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Changer de République

Publié le 11 avril 2013 par Despasperdus

Alors que la Cinquième République subit une crise sans précédent sur fond de récession économique et de régression sociale, il est navrant que la gauche au pouvoir -appelons-là ainsi- refuse l'offre du Front de gauche d'un débat sur le fonctionnement de nos institutions et la nécessité de changer de République.

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La stabilité de la Cinquième République, maintes fois vantée et seul argument recevable en sa faveur, s'est faite au prix d'une concentration des pouvoirs. La Constitution du 4 octobre 1958 a fait l'objet d'une vingtaine de modifications. Elle n'en demeure pas moins aujourd'hui bâtarde avec son parlementarisme fantoche et son présidentialisme officieux. Le président de la République cumule les avantages des deux systèmes. En effet, les pouvoirs du Parlement sont tellement circonscrits (cf. l'initiative de l'ordre du jour - les restrictions sur les propositions d'ordre budgétaire - le pouvoir d'investigation des parlementaires) que l'essentiel du pouvoir législatif est entre les mains d'un pouvoir exécutif, qui plus est bicéphale, où le Premier ministre sert de fusible à un président de la République politiquement irresponsable puisque le Parlement ne peut le révoquer.

Le pouvoir exécutif exerce également un contrôle non négligeable du pouvoir judiciaire (Parquet) et du pouvoir médiatique public (budget - nomination des directeurs de chaînes) qui limite d'autant les garanties démocratiques de l'indépendance de la justice et du pluralisme des opinions exprimées dans les médias du service public.

Cette concentration des pouvoirs au seul profit d'un pouvoir exécutif, élu et irresponsable durant la mandature, se décline à toutes les strates de la République, du président au ministre, du président du conseil régional au maire de la commune. La décentralisation qui devait rapprocher les décisions au plus près du peuple a produit l'effet inverse. Elle a créé des baronnies locales, aussi éloignées du peuple que le pouvoir central, et surtout elle a complexifié la chose publique dans la mesure où les citoyen-ne-s ne savent plus vraiment qui fait quoi et qui décide.

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La possibilité pour le président de la République de se représenter pour un second mandat, le quasi exclusif scrutin majoritaire, le cumul des mandats, la faculté de légiférer par voie d'ordonnance sont autant d'éléments qui favorisent le caractère monarchique de la Cinquième République et qui éloignent les citoyen-ne-s de la politique.

De plus, la Cinquième République a favorisé le développement d'une caste de privilégiés de politiciens professionnels et d'élus cumulards coupés pour la plupart des réalités quotidiennes du peuple qui décident à la place du peuple pour le peuple. Ce dernier n'est consulté de temps à autre dans un cadre électoral restrictif qui exclut de la représentation nationale à la fois les catégories socio-professionnelles les plus nombreuses (ouvriers-employés) et les partis politiques minoritaires. La Cinquième République favorise le désintérêt du peuple pour la politique.

Enfin, il ne faut pas négliger la présence de l'article 16 de la Constitution du 4 octobre 1958 qui permet à un Président de la République de prendre en toute légalité les pleins pouvoirs. Ledit article est une sorte d'épée de Damoclès qui peut, à tout moment, s'abattre sur la démocratie et nos libertés politiques. Il offre à n'importe quel président de la République de faire en toute légalité un coup d'Etat !

Pour toutes ces raisons, faire un énième replâtrage de la Constitution de la Cinquième République, qui plus est sans consulter le peuple comme a l'intention de le faire Hollande, n'est ni à la hauteur des enjeux, ni digne d'un homme de gauche.

Et pour conclure, nous citons ces quelques lignes de «Tous pourris!» La nouvelle censure imposée à la parole critique :

« Plutôt que de discréditer Mélenchon, prenons-le au mot et discutons : cette nouvelle constitution, comment l’écrirons-nous ? Quelles règles voulons-nous pour séparer les intérêts privés de l’intérêt général ? Quel statut pour nos élus ? Quels droits de regard et de révocation pour nous ? C’est en s’emparant du débat sur la constitution que nous dépasserons l’indignation populiste pour engager la reconstruction politique et sociale qui s’impose. »

à suivre...

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