Ph., G.AdC
[ON MARCHE DANS LA FÊLURE INTIME DU MONDE]
On marche dans la fêlure intime du monde
Ces soubresauts nés de la douleur primitive
Quelle est la voix qui le dira ? Quel sera
Le corps qui saura mener jusqu’à son terme la
Valse triste ? Une voix s’élève à l’intérieur
De nous-même — une voix chère — exprimant ce qui s’
Apparente à l’expression de la plainte première
Je suis cet homme-là qui, tant et tant, crut aux ver-
Tiges et qui, désormais, dans la déchirure du lan-
gage se tient, regard clair, miné toutefois, blessé
Dans la fêlure du monde où les plaies suintent
Ph., G.AdC
[J’AI DROIT AU REPOS DU CHEVAL JOURNALIER]
J’ai droit au repos du cheval journalier Dé-
sormais je ne partirai plus vers quel labeur
Et je suis ce centaure qui s’éveille et geint
Autour de lui les aveugles s’affolent craignant
Ses ruades Ô grand cheval qui, autrefois, tractais
vers la berge les navires, te voilà effacé Il ne
demeure de toi que ce signe sur cette feuille
Sont-ce tes traces dernières ? Ta signature de sabot ?
Ébroue-toi ! Redonne-moi confiance ! Plongeons en-
Semble Je saurai bien te faire retrouver cette joie
Enfantine que tu poursuis sur la rive noyée à demi.
Franck Venaille, La Descente de l’Escaut, Gallimard, Collection Poésie, pp. 139-140. Préface de Jean-Baptiste Para.
FRANCK VENAILLE
■ Franck Venaille
sur Terres de femmes ▼
→ Ça
→ Dans le sillage des mots
→ [Quand la lumière née de l’estuaire] (autre poème extrait de La Descente de l’Escaut)
→ Un paysage non mélancolique
Retour au répertoire du numéro de février 2013
Retour à l’ index des auteurs