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sous la peau comme une écharde

Publié le 22 juillet 2012 par Angèle Paoli

SOUS LA PEAU COMME UNE ÉCHARDE

La lumière traverse
parfois la peur aussi
l’angoisse pousse
son étreinte
à travers

le soleil
derrière la vitre
taches d’ombres
dans les feuillages
vibre sur la pensée

éparse

Que restera-t-il demain
de quels mots
seras-tu faite
de quelles traversées encore
entre ciel bleu  éclat de verre
et ciel gonflé de nuages

sous la peau
comme une écharde

pour dire le trop-plein
du jour sa lenteur
à panser les blessures

Et ce vent doux qui balaie
en surface
mouvement d’air  tout autour

les plans des champs
comme coquillages
en bouquets sur les dévers

le revers du temps
se tient à la marge
file ses heures sans
t’attendre

tu respires
à peine un souffle
qui te traverse cheveux
et peau joues
et sourire dans
le coulé des mots

Les noms ne sont plus les mêmes
comme absentés de la carte
d’autres rails
les ont emportés

au cœur d’autres
certitudes

à chacun son métier sa place
et moi la mienne
pour quelle nuit diffuse
il se pourrait
que l’heure passe
qu’elle te laisse sur le bord

Quelle rive la tienne
en quel sens   suivre
la marche
des visages qui se profilent
avancées d’ombres
sur les rails

Le vent balance des formes
avec le gris de l’air autour

un enfant pleure
que rien ne résigne
attente longue
sur le quai

les regards entrevus
s’éloignent
les corps aussi
dans le glissé

les voix leurs mots
se superposent
bougent tes mots
sous ta langue
bousculent phrases et images
d’autres voix glissent

sous ta voix

tu croises décroises recroises
tramail de mots
dans le tissé silence
qui se trame

Les blés
comme un champ de lumière
qu’en dire d’autre
le temps d’avant
persiste
pousse sa trace
dans le désordre du moment

parfois
un clocher scintille
dans un ciel sans histoire
temps arrêté sur la fureur

une voix funeste annonce
les désastres d’un lendemain
qui hurle sa douleur
une autre intime de se taire
de panser
les plaies du malheur

des vaches paissent blanches
figées dans le même sens
sens inverse de la marche
les rails filent
cousent la route
à l’envers

Tout à l’heure était là
encore
sera dépassé   demain
tu couds tes fils
avec tes mots
pour retenir l’instant lumière

les mailles larges
laissent passer

Hier soir était lame blessante
mère obsédante
à travers maux
une main rythmait le poème
oiseau papillon oiseau

une voix gonfle la phrase
s’en prend à l’obscène du corps
il faudrait adoucir le choc
des dents  leur violence
court sous la langue
un cri éclate

la bouche lance
son désarroi

À chaque âge ses plaisirs
à chaque tête ses pensées
une enfant dessine
ronds noirs   dans un cercle bleu
dans le labyrinthe déjà ?

le temps est-il le même
pour tous   qu’est-ce qui
te sépare d’elle  de lui
de cet autre encore

tant de choses
sous le même ciel
dans le même espace
rails identiques
pour un temps compté

même enfermement

une même lumière
un même roulement à billes
sur des voies jumelles
une même destination
chacun s’occupe

la plupart lisent
ou dorment   bouche bée
sur le vide
le jour file vers sa fin
les jeunes couples se protègent
courbés
dans la même ampleur

une route tourne qui encercle
le village jeu de l’oie
et nos enfances
avec couleurs et panda

d’une main il ajuste

la chemise d’elle
sur son dos dénudé
elle croise les bras
sur sa poitrine relève à elle
ses genoux
paupières lourdes
sur le sommeil

tapis à l’ombre des jupes
des tissus clos
sur leurs formes

les bijoux indiscrets

sertis dans leur bogue
de toile frottements d’élytres
et calme secret des eaux

Elle pense

à tout ce qui ne se peut dire
qui se panse dans le silence

elle pense à cet autre silence
le grand silence blanc
de l’écume

là-bas.

Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli


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