Simone Weil, sur le Parvis... -2- Le dogme

Publié le 08 novembre 2012 par Perceval

Le dogme est aussi l'une des composantes de ce « nous » de l'Eglise … qui se conserve en définissant un dehors, une zone d’exclusion, qui prend des noms - païens, infidèles, hérétiques, etc. - et des justifications multiples. Plus précisément, le pouvoir de juridiction de l’Église, qui est aussi un pouvoir de délimitation serré entre un dedans et un dehors, repose sur cette petite formule plutôt troublante que souligne Simone Weil :anathema sit. Cette formule qui départage le dedans du dehors en excluant ce qui ne se conforme pas au dogme prescrit... En plus d’être un mécanisme d’exclusion, la formule « anathema sit » se propage ailleurs dans l’histoire et devient le paradigme politique du totalitarisme. ( n'oublions pas les totalitarismes de cette époque …!)

 

Le Petit Robert dit du dogme : « Point de doctrine établi ou regardé comme une vérité fondamentale, incontestable (dans une religion, une école philosophique ». C'est un peu « léger », comme définition, en tout cas, trop peu « spirituelle » … ! Car enfin, pour être incontestable, il faudrait au dogme de transcender le « mystère » qui l'a fait naître... et c'est précisément dans ce « mystère » que vient s'enraciner la Foi …

« La foi et la raison sont comme deux ailes qui permettent à l'esprit humain de s'élever vers la contemplation de la vérité.» J.P.II ( Fides et Ratio)... ( « La marque de la raison : c'est le doute » Alain, cité par S.W. ) Aussi, n'est-il par irraisonnable de penser que l'humain ne puisse se voir imposer une « vérité fondamentale » à laquelle sa raison n'adhère pas …


Avec Simone Weil, la femme ou l'homme d'aujourd'hui, interroge l'Eglise sur sa manière de concevoir les dogmes.

André Naud témoigne ainsi: « J’ai enfin compris, grâce à Simone Weil, que les dogmes ne sont pas faits pour qu’on se voie obligé d’y adhérer, que la liberté de l’intelligence doit être totale et doit pouvoir s’exercer non seulement sur l’ensemble des dogmes mais sur chacun d’entre eux. J’ai appris à savourer tout ce qu’implique le fait que l’intelligence puisse être ce qu’elle est, même dans la foi. »

Le message évangélique est clair : C'est la vérité ( Jésus, le Verbe …) qui libère. Et cette vérité est de manière ultime, apportée par l'Esprit, dans le plus intime du cœur de l'humain. Si Jésus ne répond pas spécifiquement à touts les questions, l'Eglise, elle, ne peut affirmer donner toutes les réponses. L'Eglise nous propose un chemin d'initiation au « mystère » divin, et non pas une explication du « mystère » …

Aujourd'hui, je serais tenter de répondre à Simone Weil, ... qu'il ne s'agit plus de savoir s'il est possible de croire le Credo.... aujourd'hui, face à de nouvelles questions que se posent l'humanité ; nous ne pouvons plus répondre par de vieilles réponses, et même par le détour des vielles questions... par exemple, aujourd'hui, nous cherchons dans un contexte de pluralisme, et nous ne pouvons pas « croire » être les seuls à détenir la Vérité …

 

Simone Weil serait rassuré de lire Drewermann ( Dieu en toute liberté ) : « « Etre chrétien, c’est exister et non pas enseigner ex cathedra, être présent à l’instant et non pas s’évader dans un passé dont l’exploration n’a pas de fin; être saisi dans sa subjectivité par le sentiment de la déréliction de l’individu, et non chercher l’apaisement collectif dans une communauté où des vérités estampillées et des signes du salut sont fournis...." clés en main ...! 

Illustrations: tableaux de Gerrit van Honthorst, vers 1617