Jennie, lunettes noires, sort. Une femme plus âgée, Marceline, la tient par les bras (45 ans, grosse, gueule au carré). Une huée de photographes les accueille. Des journalistes les harcèlent de questions. Les deux femmes s’engouffrent dans une voiture. Marceline conduit. Jennie est assise à la place du passager. Silence lourd entre les deux femmes. Marceline le rompt.
MARCELINE
Il faut qu’on parle, Jennie.
JENNIE
Ah non, tu ne vas pas t’y mettre aussi ! Je déteste les conversations qui commencent avec le fameux « il faut qu’on parle. » Ca me donne immédiatement envie de me flinguer ou de sauter par la fenêtre.
MARCELINE
C’est pour toi Jennie. Tu déconnes grave.
JENNIE
T’es pas ma mère.
MARCELINE
Je suis ton agent, ça revient au même.
JENNIE
Je t’emmerde.
MARCELINE
Oh je n’en peux plus. Jette-toi si tu veux, ouvre la portière et casse toi. Qu’est-ce que tu crois ? J’ai d’autres chats à fouetter.
JENNIE
Je suis désolée. C’était un mauvais parcours de circonstances.
MARCELINE
Concours de circonstances, on dit.
JENNIE
Désolée, je n’ai jamais su y faire avec les mots. Ni avec quoique ce soit, tu me diras.
MARCELINE
J’avais remarqué ! J’en ai marre, Jennie. Tu me fatigues.
JENNIE
Je ne l’ai pas fait exprès.
MARCELINE
Tu parles ! Et la dernière fois où je suis venue te chercher complètement déglinguée chez ce type à Aubervilliers aussi je suppose? Je ne te parle même pas de l’avant dernière fois à l’hôpital ? Qu’est-ce que tu cherches enfin ? Te faire exploser ? Défoncer ? Connaître tes limites ? Bravo, tu y es. Moi, je ne suis plus, je ne serai pas toujours là pour te ramasser. Dans ta merde.
JENNIE
Je suis clean, Marcelle. Je t’assure. Je sortais vraiment de la piscine.
MARCELINE
De la piscine de coke, oui. En plus, tu te fous de ma gueule.
JENNIE
J’ai encore cinq émissions à enregistrer. Ne me lâche pas s’il te plait, Marceline. J’ai besoin de toi.
MARCELINE
T’es en train de te griller. En tout cas, désolée pour cette fois, mais t’es bonne pour la couverture de journaux. Il y a un connard qui a dû te griller.
JENNIE
M’en fous. C’est bien, non ? Ce me fait de la pub.
MARCELINE
Je suis agent de comédienne pas de putes dépravées, Jennie. Moi, je ne continue plus dans ses conditions. Tu me dis si tu veux rester avec moi et dans ce cas, on redresse la barre. Ou c’est moi qui saute du train en marche.
JENNIE
J’ai peur Marceline. Je ne sais plus où je vais. Ne me lâche pas.
Silence.
MARCELINE
Pour commencer, tu vas déménager.
JENNIE
Ca ne va pas la tête? Non, tout mais pas ça. Je te promets. Je vais changer. Vraiment.
MARCELINE
C’est ce que tu me racontes chaque fois. J’en ai assez. Tu veux changer ? Concrètement, je vais déjà te changer de cadre de vie.
JENNIE
Mais !
MARCELINE
Tu te tais et tu m’écoutes. Ok ? Ce sont mes conditions.
JENNIE
Mais…
MARCELINE
Je t’ai trouvé un nouvel appart où tu seras tranquille. Personne ne viendra te chercher là.
JENNIE
T’es folle, c’est le couvent ou quoi ?
MARCELINE
Presque… Il faut te mettre à l’abri de la tempête. Chaque matin, un conducteur viendra te prendre pour l’émission. C’est tout. On fonctionne ainsi pendant dix jours et ensuite on verra. On passe chez toi, tu prends tes affaires et je t’y amène direct.