Les films, et surtout ceux qui sont bien joués, bien menés, par delà l'aride, sans doute parce qu'ils captent des regards et que ces regards disent juste, ont cette force, cette capacité de nous sensibiliser de l'intérieur à des situations, des vies, des destins qu'un vague je sais suffit à montrer que précisément, on n'en sait rien.
Le film arrive et alors, on commence à ressentir. Ainsi l'histoire de cette femme aux portes de la cinquantaine. Elle vit dans sa voiture. Et de petits boulots. L'ironie, mais l'on sait que la fiction n'est parfois qu'une pâle copie de la réalité, est qu'elle fait le ménage dans un hôtel.
Ses yeux aimantent l'histoire. On la suit au fil des jours à la manière dont il fait nuit. On n'étouffe pas. On souffre avec elle, bien au chaud. L'on craint d'ailleurs à certains moments qu'elle ne dérape. Qu'elle en finisse. mais c'est mal la connaître. Car si elle dévie parfois, jamais elle ne dérape. Elle cavale tant bien que mal après l'argent. Cet argent que de toutes parts on lui réclame. Et elle cavale, cavale encore, cette femme que l'on pourrait croire à l'arrêt alors qu'en elle, tout est urgence, tout est mouvement. S'adapter, en permanence. Au mauvais sommeil. A l'inconfort. A la panique aussi.
Sa voiture, c'est tout ce qui lui reste. C'est ce qui la relie. Et c'est ce qui la maintient.
Alors quand frôle la panne, on mesure l'énormité de la situation. Et quand on sent poindre la menace que l'huissier la saisisse, la voiture, on devine alors l'énergie de l'impossible.
Les sourires viendront à la fin, et ce ne seront pas des sourires de happy end, non. Ce seront des sourires de soulagements. Des esquisses d'espoir. Car enfin, elle a fini par réussir à dégoter un logement social. Au quinzième, dans une tour. Mais le sourire dit que c'est le paradis, alors. Le début d'autre chose.
Parfois, dans la vie, un début, ça vaut tout l'or du monde.