Sur deux questions que j’ai aimé poser aux écrivains, rapport à la nature du Très-Haut expliquée aux enfants et à leur désir de revivre dans la peau d’un animal…
À mon excellent confrère Jean Ammann, chroniqueur à La Liberté de Fribourg de passage l’autre jour à la Désirade, j’ai raconté que, parfois, à la fin d’un entretien avec un écrivain avec lequel je me sentais en complicité suffisante, je posais deux questions apparemment loufoques, mais qui m’ont valu de belles et bonnes réponses. La première portait sur l’explication que l’écrivain donnerait à un enfant l’interrogeant sur Dieu ; et la seconde sur l’animal en lequel il lui plairait de se réincarner.
Entre autres belles et bonnes réponses d’un Amos Oz ou d’une Jacqueline de Romilly, d’une Doris Lessing ou d’un Hugo Claus, j’ai cité, à mon interlocuteur visiblement intéressé, celles que Patricia Highsmith me donna en 1989 en sa petite maison de pierre d’Aurigeno, dansle Val Maggia.
Pour cette agnostique avérée, expliquer Dieu à un enfant ne supposait aucune complication. À ses yeux, en effet, Dieu était le nom que les hommes ont donné à la représentation le plus haute de la bonté et de la beauté, autant dire : de la perfection. L’expression, en somme, du meilleur des hommes, mais aussi du pire car le nom de Dieu a justifié tous les massacres - or de cela on pouvait faire l’économie dans la présentation de Dieu à un enfant, qui le découvrirait bien assez tôt. Quant à l’animal dans la peau duquel elle revivrait le plus volontiers, Patricia Highsmith en voyait deux : un très vieil éléphant, pour sa sagesse acquise ; et un petit poisson multicolore dans un banc de corail, pour sa grâce.
Ensuite, lorsque Jean Ammann m’a interrogé sur mes propres réponses, me prenant un peu au dépourvu, je lui ai dit que j’expliquerais à un enfant que Dieu est à mes yeux une espèce de père maternel de tous les hommes, la Personne la meilleure en nous et un ciel où nous envoler, un lac où nager et un chemin en forêt où se perdre et se retrouver, un ami de toute confiance, un enfant à protéger. Et quant à l’animal en lequel je me voyais revivre, je lui ai dit que moi aussi j’en voyais deux ou même trois : un chien qui aurait la chance de vivre auprès d’une bonne et belle personne du genre de ma bonne amie, et deux chatons, respectivement nommés Castor et Pollux, figures tutélaires du signe des Gémeaux dont je suis la pure incarnation à double face, qui seraient confiés à nos deux filles Sophie et Julie…