Depuis juin, les affrontements entre la minorité musulmane des Rohingyas et des bouddhistes ont fait au moins 180 morts.
Une des minorités les plus persécutées au monde
Les Rohingyas sont considérés par l'ONU comme l’une des minorités les plus persécutées de la planète. Quelque 800 000 d’entre eux vivent confinés dans le nord de l’Etat d'Arakan. Ils ne font pas partie des groupes ethniques reconnus par le régime de Naypyidaw, ni par beaucoup de Birmans qui les considèrent le plus souvent comme des immigrés bangladais illégaux. Ainsi depuis 30 ans, ils sont apatrides dans leur propre pays où ils font l'objet de préjugés considérables au sein de la société birmane, y compris de la part de personnes ayant toujours lutté pour la démocratie, et de minorités ethniques elles-mêmes longtemps opprimées par l’Etat birman. En Birmanie, nul ne cache son hostilité à l’égard de ces « kalar », les illégaux à la peau noire.
Leur « faute » ? Celle d’avoir soutenu les Britanniques dans leur conquête de la Birmanie au XIXe siècle. Depuis, ils sont donc considérés comme des traîtres. Tyrannisés, violentés, discriminés, torturés par leurs concitoyens, des centaines de milliers d’entre eux ont fui au Bangladesh.
Amnesty International, Action contre la Faim, Médecins sans frontière, tous ont tenté d’alerter les pouvoirs internationaux. Le blogueur birman NayPhone Latt, qui avait combattu la junte militaire birmane avec succès, s’est vu fortement reproché sa dénonciation du massacre. Même la chef de l'opposition Aung San Suu Kyi n'a pas véritablement pris la défense de ceux que l'ONU considère comme l'une des minorités les plus persécutées de la planète
Qualifiée par l’ONU de Palestine d’Asie, la communauté Rohingyas a besoin d’un soutien pour tenter de contrer la purification ethnique dont elle fait l’objet. Subissant viols, agressions et meurtres, la population tente, en vain, de partir de Birmanie. Selon, Amnesty International c’est entre 50 000 et 90 000 individus qui tentent de se refugier au Pakistan, pays limitrophe, alors que celui ci vient de déclarer qu’il fermait ses frontières, ne pouvant plus accueillir cette population migrante.
Extrait, Interview: Grande spécialiste française de la Birmanie, la journaliste Sophie Ansel a co-écrit un livre avec Habiburahman, membre de l'ethnie des Rohingyas, actuellement réfugié en Australie.
Des dizaines de milliers de rohingyas persécutés ont été déplacés vers des camps de réfugiés entre juin et octobre 2012 © Paula Bronstein / Getty Images / AFP
Apôtres de la non violence, les bouddhistes se renieraient-ils en Birmanie ? Des moines et pratiquants du monde entier le pensent et appellent en conséquence à la fin des agressions visant les musulmans rohingyas. Dix sept personnalités ont ainsi rappelé à l’ordre leurs « frères et sœurs bouddhistes » de Birmanie, comme Le moine vietnamien Thich Nhat Hanh ou le réformateur thaïlandais Phra Phaisan Visalo. Selon l’Agence de presse Églises d’Asie, les signataires ont reçu le soutien du dalaï-lama, le leader tibétain ayant exprimé publiquement sa préoccupation à de nombreuses reprises.
- Le Bouddhisme n'est-il pas une religion qui se dit " non-violente " ?
" Le bouddhisme est effectivement une religion qui prêche la non violence, la tolérance et l’amour. En revanche, l'habit ne fait pas le moine. Ce n'est pas parce que l'on nait bouddhiste que l'on est destiné à la non violence. Le bouddhisme en Birmanie est aussi -de fait- une religion d'Etat depuis des décennies. La construction des milliers de pagodes en Birmanie a eu son lot de travaux forcés. Tout ceux qui pratiquent le bouddhisme n'applique pas la philosophie bouddhiste. Les dictateurs du pays en sont l'un des exemples les plus évidents. Ce sont eux qui ont fait construire la plupart des grandes pagodes. Ils ont aussi tous plus ou moins fait un passage au temple où ils ont été eux même moines quelques temps. En parallèle de moines tolérants, comme pour d’autres religions dans d’autres pays, le fondamentalisme bouddhiste est une réalité en Birmanie, même si l'idée va à contre courant de notre idée en occident. Associé à l'ignorance et la propagande dans lesquels la junte a plongé le pays pendant des décennies, la religion devient aussi une arme pour tenir le peuple et tenir à l'écart les minorités religieuses."
«Elle refuse, lit-on sur le journal La Croix, de s'engager de peur de prendre parti, dit-elle.
Mi-novembre, elle a évoqué des «passages illégaux» à la frontière du Bangladesh. Une expression immédiatement considérée par U Kyaw Min comme favorable aux
Arakanais, qui se plaignent de la pression migratoire musulmane. «Elle veut faire plaisir aux électeurs arakanais, juge amèrement cet ancien prisonnier politique rohingya. Pour le moment,
elle ne s'intéresse pas aux droits de l'homme, mais au fauteuil de la présidence de la Birmanie.» Tout est dit. Il ne faut pas compromettre les chances d'être présidente.
http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/Monde/Birmanie-l-impossible-reconciliation-entre-bouddhistes-et-musulmans-_EG_-2012-12-05-884058
- Quelle est la réaction de Aung San Suu Kyi ?
"Lorsque les violences ont éclaté, Aung San Suu Kyi s'est faite remarquer d'abord par son silence, puis par sa ténacité à marteler la nécessité de la construction d'un état de droit. Elle n'a jamais évoqué le sort des Rohingyas. Les injustices, l’état d’Apartheid dans lequel ils vivent, les abus depuis toujours et qui n’ont jamais cessé, la ségrégation et le racisme, les crimes arbitraires et les viols en masse à leur encontre." ( ...) Elle a eu de nombreuses occasions de s'exprimer sur la situation des Rohingyas, elle ne l'a pas fait. C’était très flagrant lors de son voyage en Europe puis aux Etats Unis. C’était pourtant là qu’elle aurait pu bouleverser la situation pour les Rohingyas." !!!