"Vivre avec des cons", malheureusement pas une fiction (Tonvoisin Depalier)

"Les cons sont partout et en plus ils sont déguisés en civil".

"un con ne se définit pas, on ne peut donner que des exemples"

Combien de scènes de la vie quotidienne pourraient être tellement appréciables si elles n'étaient pas parasitées par de fieffés cons ? A croire que vous êtes victimes d'une con-spiration mondiale. 

«... Les vrais cons se prennent désormais pour des sortes de piétons à roues et ont investi les crottoirs (les trottoirs des cons qui ont des chiens). Ils y pédalent alors joyeusement à fond en visant plus spécifiquement les vieux, les enfants et tout ce qui pourrait empêcher le triomphe de la conjuration : la sagesse et la naïveté."» 

Les cons écologistes persuadés que la cuisson d'un oeuf va perforer la couche d'ozone. Les cons en voiture qui attendent patiemment dans votre angle mort que vous déboitiez pour doubler, clignotant en marche, pour accélérer et vous froisser une aile. 

L'auteur a du génie. Car il faut une bonne dose d'astuces et d'abnégation pour dépeindre le monde avec une telle perspective, une telle dérision. Les actes de connerie sont légions. On n'y est sans cesse con-fronter. Si bien qu'on en vient à douter de notre "normalité". Cet écrit met donc les pendules à l'heure (quelle expression conne !) et instruit sur les techniques de résistance à la connerie. 

L'humour et le second degré tout d'abord. Indispensable pour ne pas sortir dans la rue libérer un irrépressible cri d'effroi et de désespoir face à cette débauche de stupidités qui nous oppresse, nous cerne. Deuxième outil incontournable dans la besace du chasseur de cons : l'écriture (et la lecture donc). L'exutoire par excellence et par essence. Coucher les méfaits de cons sur du papier et le bruler ensuite, voici le rituel à suivre à la lettre. 

Tonvoisin Depallier, qui oeuvre sous couverture afin d'éviter les représailles de cons qui auraient parcouru l'ouvrage ainsi intrigués par le titre sonnant comme une ode à leur existence, est un virtuose de la langue française. Il manie le verbe avec dextérité. Son style est à la fois accessible et recherché, incisif et léger. Surprenant. Du talent brut qui vous pousse à vous esclaffer ou à interjecter : "Oh! Ah!".

«Vivre avec des cons» est tout sauf vulgaire. C'est une satire de haut vol qui laisse entrevoir une lueur d'espoir pour l'humanité. Organisons-nous pour balayer le ridicule, l'humanité ne s'en portera que mieux. 

On les trouve partout (quand ce ne sont pas eux qui nous trouvent) : dans les cages d'ascenseur, la rue (les piétons, les cyclistes, les camions poubelle, les policiers, les commerçants, les taxis), les bars, la nature et votre domicile! 

Oui, chez vous !!!

Car, comme le stipule Tonvoisin, l'amour rendant aveugle un sourd et la jeunesse étant synonyme de connerie, on peut aisément se retrouver avec un con (ou une conne) vivace dans son lit.

Ce passage est d'ailleurs une pépite : «Mais revenons à notre préoccupation : conjoint. Tout linguiste à peu près honnette vous le dira, cela signifie sans ambiguité possible : le con qui vous est joint. On mesure le degré de connitude du con-joint de façon assez simple. Si vos horaires de travail s'allongent concomitamment avec vos années de mariage, c'est très (mais alors très) mauvais signe, la connerie du con-joint étant directement liée à la durée de vos heures à la mine. D'ailleurs, quand il ou elle est vraiment trop con ou conne, on finit parfois par ne plus rentrer du tout et par préférer dormir sur son lieu de travail ou chez une maitresse ou un maitre.»

Tonvoisin est un sniper armé d'un fusil à con-pression. Il les a observé dans les moindres détails . «L'organisation de la conjuration est impeccable» ...tous ceux et celles dont les audaces en matière de connerie sont proches de l'innovation de rupture. Tous les créatifs hors pair dont la vocation première est d'égayer chacune de vos journées par leurs facétieuses et inédites conneries en tout genre." 

Les physiciens apprécieront ce parallèle : "...une rencontre inopinée avec un con, c'est comme un trou noir dans le temps, sa densité connasse devient tellement importante que l'espace se déforme localement en une sorte de puits sans fond hors duquel meme une lueur d'intelligence ne peut plus s'échapper et...vous vous retrouvez hébété pendant quelques heures."      

Pour conclure :

Un grand merci pour cette bouffée d’air frais. Je propose la création d’un parti é-conlogique pour lutter contre la connerie sous toutes ses formes. Le leader est tout trouvé.    

L'info + :

J'ai adoré "Vivre avec des cons". C'est un essai magistral fort bien rédigé. On a plaisir à découvrir les références à la culture, aux sciences et à la psychologie. L'auteur est doté d'un esprit affuté et d'un sens critique constructif. Il manie l'humour avec une rare habilté. 

Les 114 pages se complètent par des citations qui vous accompagneront tout au long de votre combat, car c'en est un. 

Proférez-les comme des con-jurations : 

"Le seul véritable problème du con qui s'ignore, c'est que ce n'est pas un con qui t'ignore."

"le con ne pense à rien et compense ce vide avec par pas grand-chose."

"Une bande de cons... c'est juste un gros pansement sur l'intelligence."

Les mots guérissent des mot je vous dis. "Vivre avec des cons" sera remboursé un jour. Sauf si la con-grégation le fait disparaitre dans un autodafé vengeur. Heureusement que les ebooks existent. A con, con et demi !