Magazine Journal intime

Le début d'une enquête

Publié le 07 février 2013 par Didier T.
Le lundi matin à la réunion on m'a confié un projet. Pour mener à bien ce projet je dois coordonner des choses avec la directrice artistique. On m'a donné son nom, son numéro de téléphone, son e-mail, on m'a montré sa photo sur un trombinoscope et on m'a indiqué comment me rendre à son bureau. On m'a aussi invitée à lire ses billets sur le blog de l'entreprise, ce que j'ai fait et il se trouve qu'elle a un avis très tranché sur la peinture de Francis Bacon qu'elle juge écoeurante et satanique. Je dois lui poser des questions. Pour cela je peux faire abstraction de son avis, que je ne partage pas, sur Francis Bacon mais je n'y arrive pas. J'ai toujours des arrières pensées.
Après avoir réfléchi plus que nécessaire, j'ai décidé que je devais aller toquer à sa porte et lui parler les yeux dans les yeux. En tête à tête c'est toujours plus difficile de montrer ouvertement son animosité à l'autre. Mais arrivée devant son bureau je ne me suis pas sentie suffisamment solide pour soutenir une quelconque conversation avec elle. Alors j'ai erré dans les couloirs comme pour faire connaissance avec les couloirs inconnus de l' entreprise. Et comme il fallait absolument que je parle à quelqu'un, j'en avais besoin pour me réconforter quant à ma capacité à me socialiser,  j'ai parlé à un homme, dont j'ai oublié le titre exact, mais il s'occupe de la sécurité de l'internet et qui passait dans le couloir l'air de s'ennuyer. Je lui ai demandé s'il allait acheter le nouveau Blackberry. Il a répondu "yeap".
Après je lui ai demandé s'il achetait encore des cd (c'est une question qui hante mon cerveau actuellement, est-ce que les gens achètent encore des cd) ou s'il avait un ipod et il a répondu qu'il n'avait pas de produits Apple et qu'il achetait des cd qu'il mettait en mp3 sur son téléphone et qu'il achetait de la musique sur Amazon. Après il m'a demandé si j'avais un iphone. J'ai dit non. Pas d'iphone, pas d'ipod. Et puis j'ai réfléchi et j'ai avoué que j'avais un ipad. Il m'a encore questionné. Il a demandé - Mini ? J'ai répondu mini. Et c'est là qu' il m'a demandé "heureuse" ? Dans ma tête, je me suis dit qu'un simple objet ne pouvait pas me rendre heureuse. Et puis je me suis demandée s'il parlait de l'objet, de la taille de l'objet ou de la taille de tout autre chose à même de me rendre heureuse. Honteuse de mes idées érotiques (tout ça parce qu'il est du sexe opposé supposé avoir un gros sexe à la place du cerveau), j'ai passé mon chemin.
Le mercredi j'ai reçu un appel de la directrice artistique (hystérique). Que des reproches. Pourquoi donc ne l'avais-je pas contacté à propos de 'notre' projet ? Je n'étais qu'une 'bobo' bonne qu'à s'extasier devant des produits de grande consommation vendus dans des pays riches et fabriqués dans des pays pauvres. Une pauvre fille sans cerveau Et une pauvre fille dilettante. Elle m'a raconté encore qu'elle revenait d'un voyage en Afrique du Sud où elle avait vu comment des femmes dans mon genre traitaient des noirs en leur balançait des sacs plastiques remplis de produits de grande consommation dont elles ne voulaient plus. Elle m'a crié combien elle était écoeurée par tout ça.
Déjà le mardi à la cantine  j'avais eu vent des conversations hautement politiques de la directrice artistique. Elle racontait à ses copines comment le matin dans le métro un pauvre bobo (du genre à travailler dans un magasin de luxe de la rue Saint Honoré (pour le smic mais avec une veste créateur invendue comme cadeau de Noël)) avait perdu un bonnet chic et chaud en passant les tourniquets. Elle a raconté comment elle avait couru après le type pour lui rendre son bonnet mais sans succès car il avait un casque de musique bourgeois vissé aux oreilles pour ne pas entendre le monde dégueulasse du métro. Alors la directrice artistique elle a donné le bonnet à un clochard assis sur une des chaises en plastique du quai...
Cette conversation m'avait bien coupé l'appétit. Le soir chez moi j'avais tapé du poing sur la table. Qu'est ce qu'elle cherche cette personne avec son don de bonnet ? Pourquoi elle raconte ça à ses copines à la cantine, sur Facebook, sur Twitter comme si elle était la seule au monde dont les yeux voyaient cavaler la misère. Si elle est tellement compatissante pour ce clochard qu'elle lui donne son salaire de directrice artistique. Pourquoi un bonnet comme une petite miette ? 
Le mercredi soir j'en étais arrivée à la conclusion qu'elle a exactement la même attitude que ces femmes d'Afrique du Sud qu'elle fustige parce qu'elles balancent aux pauvres ce dont elles ne veulent pas. Pourquoi aller scruter si loin les choses qu'on peut voir juste en se regardant dans le miroir ?
Et puis ce jeudi, je me dis que le spécialiste de la sécurité de l'internet n'est pas clair. Publié par les diablotintines - Une Fille - Mika - Zal - uusulu

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