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La véritable histoire de l’automne (22)

Publié le 11 décembre 2012 par Nicolas Esse @nicolasesse

- Vous voudrez bien M’excuser pour ce geste déplacé. Je m’étais endormi, Je crois. Endormi, c’est ça. Quelle merveilleuse sensation. Endormi, Je me suis envolé au-dessus de Mon monde. Je l’ai regardé. Mon monde est si beau vu d’en-haut; J’étais tellement occupé à le construire que J’ai oublié de le regarder. J’étais tellement occupé à le modeler que J’ai oublié de le sentir.

Dieu ferma les yeux

- Le monde sent si bon. Pour la première fois, J’ai senti l’odeur du monde. Pour la première fois, Je me suis échappé, Je me suis abandonné. Je crois bien que j’ai… Rêvé ? Rêvé ! Vous vous rendez compte ? J’ai rêvé, le temps d’une fraction de seconde. J’ai rêvé, vous comprenez ?

- Je crois que nous n’avons pas été présentés.

- Je suis Dieu qui a créé le monde. Je suis le commencement et la fin, Celui qui était, qui est et Celui qui sera.

- Et celui qui rêve à ses moments perdus.

- Celui qui rêve à ses moments perdus… C’est vertigineux, vous ne trouvez pas ? S’il existe Dieu tel que Dieu rêve, alors Dieu est-il encore Dieu ? Et le monde rêvé de Dieu, fait-il partie du monde créé par Dieu ?

- Ce que je sais, c’est que mes pieds se refroidissent.

- Vous étiez suspendue au-dessus de l’eau.

- Je ne connais pas le goût de l’eau et sous mes pieds la terre est froide.

- Alors J’ordonne à la terre de se réchauffer.

- Et pourquoi ne pas inventer une paire de chaussures ?

- C’est vrai ! Je n’y avais pas pensé.

- Et pourquoi ne pas me prêter votre manteau ? Je n’ai que mes cheveux pour me protéger du froid.

Alors, Dieu mit un genou à terre. Il tira de sa poche un ciseau. Dans les plis de son manteau, Il découpa une large bande de tissu qu’il déposa bien à plat sur le sol. Il dessina à main levée le dos, le devant et le tracé du col. Les manches qu’Il fit assez longues pour mieux pouvoir les redoubler. Il dessina aussi des poches profondes pour permettre aux mains de bien se réchauffer. Ensuite, Il découpa l’étoffe et faufila à la hâte avec du fil grossier. Il fit un premier essayage. Recoupa ici et retailla là. Pinça au niveau de la taille. Ajusta la hauteur de l’ourlet. Ajouta un peu de fourrure au bord de l’encolure et sur les parements, une bande de velours. Ensuite, Il se mit à coudre au fil double et doré, le devant avec le dos, entre les deux les trous des manches, au milieu la doublure… Dieu tirait la langue et cousait lentement.

A la fin, Il tendit à bout de bras le manteau terminé et la couvrit délicatement. Il referma les deux pans en portefeuille mais les deux pans s’ouvrirent aussitôt. Alors, Dieu eut l’idée de la boucle, d’une rangée de trous percés dans une ceinture qu’Il découpa aussitôt. Il ferma à nouveau les deux pans du manteau, fit passer la ceinture autour de la taille et resserra juste ce qu’il faut. Enfin, Il engagea l’ardillon dans le trou qui se trouvait au centre de la boucle.

- Vous avez de bonnes mains. Des mains habiles et qui savent travailler.

- Je vais prendre la mesure de vos pieds.

- Vous n’aurez pas besoin de me tailler des chaussures. Maintenant, j’ai assez chaud. Mon corps bien au chaud sous votre manteau, mes pieds nus aimeront sentir la fraîcheur de la terre.

- Le jour se lève et bientôt la terre se réchauffera.

- Mes pieds nus aimeront la brûlure de la terre.

Derrière eux, endormi et toujours couché sur le sol, Adam émit un faible grognement. Dieu se retourna.

- J’avais oublié : voici un homme, Adam. Je crois que c’est vous qu’il attend.



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