A la maničre de San-Antonio
Baisse la pression, tu nous les gonfles...
ou
la vraie-fausse histoire d'un accord de réduction du temps de travail
chez HP
Episode 1
1
EN AVANT LA ZIZIQUE
Dans la vie, ce qui importe, ce ne sont pas les choses en tant que telles, mais l'idée qu'on s'en fait. Zouzou (le DRH) reluquait la gonzesse derričre les vitres de son super-burlingue... Sűre qu'elle était, la gonzesse, coulée dans un moule extra, j'te dis pas, avec des nichebroques ŕ t'en faire tourner la nénette et révasserun max, mais faudrait pas trop se laisser aller, va savoir ce qui pourrait en consécuter, Dorothée!
Zouzou devait revenir ŕ ses préoccupances. Contrairement ŕ ce que dit l'autre, la vie n'est pas un long fleuve tranquille, non,c'est plutôt une grande tartine de merde dont on mange une bouchée chaque jour. Des bouchées comme ça,il en avait avalé plein son compte ces derniers temps.
On était venu lui demander quelle vision il avait de la fonction perso! Et puis quoi encore : circulez, y a rien ŕ voir! Des auteurs savants en ont mis des tartines sur la vision, comme quoi, sans vision, on est cuit, comment on sait oů on va ? Alors des pédégés vous sortent ŕ tout go leur vision de derričre les fagots, et pas question de phagocyter (remarque bien l'orthographe, ça s'écrit pas fagociter, comme tu croyais), mais tout le monde dans le rang, on regarde dans la męme direction, et on y va. Ca, c'est la théorie, en pratique, on y va ou on n'y va pas, tu me comprends, çadépendde pas mal de choses, mais pastellement de la vision... Zouzou ne se voit pas trop visionnaire, il a mieux ŕ faire, de toutes façons le mouvement se prouve en marchant, de visu comme on dit en langage savant, et en voila assez pour la vision.
"Ce que j'attends de vous est tellement clair que je ne vous l'ai jamais dit, et je crains le malentendu (ou le mal entendu?)". Ca, c'est vrai, ça, mčre-denis-je, se dit en son for intérieur notre Zouzou : quel malentendu ? J'ai rien dit!
Un autre jour, c'est des chiffres qu'on était venu réclamer, des tableaux de bord... Mais est-ce qu'on conduit l'oeil rivé sur un tableau de bord! C'est le meilleur moyen pour aller mettre son char dans le fossé! Et puis, dans les chiffres il y a ŕ prendre et ŕ laisser, c'est toute la subtilité, faut pas donner les perles aux cochons, comme dit le proverbe. Jamais de chiffresbruts, mais des chiffres nets, si on peut dire, enfin tout est dans la différence. Bachelard disait : "Il n'y a de science que du caché". Zouzou pensait qu'il n'y a de management que du caché. De ce point de vue, c'est vrai, les chiffres, ça cache autant que ça montre, c'est comme le bikini...
Bikini... la pensée de Zouzou s'envole vers l'atoll, un atoll du Pacifique, mais faut pas s'y fier... Si plage y a (plagiat), imagine, des nanas qui bikinisent, que c'est édifiant et stupétrange, avec leur soutien-gourdasse ŕ minima, et le slip tout ce qu'il y a de kangourou, mince,que c'est un spectre ŕ rester coit et plein de confusance. Zouzou en a le clapoir bé. Ca bourdonne dans sa calbombe comme dans une ruche, mais faut pas se laisser chavirer , dit, par la premičre souris qu'a des roberts bien remontés, et un contrepoids ŕ bascule ŕ faire révouilller un général de brigade...
Zouzou pose son dargeot dans son fauteuil et met ses nougats sur le burlingue. Il va se livrer ŕ une intense séance de gamberge.
Faut donner du temps au temps si on veut pouvoir assouvir un poil ses désir-ratas. Qu'est-ce qui manque pour ętre un peu plus zheureux, sinon turbiner un peu moins, prendre du bon temps un peu plus ? Bon sang, la voila la solution ! On va aménager ça, le temps, on va dire le temps de travail, ça plaira aux locdus (les représentants du personnel) "aménagement du temps de travail", mais ni vu ni connu, c'est le temps qu'est pas au travail qu'on va se ménager !
Zouzou a pris sa résolution. Il va appeler la Bombe (la DRS) qu'elle lui arrange ça. Mais en attendant, d'abord un petit tour dans la cave, pour surveiller les dives bouteilles... C'est le début du management, savoir prendre soin des darlinges, sans abuser, pas question de tomber dans la mallouse, faut rester clair. Comme disaient les latins : "Fratres caveamus !", ce qui ne veut pas dire, ignobles ignares : "Frčres, descendons ŕ la cave", mais :"Frčres, prenons garde !"
CONTRE MAUVAISE FORTUNE BOMBANCE
A l'autre bout du bâtiment se tenait, dans son burlingue aux vitres blindées, la Bombe, familičrement nommée Mimi Cracra. Elle était toute absorbée par la rédaction d'un sixičme document, tous du męme tabac depuis le matin. Ca disait en gros, mais par le menu détail :
"Monsieur,
Vous avez été embauché chez nous dans les années 80. Vous veniez d'une grande école. Nous vous offrîmes une bonne place et vous en fűtes plein de reconnaissance, car, comme dit l'autre, c'est pas tout d'avoir des bagages, faut savoir oů les poser. Vous les posâtes chez nous et exercâtes vos talents pour la plus grande satisfaction de tous. Vos évaluations de performance témoignent de votre savoir-faire et le ranking de votre rang. Bon rang ne saurait mentir. Cependant, le problčme n'est pas le savoir-faire, mais le savoir-ętre. Concernant votre ętre, nous eűmes une premičre interrogation. Nous vous convoquâtes pour librement en débattre. La question n'était pas : ętre ou ne pas ętre, mais comment vous ętes. Vous ne parűtes pas ouvert au débat, vous obstinant ŕ vouloir parler du pourquoi, quand nous discutions du comment. Notre Société, ŕ titre exceptionnel, accepta de continuer de vous payer, mais sans ętre payée de retour, puisque vous persistiez dans votre posture. Elle vous proposa un autre poste, moins conforme ŕ votre savoir-faire, pour une période limitée, espérant vous voir évoluer dans votre ętre. Mais comme un hętre peut cacher la foręt, ou comme un train peut en cacher un autre, vous masquâtes derričre votre posture une réelle imposture, puisque vous n'étiez pas en état de tenir le poste. Nous vous convôquates une deuxičme fois pour un nouvel entretien, mais celui-ci ne se passa pas mieux que le précédent. Vous arguâtes de votre bonne foi pour refuser une nouvelle proposition réputée ultime. Il fűt prévu que les parties réfléchissent et se retrouvent le surlendemain. Dčs le début vous maintîntes votre position. La Société proposa le principe d'une solution finale, aux termes de laquelle les parties rčgleraient les conséquences de leur séparation. En consécution de quoi, aprčs tergiversations et concessions réciproques, les parties sont circonvenues de ce qui suit : salaire (de rien) etc..."
Lŕ-dessus, voilŕ le turlu qui sonne ! Quel est le touriste au bout du filou ? Y en a toujours pour vous casser les vestibules, comme disait l'un (ou l'autre, je ne sais plus) ! La Bombe décoque le turlu :
- Allô ! Quoi ? Ah oui, mais bien sűr, boss... bien sűr... C'est que je dépote pas mal, par les temps qui cavalent... Ah ! Justement, il s'agit du temps ? Aménager le temps, ah bon ! Le temps de travail, bien sűr. Et ça va faire plaisir aux locdus, oui ... oui... On n'est pas lŕ en feurste pour titiller le zinzin, mais si on peut ziziller la pensarde, why not ? Une bonne idée, boss, et qui vient de vous, bien, bien... Dénoncer les accords de 82 ? Oui, oui, on peut, avant le 31 mai... On est le 29, c'est tout bene... Mais faut faire fissa, une bafouille recommandée ŕ la Direction Départementeuse... oui ... et prévenir les locdus...Trouver un motif... motivant ? Oui, on doit pouvoir faire, en cherchant... C'est éguesactement ce que j'allais dire... Fichtralement bien pensé... C'est cela qui fait la différence, comme on dit ŕ France-Inter...
Lŕ-dessus, la Bombe recoque. "Merdouille" qu'elle se dit, nous voilŕ mal barré, c'est pas unepetite affaire... J'ai bien mes réticences, mais elles sont pas davantage prises en considération qu'un pet de moineau ! Cependant,ne pessimistons pas. L'avenir ne se présente pas sous les auspices de Beaune, mais il est quand męme devant nous !
Premier boulot : se fendre d'une bafouille ŕ la Direction Départementeuse du Turbin. Expédition des affaires administrateuses. Et puis ne pas oublier les locdus : leur faire savoir de quoi il retourne, et les convoquer pour la premičre réunion, disons le 3 juin. Si on se débrouille bien, tout est ficelé pour fin octobre, au plus tard...
Y a quand męme un truc qui turboule la Bombe : on n'a pas encore le motif, pour quoi qu'on dénonce les accords, faudra le trouver d'ici le 3 juin !
Article ajouté le 2008-03-25 , consulté 5 fois