Car un vice s'était développé en moi : l'amour des cartes. Je n'avais jamais touché un jeu de cartes avant de me marier : Maurice, dans les tranchées, avait beaucoup joué au bridge. Et c'est ainsi qu'à Compiègne où Maurice avait fait de sympathiques connaissances en allant aux "Officiers de Réserve", nous étions souvent invités et passions des soirées à jouer au bridge après un bon dîner, parfois jusqu'à 2h du matin. Les enfants étaient aux soins de la bonne, mais je crois qu'ils nous voyaient partir le coeur un peu gros…
En 1932, je me trouvai enceinte à nouveau : nous en étions tous deux très heureux. Mes parents avaient toujours leur maison à Onival et avant la naissance, c'est à dire en juillet, ils prirent Monique et Alain pendant un mois. Le bon air de la mer leur fit beaucoup de bien, surtout qu'au printemps "le Si beau" "le Tom" avait eu un gros ennui. Sa soeur avait la rougeole et quand elle se déclara chez lui, le médecin, ne l'ausculta pas. Sinon il aurait remarqué que les vertèbres de sa poitrine s'affaissaient et si je ne m'en étais pas aperçue, il aurait pu devenir un petit bossu ! Le Docteur Léonard prit la chose très au sérieux. Stérogyl, huile de foie de morue, etc. ; mais le plus remarquable fut la patience et la persévérance du "Père Poule" qui, en rentrant du bureau, tous les jours, sans en manquer un seul, faisait souffler à son fils, 50 fois, une bougie… et ceci pendant des mois. Et petit à petit, la poitrine du fils reprit sa forme et avec tous les médicaments, il devint un solide gaillard !
Revenons à Onival. Ma mère qui n'avait pas eu de garçon se prit d'un grand amour pour son premier petit-fils qui le lui rendait bien ! Ils allaient tous les jours à la plage et jouaient dans le sable comme moi autrefois.
Le 3 août 1932 naissait un autre fils François. Pour le premier je désirais : Christian et mon mari François, en souvenir de son grand'père qui l'avait tant marqué ! Nous transigeâmes en : Alain. Pour le second, je ne me sentis pas le courage de priver mon mari d'avoir un François ; et j'en suis récompensée, car ce François, a toujours été heureux d'avoir le nom de son arrière grand'père, sur la tombe duquel il va tous les ans à Montigny-sur-l'Ain.
Trois enfants. Je n'en désirais pas plus. Mais dans ce temps-là, il n'y avait pas la pilule et le quatrième s'annonça en 1935. J'avoue que j'étais très contrariée. Mon cher mari me promit un manteau de fourrure si je ne… rouspétais plus !! Marché conclu ! Et le 5 septembre, à 3h du matin, après des heures de douleurs toujours les mêmes !! naissait une jolie petite fille. "Fille aînée pour aider. Fille dernière pour consoler". Ce qui fut très vrai, car notre Monique a été une seconde mère pour ses deux frères et pour cette soeur qu'elle désirait tant et pour l'arrivée de laquelle elle avait fait brûler un cierge à Onival avec sa grand'mère. Car mes parents une fois de plus avaient pris, dans leur villa, Madeleine les deux aînés, mais pas François, car trois, surtout ce dernier petit diable de trois ans, les auraient trop fatigués ! Il faut voir sur une photo, François, tout triste au bout de mon lit, pendant que Papa photographiait la nouvelle venue qui empêchait ses parents de s'occuper autant de lui ! La jalousie ! Et pour nous punir, il se remit à faire pipi au lit ! Pas longtemps, à cause des fessées ! Et Chantal fut la "Consuelita" de son Père.
Le manteau de fourrure fut du poulain...