J'ai entendu récemment, sur les « matins » de France-Culture, un échange avec un sociologue : Gérald Bronner (*), dont le travail sur nos « croyances » en général, a rejoint les questions et le malaise qu'il m'arrive de ressentir, quand l'une ou l'autre personne qui m'entourent s'expriment du genre : « Nous allons demander au Seigneur …. », ou « nous allons prier pour untel, qui ... »
Ma première réaction est de penser : - Je ne peux pas demander, tranquillement au Seigneur de combler l'un ou l'autre de ces soucis... Non, je ne peux pas... Impossible … !
Je peux crier dans la détresse..., et prier... Ça, je peux. Je peux - dans certaines circonstances – abandonner toute raison, m'emplir entièrement de la souffrance... Crier, prier.
« Que ta volonté soit faite ! » … Non pas, que les souffrances dont on me parle, sont provoquées ou voulues par Dieu ( Horrible … ! ..), bien sûr ! Je détesterai ce dieu ! qui n'existe pas...! ( heureusement, c'est " hérétique " ..!)
Mais, à l'échelle de l'univers et de l'éternité, je ne sais rien de ce qui est bon ou mal pour moi.... Je ne sais rien de mon destin …, et donc au mieux, ma prière peut consister à ce que Dieu m'accompagne sur ce chemin... Et, que je sois, moi, capable - d'accompagner la personne qui souffre, et de soutenir " le divin " pour qu'il puisse continuer à vivre en moi … C'est tout ! Ce que je sais, c'est : quand l'humain souffre, Dieu souffre...
Autour du témoignage tout personnel que je viens d'émettre, il y a la question de la croyance – je préférerais le mot « Foi » ( qui inclue le doute ) , et de la crédulité … Et bien souvent, dans l'univers d'une religion, il est difficile de faire la part de l'une et de l'autre ….
* Je reviens à G Bronner : déjà il y a dix ans il avait ausculté la genèse intime de nos croyances et expliqué pourquoi les progrès de la science n’avaient nullement domestiqué notre «rationalité subjective»(l’Empire des croyances, PUF)
« Croire » est connoté négativement : Qualifier de croyance une opinion, une idée ou une thèse, c'est en général vouloir lui ôter toute crédibilité et présupposer l'incertitude voire le manque de sérieux. La croyance interroge la Vérité, parce qu'elle n'est pas « garantie », Nous croyons faute de savoir... Parait-il ...?
Les croyances ne disparaissent pas avec les progrès de la science. Les sociétés contemporaines ne croient pas moins qu'hier. Certaines croyances perdent du terrain et parfois meurent, mais d'autres naissent.
« La science alimente la croyance », souligne la sociologue Romy Sauvayre, auteur de Croire à l’incroyable (Puf). Chaque découverte ne faisant que nourrir de nouvelles questions et ouvrir le champs des possibles. « Je me souviens, raconte-t-elle, d’un reportage télévisé lors de l’ouverture de l’accélérateur de particules en Suisse. Le journaliste parlait de la possibilité de découvrir une 9e dimension (sic) ! ». Autre exemple, la recherche sur le clonage, qui a fait le bonheur de la science-fiction et de la secte des raëliens pour qui cette technique conduirait à l’immortalité. Pas moins. Les incertitudes, la crise économique et sa cohorte d’effets anxiogènes profitent aussi aux croyances qui rassurent, d’autant qu’elles assènent des vérités là où règne le doute » article sur ' La Vie ' 06/03/201
( à suivre ...)
(*) Gérald Bronner est Professeur de sociologie à l'université de Paris Diderot (Paris 7) et membre de l'Institut Universitaire de France.