Nous retrouvons dans ce roman le commissaire Adamsberg, ainsi que toute son équipe et son fils récemment découvert. Le PDG d’une grande entreprise brûlé dans sa voiture, un pigeon venu de banlieue accusée à tort, un mauvais citoyen qui attache les pattes d’un autre pigeon, ailé celui-là, le tout sur fond de légende moyenâgeuse dans le nord de la France : celle de l’Armée Furieuse, la Mesnée Hellequin, qui désigne et saisit les personnes à l’âme noire.
Comme toujours, le fil de pensée pour le moins insaisissable d’Adamsberg entremêle ces intrigues, ponctuées de personnages authentiques au langage savoureux, et d’une étrange histoire de sucre.
« Il n’avait pas à faire coïncider ce nom réputé, en bien ou en mal, avec un homme aussi petit et d’aspect si modeste qui, depuis son visage brun jusqu’à ses vêtements noirs, lui paraissait disloqué, inclassable ou du moins inconforme. Il chercha son regard sans vraiment le trouver et s’arrêta sur le sourire, aussi plaisant que lointain. Le discours offensif qu’il avait prévu s’était en partie prendre en dans sa perplexité, comme s’il s’était brisé non contre l’obstacle d’un mur mais contre une absence totale d’obstacle. Il ne voyait pas comment agresser, ou même seulement saisir, une absence d’obstacle. »
Sans dépasser dans mon top 5 Pars vite et reviens tard ou Un lieu incertain, cet opus se lit avec le même plaisir que toute la série de Fred Vargas, et j’ai adoré découvrir le commissaire dans son nouveau rôle de père du qui le met mal à l’aise.
« Vous êtes toujours aussi singulier, mon ami, dit-il finalement. Il suffirait de couper çà et là quelques rares liens terrestres pour que vous montiez vous mêler aux nuages, sans même être pourvu d’un idéal. Comme un ballon. Prenez-y garde, Adamsberg, je vous l’ai déjà dit. La vie réelle et une montagne de merde, de bassesse et de médiocrité, soit, nous en sommes bien d’accord. Mais nous sommes obligés de piétiner là-dedans, mon ami. Obligés. Heureusement, vous êtes aussi un animal assez simple, et une part de vous est bloquée au sol comme sabot d’un taureau embourbé. C’est votre chance. »