Vous avez eu froid ? Les températures ont baissé et il faut mieux s’habiller pour sortir dehors … On se plaint du vent, du froid, de la neige, mais au moins notre corps réagit bien .. alors que certains sont malheureusement allergique au froid ..c’est rare mais il y en a quelques personnes et étrangement il y en a plus dans les pays ou il fait froid comme nos hivers au Québec … mais il y a pire comme celle qui ne distingue ni le froid, ni le chaud .. certains dirons qu’elle est chanceuse mais pourtant, il faut éviter les complications
Nuage
Le froid qui pique
Dans notre pays d’hiver, l’allergie au froid est étonnamment méconnue, mais bel et bien réelle.
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SOPHIE ALLARD
La Presse
Environ le quart des Québécois ont une allergie non alimentaire. On ne s’étonne pas d’une allergie au pollen, à l’herbe à poux ou au chat. Plus rare, l’allergie au froid donne néanmoins du fil à retordre à quelques milliers de Québécois. En plus de souffrir de symptômes parfois sévères, ils doivent composer avec les commentaires des pairs plutôt sceptiques. Dans notre pays d’hiver, l’allergie au froid est étonnamment méconnue, mais bel et bien réelle.
Lorsqu’elle avait 5 ans, Florence Phaneuf a vécu un hiver particulier, tout à fait désagréable. Dès qu’elle était exposée au froid, elle avait une poussée d’urticaire. Des plaques rouges, qui démangeaient, apparaissaient instantanément aux endroits exposés. Surtout aux mains et aux pieds.
«Si elle jouait trop longtemps dehors, l’urticaire revenait. Nous étions toujours aux aguets. Au moindre signe, on lui disait de rentrer. Ça a duré comme ça au moins un hiver, puis les symptômes ont disparu comme ils sont arrivés», raconte sa mère, Julie.
Même l’air frais pouvait provoquer une crise d’urticaire, qui se résorbait habituellement en quelques heures ou quelques jours.
«Son enseignante était au courant. Quand Florence était en classe et sentait ses mains froides, l’enseignante l’envoyait les réchauffer avec de l’eau tiède au lavabo.»
Une simple séance de jeu dans une pièce peu chauffée suffisait à provoquer une crise d’urticaire. Un antihistaminique arrivait à atténuer les symptômes, sans les éliminer complètement.
L’urticaire au froid, aussi appelé allergie au froid, est une condition plutôt rare. Environ 5 personnes sur 10 000 en souffrent, surtout dans les pays froids.
«C’est une allergie en ce sens que les mécanismes qui sont impliqués pour expliquer les lésions sont comparables à ceux qui sont appliqués dans la réaction allergique à proprement parler, explique le docteur Guy Delespesse, chef du service allergie et immunologie du CHUM. Il y a activation de certaines cellules, les basophiles et les mastocytes. Ce sont ces mêmes cellules qui sont activées dans le cadre d’une réponse allergique au pollen ou au chat par exemple. Certains hésitent néanmoins à parler d’allergie parce que le froid n’est pas un allergène.
«Les mécanismes sont très similaires, voire identiques, sauf qu’il n’y a pas d’allergie officiellement.»
L’allergologue voit deux ou trois cas par an à la clinique du CHUM.
«Le diagnostic formel consiste à déposer sur la peau du patient un glaçon dans un sac plastique pendant quelques minutes. Il faut faire attention de ne pas brûler le patient. Typiquement, il apparaît une réaction allergique, soit une grosse plaque rouge avec le centre blanc, qui est prurigineuse, qui ressemble à une piqûre de moustique. Ça confirme alors la réaction allergique.»
Les personnes déjà allergiques à autre chose sont plus susceptibles d’avoir une allergie au froid.
«Elle peut se manifester subitement à tout âge et disparaître en quelques années», dit le Dr Delespesse.
Une allergie potentiellement mortelle
Principal symptôme de l’allergie au froid, l’urticaire peut durer de 10 minutes à quelques heures et apparaît principalement aux endroits exposés au froid.
«Lorsque la réaction est plus sévère, une crise d’asthme peut accompagner l’urticaire.»
Dans les formes graves – et extrêmement rares -, l’allergie peut être mortelle. Si quelqu’un plonge dans un lac glacé en plein été, le changement de température peut créer un choc. D’autres qui boiront une boisson froide pourront avoir un gonflement, un oedème de la bouche et de la gorge, qui peut causer un inconfort et peut menacer la respiration.»
Bryan Marshall, 38 ans, souffre d’une sévère allergie au froid. Il a toujours sur lui son adrénaline auto-injectable (Epipen).
«Dans ma jeunesse, je faisais de l’urticaire, mais on ne savait pas ce qui le déclenchait. À 18 ans, je suivais un cours de planche à voile et j’ai sauté sans hésiter dans le lac Memphrémagog. C’était froid. Après 10 minutes, ça a commencé à tourner. Je n’entendais plus bien l’instructeur et, soudainement, je ne le voyais plus. Je me suis réveillé sur la plage, entouré de gens, au son de l’ambulance.»
Dès qu’il prévoit aller dehors par temps froid, Bryan prend des antihistaminiques.
«Si j’attends trop longtemps l’autobus, je sens mes jambes enfler dans mon pantalon. Un simple vent de soirée l’été et l’air climatisé peuvent me donner de l’urticaire. Si je mange un Popsicle, mes lèvres deviennent gonflées, comme injectées de collagène.»
Il en rit, mais il est bien conscient des risques liés à sa condition. Il a appris à vivre avec elle.
«Je peux me baigner, à condition que je m’immerge très progressivement», dit-il.
Il pratique le ski alpin, jamais sans avoir d’abord pris des antihistaminiques et toujours bien couvert de la tête aux pieds.
«Je peux prévenir les réactions, mais j’ai tout de même des démangeaisons désagréables. Je n’y échappe pas.»
Plus désagréable encore, il doit constamment expliquer son état aux gens sceptiques.
«Quand je dis que je suis allergique au froid, les gens ne me croient pas, ils blaguent. S’ils savaient…»
Il porte un bracelet médical, sur lequel est inscrite sa condition.
Les chercheurs ne savent comment expliquer l’allergie au froid.
«Est-ce qu’un virus peut déclencher une poussée d’urticaire? Oui, c’est admis. Ce n’est pas démontré, mais les observations cliniques vont dans ce sens», dit le Dr Delespesse.
Il existe aussi une forme héréditaire qu’on se transmet de parents à enfants, plus rare celle-là. Au-delà de ces hypothèses, les chercheurs restent dans le flou.
Avoir ni chaud ni froid
Martine, 18 ans, ne ressent pas le froid ni la chaleur, à moins d’un changement soudain de température. Qu’elle se trouve dans un sauna suffocant ou qu’elle se promène dehors l’hiver sans manteau, ça ne lui fait ni chaud ni froid. Littéralement. Son cas est plutôt inhabituel, intrigant.
L’hiver, la jeune femme doit être particulièrement vigilante. Lorsqu’elle est exposée au froid, elle se sait à risque d’engelures, voire d’hypothermie.
«S’il fait froid, je ne le sens pas, à moins de conditions extrêmes. Je dois absolument me fier au thermomètre et regarder autour de moi comment les gens s’habillent, sinon je n’ai aucune idée de la température. Je ne veux pas m’exposer à des risques inutiles, alors quand je vois mes doigts changer de couleur, je sais que je dois les couvrir ou rentrer à l’intérieur me réchauffer», confie-t-elle.
Martine perçoit momentanément les écarts importants de température, mais son corps semble s’habituer tellement vite qu’il oublie rapidement la température ambiante.
«Si je touche un objet très froid, je vais le sentir au départ. Puis, la sensation disparaît et je ne peux plus dire si cet objet est chaud, tiède ou froid.»
Même la fraîcheur d’un cornet de crème glacée, sur les lèvres, lui échappe en partie.
«Je peux dire que la crème glacée est froide, surtout une fois ingérée, mais la sensation est beaucoup moins marquée l’hiver que par grande chaleur l’été.» C’est comme ça depuis quatre ans. «Avant, j’étais plutôt frileuse.»
«Il est possible pour une personne d’être moins sensible au froid, moins vulnérable, par comparaison à autrui, note Michel Cabanac de Lafregeyre, professeur de physiologie à la faculté de médecine de l’Université Laval. Sa thermorégulation est peut-être meilleure, son corps s’adapte mieux aux variations de température. Il existe un syndrome congénital rare – l’indifférence congénitale à la douleur – où cette indifférence s’accompagne d’une absence d’inconfort thermique. Mais en principe, il s’agit d’un syndrome masculin.»
La condition de Martine pourrait relever d’une dysfonction de ses thermorécepteurs qui seraient anormalement sous-activés. Mystère.
Ressentez-vous ce froid?
On perçoit le froid grâce à des thermorécepteurs situés sur les terminaisons nerveuses libres. Ceux-ci peuvent percevoir des écarts de température de la peau d’à peine 0,01 ºC! La plupart des thermorécepteurs se trouvent d’ailleurs dans la peau, ceux qui détectent le froid sont plus denses et plus nombreux à la surface de la peau. Pourquoi? Parce que l’organisme se refroidit essentiellement par la peau, par l’extérieur, alors qu’il peut se réchauffer de l’intérieur, par exemple en bougeant.
La perception consciente du froid et du chaud (la thermosensation) dépend de plusieurs facteurs, dont la température cutanée initiale, l’importance et la vitesse du changement de température et la surface du corps exposée.
«Plus la surface de la peau exposée est grande, plus notre sensation sera grande. Plus le froid est intense et plus la baisse de température est rapide, plus on aura une réponse accentuée, Marie-Andrée Imbeault, doctorante en sciences de l’activité physique à l’Université d’Ottawa. La thermosensation contribue à la thermorégulation corporelle, soit le maintien de la température interne, par l’intermédiaire des comportements qu’elle entraîne tels que s’habiller, chercher refuge, s’activer… L’une ne va pas sans l’autre.»
La perception de la température, comme celle de la douleur, est individuelle et dépend de facteurs personnels: l’âge, le poids, la génétique, la médication et certaines conditions de santé, telles la fibromyalgie ou l’hypothyroïdie. Le moment de la journée influence notre perception: puisque la température du corps est plus élevée en fin de journée, on va davantage frissonner. Chez la femme, le cycle menstruel modifie également la perception de froid, qui est ressenti davantage en période postovulatoire. Même les saisons peuvent influencer notre réponse. Le corps s’acclimate à la température ambiante, il s’habitue. Par exemple, on tolère sans inconfort ou douleur des baisses de température plus importantes à la fin de l’hiver qu’à l’automne.