L'art dit « baroque » ne m'est pas esthétiquement et même spirituellement … proche … !
La multiplication des pains >>
Le recueil suit l’ordre des contemplations données par Ignace dans son livret des Exercices. Il en devient ainsi un complément. Il aide le retraitant à se plonger entièrement dans la scène qu’il contemple. Il s’y rend présent comme s’il y était.
C'est ma raison, qui me questionne; et mon intérêt pour la spiritualité ignatienne, dont sa méthode de contemplation des Evangiles, qui fait appel aux sens.
Déjà, un jésuite compagnon d’Ignace, Jérôme Nadal (1507-1580) , publie ( après sa mort) à Anvers en 1593 (Evangelicae historiae imagines) un ouvrage qui illustre les Evangiles et propose des interactions entre texte et images ; cet ouvrage servit de modèle aux peintres et sculpteurs du monde entier.
Dès la fin du 16ème, « l’art figuratif jésuite obéit aux 6 principes suivants, qui annoncent, par certains côtés, l’esthétique moderne :
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réduction du nombre de personnages pour créer un art didactique ;
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appel aux émotions du spectateur ;
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utilisation du clair-obscur pour renforcer le caractère dramatique de la scène ;
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effets naturalistes de la lumière ;
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goût pour la couleur ;
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effets visionnaires, en vue de créer un état sublime, supraterrestre.
Cette esthétique ira en s’enrichissant à l’extrême, jusqu’à aboutir - sommet de l’art illusionniste et baroque - à l’immense fresque en trompe l’oeil du plafond de la nouvelle église jésuite de Saint-Ignace à Rome, œuvre de Andrea Pozzo (1685-1702).
Tintoret a suivi les Exercices spirituels pour peindre son cycle de la Scuola Grande di San Rocco.
Les expériences des Exercices, mettent l'accent sur la "composition visuelle du lieu" dans la contemplation des Evangiles,
La pédagogie qu'utilisent les collèges jésuites, à partir de l'image pour une éducation humaniste et progressiste met en avant l’implication de l’élève dans l’apprentissage du savoir … ( théâtre …)
L'élan missionnaire exceptionnel : Amérique du Sud, Asie … L’image rend possible la rencontre avec l’autre dans sa culture propre, sa différence, sa mentalité.
Nous sommes aux sources d’une inculturation, qui signifie que chacun abandonne un peu de ce qu’il est pour rejoindre l’autre dans sa vérité ; chacun donne et reçoit.
Luis de Morales. Pietà. 1565
Luis de Morales, illustra des scènes qu’on peut rattacher directement à la pratique des Exercices. Ainsi, le cadrage resserré dans la Pietà donne à la vision peinte un caractère d’intimité, une immédiateté qui permet au spectateur de participer pleinement à celle-ci.
Petrus Rubens: Le Christ triomphant de la mort et du péché
Outre cette proximité de la scène figurée, directement issue de la vision due à la pratique des Exercices, la peinture jésuite, ou plutôt d’influence jésuite, se caractérise par les sujets représentés. Face à la tradition janséniste du Dieu caché, les peintres affirment la présence de celui-ci, triomphant, comme dans le tableau de Rubens Le Christ triomphant du péché et de la mort où celui-ci apparaît comme un soldat, un conquérant de la foi.
Plus tard, les libres penseurs condamneront cet art moralisant ( narration pseudo-réaliste, illustration du catéchisme, trompe-l'œil, etc ...), les romantiques valoriseront la « cathédrale gothique » et la piété qui les ont produites …
Philippe de Champaigne (1602-1674)
Saint-Jérôme 1635
Dans un pays profondément marqué par les jansénistes qui proposent, au même titre que les Jésuites, mais dans une direction opposée, un “projet pour la peinture” la rhétorique de la pose (d’inspiration janséniste) s’oppose à la rhétorique du flux (d’inspiration jésuite).
Il devient membre de l’Académie royale de Peinture en 1648. C’est dans ces année-là qu’il subit l’influence janséniste. Après que sa fille soit miraculeusement guérie d’une paralysie, il peint son œuvre la plus célèbre, Ex-Voto (1662), conservée au Louvre. Elle représente sa propre fille en compagnie de la mère supérieure.
La plupart des peintures de Champaigne sont religieuses, influencées par Rubens, mais devenant de plus en plus austères au fil du temps
Le Christ mort de Philippe de Champaigne: 1654