Antiquité, voici sans doute la meilleure pièce giralducienne, avec Ondine.
Malgré un texte un rien bavard et elliptique, Électre possède une grande force tragique sans jamais perdre cet esprit étincelant, un humour impayable.
On s’habille chic chez les Atrides en cette année 1971. Sous la houlette de Pierre Dux, Geneviève Casile est réellement habitée par son personnage. Ses affrontement avec Annie Ducaux, Clytemnestre hautaine et impériale, sont d’une force toute racinienne.
On aime beaucoup aussi le jeu subtil de Paul-Emile Deiber en mendiant espiègle. François Chaumette (Egisthe) et Michel Duchaussoy (le Jardinier) achèvent de nous séduire. Mention spéciale à Paule Nöelle qui fait de sa "tirade" d’Agathe de la dynamite à l’état pur, et aux six Euménides tous âges confondus. Plaisir de retrouver Jean-Noël Sissia, Oreste au timbre si particulier, cette voix particulière, bien placée dans le masque.
S’inscrivant dans la tradition d’Henri Rollan (lui aussi grand sociétaire et fin connaisseur des œuvres de Montherland), Michel Etcheverry s’attaque en 1973 au Maître de Santiago. Son Don Alvaro Dabo, dans un texte unique tel un concentré de beauté de la langue française, même avec le recul, fait toujours aussi peur dans le refus de son époque où bêtise, rapacité, convoitise, cruauté et aucune élévation de l'esprit sont les maîtres mots. Très belle et digne Marianna de Ludmilla Mikaël, Piéta castillane plus vraie que nature. L’entourage est de premier ordre: Destoop, Eine, Sissia, Boutté, Bertrand, Arrieu…
Trois témoignages uniques. Reflets d’une époque, d’une certaine idée de la tragédie, du théâtre. Classique la Comédie-Française? Et comment! Mais non poussiéreuse ou cacochyme!
A la recherche du temps Pierre Dux comme disait le regretté Michel Duchaussoy…
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