50

Cet instant-là est bon. Pas loin d'être le meilleur. Et en plus, il dure !
Cet instant-là, c'est lorsque le bateau est arrivé à bon port. Stabilisé, il ouvre sa gueule et nous déverse sur le quai. Peu importe alors que l'on doive dribbler entre les femmes, les hommes, les enfants, les voitures, les camions, les deux roues, peu importe que nous soyons trop nombreux pour cet endroit, si petit finalement. Là, il est juste majestueux, parce qu'il appartient à cet instant-là.Cet instant-là qui d'ailleurs se poursuit.
Maintenant, nous filons en voiture. Nous quittons l'endroit qui grouille. On se faufile parfois, on faufile la voiture plutôt, et l'on finit par rejoindre une route plus paisible. La route. Elle nous conduit là-bas. Elle allonge son ruban et nous propose séjour pendant dix kilomètres.
Nous regardons alentour. Avides et curieux. Rassurés et intrigués. Une année de plus. Rien n'a tout à fait changé. Tout est un peu différent. La lumière d'ici déjà nous saisi.
On roule, on longe, on regarde, on prolonge cet instant-là puis le chemin arrive, sur la droite, là, on le prend, évidemment$
. De la terre succède au macadam, des cailloux font sursauter le véhicule, on dirait des secousses, peut-être des hoquets, on alors ce sont des éclats de sourires. Quelques centaines de mètres, ça trémousse, et nous y sommes. Le clou de cet instant-là. Terre aride, mangée par les vents. Rochers dont certains on se demande comment ils tiennent. Et partout, surtout, l'océan. Il explose à 180 degrés au moins.La voiture s'est arrêtée de fait, elle est allée au bout de tout, les portes sont restées ouvertes alors qu'on se projetait, cherchant la claque. Le vent, ici, n'est pas avare. On prend l'air. *
Cet instant-là est délicieux.
Gravé.