Salut à toi, petite merde, qui passais dans mon dos, hier après-midi, au Salon du livre jeunesse de Montreuil.
C’était bien, ce Salon, hein ? Des livres partout, de la création, des couleurs, on aurait envie d’en acheter sur chaque stand. Sauf que ça coûte cher, forcément – c’est souvent ce qui se passe quand c’est beau.
C’est peut-être pour ça que tu m’as piqué le sac dans lequel j’avais mis les miens, de livres. Tu sais, le grand sac rouge, au pied du stand du Diable Vauvert.
Je dis ça, mais en fait je n’en sais rien. Peut-être que tu l’as pris par réflexe, parce qu’un sac que son propriétaire lâche des yeux, c’est fait pour être chourave. Ou alors c’était un pari, avec tes copains de classe. Ou alors tu es un peu plus pro que ça, tu pensais avoir un plan pour revendre et te faire un peu de thunes.
Ça, je t’avoue, ça me ferait mal. Mais bon, maintenant que j’ai digéré un peu, j’ai envie de croire que c’était pour toi. Alors, imaginons.
Dans le sac, tu trouveras Le livre qui fait aimer les livres même à ceux qui n’aiment pas lire ! Avoue que c’est ironique. Je n’avais pas l’intention de te l’offrir à toi, mais bon, qui sait, peut-être que ça t’ouvrira quelques perspectives. Et si jamais, tu n’auras qu’à t’inscrire à la bibliothèque – tu verras, c’est un endroit assez magique, où tu pourras lire gratuitement sans me donner envie de te fracasser la tête sur la rambarde de l’escalier.
Mais je m’emporte, là. Il ne faut pas.
Dans le sac, tu trouveras aussi C’est de l’eau, de David Foster Wallace. Je crains que ça ne te passe au-dessus, malheureusement. D’abord ce n’est pas vraiment de la littérature pour enfants (à supposer que tu en sois un) ; et puis surtout, c’est un livre qui exalte la bienveillance, l’amour de l’autre. Tu vois, rien que de penser à ce livre (tu as de la chance, le Diable est généreux et m’en a redonné un exemplaire), je me radoucis. Bref, je ne suis pas sûr que tu puisses comprendre, mais peut-être un jour, qui sait… On a le droit de croire aux miracles.
Mais j’imagine que tu auras d’abord regardé le plus grand des livres du sac. La saison des flèches, qu’il s’appelait. Je le sais parce que j’étais venu avec la grande Vlou, grande par le talent et la générosité, qui a tenu à me l’offrir à nouveau pour me consoler. Ce livre, tu vois, à la base je l’avais acheté pour mes neveux et nièces parce qu’il était beau, et drôle à la fois. L’histoire d’une famille qui achète sur Internet un Indien en canette. Une histoire gentiment absurde avec des dessins magnifiques.
Qui sait, si tu l’ouvres, il t’ouvrira peut-être un peu les yeux, je suis persuadé que la beauté rend moins con.
Si jamais ça t’arrive, écris-moi ici, ça me fera plaisir.
En attendant, sache que (non sans dec t’as cliqué ?^ allez, salut)