A la fin du mois de février, Josué Ndjaga comparaissait devant un conseil de discipline. Cet élève de troisième SEGPA y fut décrit par tous les enseignants présents comme dangereux, pour ses camarades, ses professeurs et sans doute aussi pour lui-même.
Notre collège a noué depuis le début de l'année un partenariat avec une association de Staincy, Des droits pour tous les Staincinois (DPTS). Nous avions fait le constat que le comportement inadmissible de certains élèves est dû à des problèmes extra-scolaires sur lesquels nous n'avons que peu de prise. DPTS devait nous aider à les gérer en les suivant et en les soutenant dans l'intervalle des cours. Le partenariat n'a pas donné, pour l'instant, tous les résultats attendus. Protectrice et inlassablement bienveillante, l'association est désormais perçue par les élèves les plus durs comme un recours contre notre injustice. Et le fait est qu'elle se prête parfois à cette confusion.
Quelques jours avant sa comparution, Josué, bien conseillé, se rendit dans les locaux de l'association. Là, il promit avec l'apparence d'une sincérité parfaite que jamais plus il n'agirait comme il avait agi ; il prit les meilleures résolutions du monde. En une heure, il sut convaincre DPTS de sa rédemption. Les associatifs ne l'avaient jamais vu avant, ne s'étaient pas renseignés auprès de nous. Leur entretien avec le jeune homme avait duré une heure.
Il lui fournirent une sorte d'avocat qui, devant le conseil de discipline, plaida bien et sut atténuer la forte impression qu'avait produite le témoignage de professeurs encore outrés par le souvenir des cours empêchés par cet emmerdeur. Au moment du vote, il y eut égalité. La décision revint au principal. C'était lui qui avait initié le partenariat avec l'association. Il vota pour une exclusion "avec sursis", c'est à dire que c'était bon pour cette fois, mais qu'à la prochaine incartade, attention, hein !
Un autre établissement avait pourtant accepté (non sans un certain courage) d'accueillir le lascar, et la famille, après avoir présenté ses excuses, avait fait savoir qu'elle se plierait au verdict du conseil. On était donc surpris. Les professeurs étaient quant à eux légèrement contrariés à la perspective de retrouver le garçon le lendemain matin à sept heures cinquante-cinq. Josué ressortit de là le sourire aux lèvres et le lendemain, avant les cours, il fit savoir à ses camarades (tous des angelots) qu'ici, "on ne vire pas".
Une des enseignantes qui a eu le privilège d'enseigner à Josué m'a dit qu'elle avait convoqué son père, une fois, le soir. Et ce monsieur avait alors dit à son fils : "Si tu continues tes conneries, je te renvoie au pays et je te mets un fusil entre les mains !" Gestion très habile du problème. Je ne sais pas d'où vient la famille Ndjaga, Sierra Leone, Tchad, République du Congo ; toujours est-il qu'il semble y avoir de l'emploi, là-bas, pour les grands couillons violents.