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The Wire, un chef d’oeuvre ?

Publié le 29 mai 2012 par Lauramaz @LauraMaz

The Wire, un chef d’oeuvre ?Inconnue ou presque il y a quelques mois, The Wire (Sur Ecoute) est désormais considérée comme la meilleure série de tous les temps. Comme avant elle Twin Peaks, Six Feet Under ou encore The Sopranos cette série passée quasi inaperçue lors de sa diffusion en France est devenue le « must seen » de 2012. Elle fait dorénavant partie du cercle très fermé des séries incontournables que personne n’a vu mais dont il est de bon ton de parler en connaisseur et qu’on ne peut pas ne pas aimer.

Diffusée de 2002 à 2008 sur HBO et partiellement en 2004 sur Jimmy, The Wire fait partie de la génération des séries policières réalistes, proches du documentaire. Filmée caméra à l’épaule, elle dresse un portrait pessimiste de l’Amérique urbaine, à travers la vie des habitants de la ville de Baltimore, policiers, enseignants, travailleurs sociaux, délinquants. Créée par David Simon, déjà à l’origine de séries bien guillerettes comme Homicide : Life On The Street et The Corner, elle est fortement déconseillée si vous êtes amateur de « Hollywood endings » ou si vous êtes « un peu en bad en ce moment », car elle nous plonge au cœur de la criminalité et de la misère en suivant ces héros du quotidien qui tentent de survivre dans un monde gangréné par la drogue, les crimes et la pauvreté sans aucun espoir dans sortir.

La meilleure série de tous les temps. Tout commence en 2008 quand Barack Obama, alors candidat à la Maison-Blanche déclare que The Wire est sa série préférée. En pleine Obamania européenne,  il n’en fallait pas plus pour que Télérama & Cie tentent de relancer la carrière posthume de la série, qui vient de s’arrêter dans l’indifférence générale, en la présentant comme la « série qui peut sauver l’Amérique ». Il faut dire que The Wire a tout ce qu’il faut pour plaire aux hipsters : Labellisée HBO, elle est quasi inconnue et dépeint une Amérique aux bords de la crise de nerfs dans une ambiance dogma. Quatre ans de bouche à oreille plus tard dans les milieux autorisés, la série préférée du leader monde libre est devenu LA meilleure série de tous les temps et gare à ceux qui diront le contraire.

Chiche. Si au moment de sa diffusion, elle n’a rencontré le succès ni auprès des professionnels, seulement 2 nominations aux Emmy Awards en 60 épisodes, ni auprès du public, moins d’un million de téléspectateurs lors de la dernière saison, c’est tout simplement parce que The Wire, n’est pas si bien que ça. Aaaah ! Rangez vos pierres, je m’explique. L’œuvre de David Simon est certes bourrée de qualité, mais elle arrive 10 ans trop tard pour accéder au panthéon des séries. En regardant The Wire, on a un sentiment de déjà-vu. On a beau cherché l’innovation,  le « truc en plus » qui sont  l’apanage des séries HBO, on ne trouve rien de vraiment nouveau sous le Soleil. Les techniques de réalisation, l’ambiance, la violence et les histoires nous rappellent NYPD Blue, Oz ou The Corner (de David Simon !) Quant aux personnages, ils manquent d’envergure. En cherchant à faire de la criminalité, de la ville et de la misère les héroïnes principales de The Wire, ses auteurs n’ont pas pris le temps de construire des personnages à la hauteur d’un public devenu exigeant, préférant des héros stéréotypés rencontrés à maintes reprises. Bref, c’est une bonne série mais elle n’a rien d’incroyable et son insuccès populaire est compréhensible. The Wire n’est pas une série incomprise en son temps par des téléspectateurs incultes qui seraient passés à côté d’un chef d’œuvre mais au contraire, c’est parce qu’il s’y connaît que le grand public n’a pas jugé digne d’intérêt une série surévaluée par ceux qui méprisent la culture télévisuelle. Eriger au rang de référence absolue, une série réservée aux avertis, qui n’a pas su conquérir le grand public, c’est nier la vocation première de la télévision, plaire au plus grand nombre et oublier qu’une grande série est avant tout une série qui fait de l’audience car le public n’est pas dupe et sait reconnaître une pépite quand il en trouve une.

« The Wire, non j’ai pas aimé, je préfère Gossip Girl». Affirmer qu’une série est la meilleure de tous les temps est parfaitement aberrant, à chaque époque, à chaque genre, à chaque personne la sienne. A l’instar de Six Feet Under, The Sopranos ou Twin Peaks, The Wire fait désormais partie de ses séries que vous ne pouvez pas ne pas aimer, c’est impossible, interdit. C’est comme croiser les effluves, c’est mal. Avant, aimer les séries américaines c’était comme lire Voici ailleurs que chez le coiffeur, honteux. De Baretta à Beverly Hills elles se valaient toutes et elles étaient nulles. Et puis HBO est arrivé avec ses séries haut de gamme, ses castings prestigieux, ses scénarios hors-normes dignes du cinéma et surtout  son slogan « it’s not TV, it’s HBO » (« Ce n’est pas de la télé, c’est HBO »). C’est écrit dessus, les fictions HBO sont résolument différentes de ce qui se fait jusque là et vont changer les thèmes, les codes, les genres. Ce sont des séries sublimes mais si elles ont gagné leurs galons de séries cultes, c’est avant tout parce que se sont des OVNI télévisuels, des exercices de style, des séries qui n’en sont pas vraiment. Elles ne peuvent donc pas être érigées en modèles d’un genre dont elles sont les exceptions, si ? Il faut les avoir vues et évidemment les avoir aimées si on veut que son avis soit entendu. Ne pas les aimer est toléré si vous êtes capable d’une analyse de fond sur la mise en scène, la lumière ou la trame narrative mais difficile de s’en sortir avec un « ça m’a saoulé » (mon post aurait sans doute été plus court). Comparer les séries entre elles sans distinction de genre ou d’époque et en choisir une plutôt qu’une autre n’a aucun sens. Qu’est-ce que The Wire a de plus que Gossip Girl ? Ben, euh, c’est-à-dire, ça n’a rien à voir. L’une ne peut pas être meilleure que l’autre car elles n’appartiennent pas au même genre, elles n’ont pas les mêmes codes d’écriture, elles ne touchent pas les mêmes gens. Les œuvres de fictions sont plurielles, elles appartiennent à des genres et des époques différentes, elles ne sont pas universelles.

La meilleure série de tous les temps n’existe pas, la preuve : The Wire, ça m’a saoulé.



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