Alors que chaque jour, sinon chaque heure apporte son lot de rebondissements - au point de se demander si la théâtralisation hystérique ne nourrit pas l’existence psychique des protagonistes et signe la vacuité des enjeux -, il appert que Nicolas Sarkozy ne sera pas en mesure de résorber la division au sein de l’UMP. Et ce, pour plusieurs raisons.
En premier lieu, parce que l’ancien président de la République a en été le plus puissant ferment. La fracture de l’Union pour un Mouvement Populaire n’est que l’aboutissement logique de la trajectoire idéologique, sinon tactique de l’ancien chef de l’État, tant celle-ci a davantage consisté dans une compulsion de coups politiques que dans le traçage d’une ligne présidentielle cohérente: commencé au centre avec le débauchage de ministres de gauche, le précédent quinquennat s’est achevé avec une droitisation outrancière. Une droitisation en forme d’exclusion pour les plus récalcitrants et d’enkystement autour des plus radicaux de l’option conservatrice. Une option justement consacrée par la présidence "proclamée" de Jean-François Copé.
Pour réussir, la démarche de Nicolas Sarkozy suppose ensuite une capacité de l’intéressé d’incarner toutes les vertus dont un recours doit se parer: il en est loin. Déjà incompatible avec son statut de membre de plein droit du Conseil Constitutionnel, une intervention directe et publique de Nicolas Sarkozy dans les affaires de l’UMP renierait en outre son annonce d’un abandon de la politique après son échec aux présidentielles. Sans parler d’un antagonisme éthique avec son choix assumé d’entamer une carrière de conférencier international grassement rémunérée.
Nicolas Sarkozy pourra par ailleurs difficilement obtenir un armistice pérenne entre les belligérants parce que la crise dépasse de loin la seule structure parisienne du mouvement: elle implique désormais les ambitions de responsables politiques locaux que la centralisation et l’accaparement systématiques du pouvoir par l’ancien locataire de l’Élysée avaient reléguées et qui se trouvent ainsi libérées sinon favorisées par l’éclatement du parti. Les règlements de compte à venir dans les Alpes-Maritimes en sont le paradigme: le déplacement du centre de gravité décisionnaire de l'UMP de Nice vers Le Cannet en raison de la nouvelle direction "copéiste" a conduit des personnalités régionales à choisir - ou à négocier chèrement leur ralliement ce qui revient au même - leur camp en fonction de l’espace politique disponible. Pour le dire autrement, il y a entre le Maire de Nice Christian Estrosi et l’ancien premier Ministre François Fillon autant de proximité de pensées qu’entre l’ours polaire et la baleine du sud.
Enfin, la réconciliation semble d’autant moins probable que la perspective des élections municipales de 2014 attisera de sourdes rivalités. En témoigne, à l’exemple de Villefranche-sur-Mer pour demeurer confiné dans le narcissisme des infimes différences, la future et délicate désignation des investitures locales: elle devrait répliquer jusque dans les moindres recoins de la France des clochers la secousse tellurique ressentie dans les instances nationales.
Entre l’UMP et le R-UMP, le divorce est bel et bien consommé, et comme dans tout divorce, la question se pose de la garde des enfants. Ces derniers risquent d’être confiés aux ascendants latéraux: la séparation profite pour le moment au Front national et à la nouvelle UDI de Jean-Louis Borloo. Mais la recomposition actuelle de la droite sous-tendue par cet "apocalypse" n’évitera pas à terme - et sûrement avant 2017 - le respect d’une règle intangible du paysage politique français et que ni Jean-François Copé, ni François Fillon ne peuvent ignorer: sous la Cinquième République, le centrisme n’existe pas.