Père Noël blues

Publié le 28 octobre 2012 par Fracturedenuit

L’hiver a commencé aujourd’hui, avec une petite neige fine, froide et mesquine.  Noël approche déjà.
Enfin, le Noël païen, celui du père Noël et de la Sainte Consommation. A l’église, on a pas encore entonné le moindre cantique. L’Avent est dans plus d’un mois. Il est encore grand temps.
Manfred Lutz dit que le Noël chrétien a disparu de notre réalité, qu’il faudrait le célébrer en juillet pour avoir la paix et retrouver son sens initial ! Provocation utile pour cesser de croire à la juxtaposition possible de ces deux festivités.
Tu veux fêter Noël ? Achète ! Plus ça brille, plus c’est cher, luxueux, mieux c’est. Hautement technologique et à obsolescence rapide, c’est aussi très bien. Achète !

Cette année, j’aborde cette période avec davantage de sérénité. J’ai décidé de célébrer un Noël chrétien contre vents et marées, à la date dite et centrée sur la naissance de Jésus. Je ferai des cadeaux, home made pour la plupart, parce que j’aime bien et que je n’y vois pas d’inconvénient majeur. Mais la cérémonie de potlatch ne constituera pas Noël et j’assume maintenant la valeur monétaire réduite de ces présents.

Longtemps, je me suis sentie hors jeu à Noël. Comme une manifestation publique de mon indignité. Pas assez d’argent pour participer vraiment à la Sainte Consommation. Échec professionnel, semi-réussite sentimentale. Moins d’argent et de santé que mes cousins. Solitude relative. Appréhension forte de la « grande fête » de famille, autour du sapin, des mets fins et des cadeaux.

Nous sommes pourtant nombreux à nous sentir hors jeu. Face au matraquage publicitaire, on a tendance à l’oublier, à se vivre comme le seul/la seule à faillir. La barre de la consommation « nécessaire » est placée si haut durant « les fêtes » que l’exclusion s’accroît encore. « Les divinités de cette terre, ces puissances qui me plaisaient tant, augmentent leurs ravages. On se rue à leur suite » (psaume 16). Ce sentiment diffus de vide et de solitude, sont autant d’occasions de vendre. Sont-ils cultivés à dessein ? Le Père Noël a bon dos.

Cette année, je me sens plus libre. Libre d’inventer une nouvelle façon de faire communauté. Libre de m’occuper d’autres choses que mes tourments internes et périodiques. « Je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis une seule parole et je serai sauvé » (prière du centurion). L’indignité est consubstantielle à l’humanité, sa salut possible aussi. Me voilà en chemin.