Je descends l’étroit sentier
qui mène à la rivière
des pierres roulent sous mes pieds
comme autant de cris
des libertés qui s’effondrent
comme autant de cris
de femmes
méprisés
violées
sexuellement torturées
psychiquement assassinées.
Les arbres
sur le chemin
me chantent
leur chanson d’arbres
celle de la vie
celle de l'amour.
Au Congo, des soldats
des barbares
on fait du viol
une arme de guerre
institutionnelle.
Une pierre roule dans la rivière
c’est une petite fille
elle a 3 ans
elle se noie
intimement déchirée
par un viol collectif
Une autre pierre la suit
c’est une femme
un objet sexuel
de cette armée
aux appétits féroces
une femme déboussolée
à qui l’on vient
de faire manger
un plat étrange
qu’elle ne connaissait pas :
ses propres enfants !
D’autre pierres
roulent, roulent, roulent
comme les rats de Hameln
suivant le son de la flûte
elles se jettent dans les eaux
tumultueuses
de la rivière ensanglantée.
Dans le soir
un cri les suit
qui vient se noyer à son tour
dans le silence
de la nuit
dans l'épaisseur
de l’indifférence
le cri du pasteur
Denis Mukwege
gynécologue
il constate et répare
des milliers de ces vagins dynamités
lacérés au rasoir
brûlés
torturés.
Denis Mukwege s’étonne
il est lourd le silence
de la communauté internationale
qui sait pourtant
qui sait
qui sait !
mais qui se tait.
Lui vient d’échapper
à un assassinat
Lui
que la communauté internationale
félicite
pour son action humanitaire
Elle offre des décorations
de beaux discours...
Mais elle est homme
essentiellement homme
pétrie de l’idée
que la femme est faite pour souffrir
que c’est dans sa nature
« tu accoucheras dans la douleur ! »
abjection des religions
qui ont fait d’un sexe le jouet de l’autre
en prêtant à un dieu des paroles d'hommes.
En Libye, sous le règne du despote
la communauté internationale savait
elle connaissait le sort des femmes
et pourtant, elle s’est tue.
Le tyran a planté sa tente
dans les jardins de l'Elysée.
Aujourd’hui au Congo
le viol de milliers de femmes
est moins grave
que la mort
d’un seul homme.
Se taire
telle est la règle
lorsqu’il s’agit des femmes !
Ne pas faire de vagues
fermer pudiquement les yeux
en attendant d’être acculé
à reconnaître
ce crime
contre l’humanité.
Réveillez -vous femmes
de tous les pays
de toutes couleurs
relevez la tête
faites entendre vos voix
soyez convaincues
que la femme est un Être
un Être à part entière
un Être porteur de vie
un Être porteur d'amour
et sachez-le
on ne détruit jamais si bien
que ce que l’on envie.
N’acceptez plus jamais
qu’un homme
puisse vous laisser supposer le contraire.
Sachez,
le défi est immense,
que c’est par les femmes
que le monde se reconstruira
dans le respect mutuel
et de la nature.
Aucun animal
jamais
n’eut une telle attitude
envers sa femelle.
Qui est la bête ?
Comment réagirez-vous
femmes d'Europe ?
Le Congo
c’est loin
c’est un pays en guerre
dans un pays en guerre
on le sait
il ne fait jamais bon être femme
hélas la guerre
a une particularité
quand elle est finie :
celle d’être toujours
la dernière
jusqu’à la prochaine…
La guerre
le crime
ce couple infernal
fait du monde
un lieu de barbarie
La guerre
le crime
le profit
feront de la Terre
un lieu stérile
car n’en doutez pas
la Terre aussi
est une femme
qu’on assassine.
Sur l’étroit sentier
qui mène à la rivière
mon pied glisse
la terre s’effondre
je tombe
je ferme les yeux
les eaux rouges
de la rivière
me chantent leur chanson d’eau
celle de la vie
celle de l'amour.
©Adamante
Ici une œuvre qui aurait pu illustrer ce texte
J'ai écrit ce texte après avoir lu l'article du monde du 28 nov 2012 d'Annick Cojeau, parce que je pense que nous n'avons pas le droit de ne rien dire, parce que je pense, moi qui ne suit rien, que je n'ai pas le droit de ne rien dire. AD