Magazine Journal intime

Et la boucle est bouclée, merci petit bébé…

Publié le 23 novembre 2012 par Anaïs Valente

Ce matin, un message en trois lettres, ou plutôt trois chiffres : un numéro de chambre d'hôpital.

Youpie, voilà l'invitation que j'attendais.  Une invitation à aller expier mes péchés à la maternité, moi qui, honteusement, ai affiché sur mon blog, et par conséquent sur ma page Facebook, toutes mes dégustations sucrées de ces derniers mois, alors que la pauvre maman, atteinte de diabète gestationnel, avait l'interdiction formelle d'ingurgiter du sucre.

Expie petite Anaïs.  Le deal était dealé depuis belle lurette : dès la naissance, j'allais apporter de quoi compenser ces mois de privation.  J'attendais juste l'invitation pour m'acquitter avec joie de cette promesse et transformer la jolie photo du petiot découverte sur Facebook (qui a dit que Facebook coupe les liens sociaux ?  Facebook m'a permis de connaître la future maman, d'avoir moult discussions avec elle, de découvrir son bidou l'été dernier, de partager les francofolies avec la mère et l'enfant bien au chaud dans ledit bidou, de ne pas rédiger un billet sur l'événement, shame on me, donc on dit quoi ? on dit merci Facebook).

Direction l'hôpital.  Après un passage en boulangerie pour organiser la dégustation : petit gâteau tout choli fourré d'un trio de mousses au chocolat, double bavarois jaune rouge recouvert de cholis fruits, rien que pour la plus future maman.  Après un passage au rayon chtits jouets pour petiots à peine nés, où je découvre que je suis vraiment une fille de chez fille, attirée que je suis par une souricette fuchsia et un petit livre tactile tout de rose vêtu.  Mais pour le boy, je prends le livre tactile tout de bleu vêtu.  J'aime pô les jouets pour gaminous moi.  Et la souricette fuchsia, eske j'ai passé l'âge de l'avoir pour moua, Saint-Nicolas, dis-moi ?

Direction l'hôpital, disais-je.  Un hôpital où je n'ai jamais aimé me rendre, comme tous les hôpitaux, en grande hypocondriaque que je suis.  Un hôpital où je déteste vraiment me rendre depuis un certain premier avril.  Mais bon, ici c'est pour un événement joyeux youplaboum.  N'empêche, le hall de l'hôpital, l'odeur de l'hôpital, les WC de l'hôpital, le couloir vitré de l'hôpital pour aller à la "route 171" (après m'être perdue en chemin, because leur système de routes, c'est caca boudin, et les médèmes de l'accueil, ben sont pas fort accueillantes, faut le dire), ben j'aime pô.  Ça me bouffe l'estomac, ça m'angoisse le neurone, ça me tripatouille les tripes, rien à faire.

J'arrive un quart d'heure avant les visites, même si j'ai traîné tant que j'ai pu dans les magasins.  Alors je m'assieds sur le sol, dans le couloir, et j'attends mon heure en avançant dans la lecture de mon thriller du moment, Le Cercle, de Bernard Minier (je vous le conseille, vachement thrillant).  Et j'entends le petiot qui pleure, qui vagit, qui hurle.  Argh, mon dieu, mais qu'il est bruyant, qu'on arrête de le frapper, non mais.

Quand l'heure de la visite se présente à moi, le petiot a cessé de pleurer, rien que pour m'accueillir je le sens je le sais.  Alors j'entre, et je transforme le bébé de la photo en petite chose meugnonne tout plein.  C'est qu'il est beau.  Et je le dis.  Because, non, tous les bébés sont pas beaux.  Récit du plus méga fou-rire du monde au bureau en zieutant les bébés de l'année dans Vers l'Avenir, passque, même si un bébé est toujours le plus beau pour ses parents, tous les bébés ne sont pas beaux, que du contraire, y'en a qui font peur, y'en a qui font rire, avec toute la tendresse qui s'impose pour ces boutchous, cela va de soi.  Mais celui-là, il est beau comme un cœur de beurre, et je ne cesse de le répéter tant il est vraiment, mais vraiment, beau comme un cœur de beurre. 

Je fonds, limite si j'ai pas envie de faire un bébé, là, de suite (un amateur ?).  Puis la maman me raconte les détails gore de son accouchement (que le souci de confidentialité m'oblige bien sûr à vous taire, mais cherchez sur le net des extraits de Mother fucker de Florence Foresti, vous devriez comprendre un peu mieux, sinon, pensez juste à douleur, longueur, aiguille, contractions, dilatation du col, ventouse, césarienne, hurlements, supplications – biffez certaines mentions inutiles… quoique), je décide plutôt de rester sur mon idée d'adopter un bébé sphynx un de ces jours, c'est plus sûr.

Ce que je peux vous dire, sans être accusée de révélations indécentes, c'est que j'ai bien fait rire la maman, tout en la faisant bien souffrir par la même occasion (passque oui, une jeune maman ne peut rire sans souffrir, suivez mon regard) et que je m'en excuse, mais bon, faut rire dix minutes par jour, alors hein… bref je l'ai fait rire avec mes délires (quand je vous disais que j'étais dans un état de folie permanent) sur les bébés moches à oreilles décollées, puis quand nous avons constaté que les oreilles du petiot ne l'étaient pas, décollées, même qu'elles étaient plutôt hypercollées, limite soudées quoi.  Et de zieuter ses oreilles durant un long moment, puis de les inspecter du bout du doigt. Question médicale : une oreille de bébé de quarante-huit heures peut-elle être déviée de sa trajectoire par une main maladroite, comme le serait une oreille de chiot ?  On n'a pas testé, passque bon, pour la jeune maman, devoir expliquer à son rejeton durant vingt ans "oui mon gaminou, ton oreille gauche, si elle louche vers le ciel, c'est parce que quand tu étais tout bébé, on la trouvait un peu trop collée, et on y a chipoté, mais promis, Anaïs s'est engagée à t'offrir une chirurgie esthétique, bientôt bientôt, sois patient", c'était pas une super perspective.

Voilà, j'ai pas parlé des franco, c'est clair, j'ai pas parlé de la pluie qui nous a laissées tranquilles durant tous les concerts, ô miracle, j'ai pas parlé de nos places de choix obtenues grâce à ton gros bidou (toujours emporter une femme enceinte aux franco, c'est bien pratique), j'ai pas parlé de Thomas Dutronc qui avait trop fumé de cigarettes de tubercules roulées dans une corde pour se pendre et qui aurait rendu dépressif même le clown Totor, j'ai pas parlé de Docteur House qui faisait "blueser" le petiot dans ton bidou, j'ai pas parlé de Nolwenn Leroy qui m'a donné envie de danser, non, je n'en ai pas parlé, mais j'ai parlé de ton petit boutchou, j'ai parlé de la joie qu'il m'a mise au cœur, j'ai parlé du plaisir de prendre un si petit dans mes bras maladroits, j'ai parlé de ce moment d'intimité que j'ai pu partager, j'ai parlé de cette surprise que j'ai toujours dans le regard quand je savoure ce miracle de la vie qui fait qu'il y a deux jours encore il était dans son petit nid ventru et que maintenant, il exhibe ses grands pieds sur notre planète, j'ai parlé de ce si joli bébé, vraiment joli tout plein (même si on sait pas si dans six mois ou dans dix ans, il sera toujours aussi joli, mouahahahaha – rire démoniaque).

Et puis, égoïstement, j'ai eu ce sentiment tout personnel que la boucle était bouclée.  Que ce miracle incroyable de la vie était enfin parvenu à me réconcilier avec cet endroit où j'ai côtoyé la mort, la tristesse, l'incompréhension, la colère et l'angoisse indicible. 

La boucle est bouclée, je vous disais.

Et pour lui, la vie ne fait commencer !

Welcome !

(Images d'illustration, car non, les gaminous ne naissent pas dans les choux et les gaminettes dans les roses, c'est bien plus amusant que cela…)

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