Le 1er mai, nous fêtons saint Joseph ouvrier, ou artisan, et la fête du travail. Jamais le travail n'a autant manqué en France, avec un record historique de 3,224 millions de chômeurs à la fin du mois de mars. A cette occasion, voici un extrait du discours du Bienheureux Jean-Paul II (béatifié le 1er mai 2011) lors d'une rencontre avec des travailleurs italiens (19/03/94) :
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Le fruit le plus important du travail est l'homme lui-même. Au moyen de sa propre activité, l'homme se forme lui-même, dans la mesure où il découvre ses propres possibilités et les met en œuvre. Dans le même temps, il les donne aux autres et à la société tout entière. Il confirme ainsi, au moyen du travail, sa propre humanité et devient en un certain sens, un don pour les autres, en se réalisant pleinement lui-même.
C'est cela, la grande signification du travail humain, la signification personnelle, que j'ai voulu mettre en relief dans l'Encyclique Laborem exercens. Il ne faut jamais perdre de vue cet ordre de préséance. On ne peut jamais subordonner le travail au capital, parce que c'est contraire à l'ordre établi par le Créateur. Le travail est accompli par l'homme pour l'homme. Ce n'est qu'alors qu'il correspond à l'ordre correct. Autrement, le dessein du Créateur est ébranlé et détruit.(...)
Nous voulons aujourd'hui considérer en particulier le travail par rapport à la famille. L'artisan Joseph de Nazareth peinait pour faire vivre la Sainte Famille. Travailler pour subvenir aux besoins familiaux est le premier devoir de tout travailleur et de toute travailleuse. Si l'ordre social du travail doit être rapporté à la personne qui travaille, s'il doit lui servir, cela signifie que le travail doit servir au bien des familles, en créant pour elles les conditions pour l'existence et l'éducation des enfants. On ne soulignera jamais assez, en cette année dédiée à la famille, ce qu'elle représente pour la société.
Nous devons donc consacrer une attention particulière au travail très important accompli par les femmes, par les mères au sein de la famille. Elles sont irremplaçables dans les devoirs qui leur ont été confiés par le Créateur lui-même. Personne ne sait donner la vie, personne ne sait éduquer le nouveau-né, comme une mère. Dieu lui-même, pourrions-nous dire, s'est plié à cette règle, en confiant son Fils unique à Marie. (...)
Combien est-il urgent de repenser, dans son ensemble, le problème de l'organisation du travail et de l'emploi ! Les perspectives d'espérances pour les jeunes qui désirent jouer leur rôle avec responsabilité dans la société, ne doivent pas manquer dans le pays. Ils doivent sentir que la société a besoin d'eux, qu'elle attend d'eux une contribution au bien commun, selon la préparation spécifique de chacun. Il ne faut pas laisser s'échapper et se perdre ces jeunes énergies, on ne peut pas éteindre l'esprit. Si le système économique actuel ne garantit pas cela, il faut le revoir avec courage et, si nécessaire, le corriger. (...)
Nous prions pour l'Italie. Mais l'Italie se trouve en Europe et dans le monde, où les pays victimes d'exploitation des systèmes économiques internationaux en vigueur sont de plus en plus nombreux. On paie toujours moins pour les produits du dur labeur de la terre, on exige toujours plus pour ceux de l'activité industrielle, et de cette manière, au lieu du développement auquel elles ont droit, de nombreuses nations sont comme condamnées à la stagnation, au chômage, à l'émigration. Il s'agit d'un système injuste qui devient aujourd'hui un problème mondial: c'est une injustice qui met en cause le soi-disant premier monde, face à la détérioration des conditions des peuples du Tiers-Monde. L'ordre fondamental qui garantit la priorité du travail sur le capital, n'est-il pas bouleversé à grande échelle ? Le capital ne devient-il pas toujours plus puissant et inhumain ? Et les victimes de telles situations sont toujours plus l'homme et la femme.
Vous, hommes responsables de la justice, des conditions des travailleurs, où qu'ils se trouvent sur la terre ; vous, représentants des syndicats, vous devez crier à voix haute, vous devez exiger le changement de cet ordre.
Quelles solutions au problème de la pauvreté les tout-puissants possesseurs du capital cherchent-il à imposer aux nations pauvres ? Ils proposent, comme moyen principal, la destruction du droit à la vie. N'est-ce pas là une absurdité manifeste ? Toutes les richesses de la création sont pour l'homme et il n'y a pas de richesse sans l'homme. Si les hommes ne réclament pas à ce sujet, Dieu réclamera ! Et aujourd'hui, c'est le Fils du charpentier, Jésus de Nazareth, qui travailla avec ses propres mains, qui réclame. Il crie à haute voix de la Croix : « Pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu'il font » (Lc 23, 34). Mais il crie aussi :,« Cesse de pécher, cesse de commettre l'injustice, cesse de tuer ! ».
Aujourd'hui est le jour de la grande prière avec les travailleurs : c'est la prière pour le travail. Elle débuta, un jour, sur votre terre italienne. C'est ici, en effet, que saint Benoît enseigna à travailler en priant, et les moines qui le suivirent, fidèles au principe : « Ora et labora ! », accomplirent une grande révolution, qui est tout aussi importante que la révolution industrielle moderne. Le fruit de cette révolution fut la sainteté de l'homme. Le travail rendait homme, sanctifiait l'homme, ennoblissait la vie familiale créait les liens sociaux, formait l'histoire des nations.
Nous rendons grâce pour les fruits extraordinaires de l'activité humaine de nombreux siècles en Italie, en Europe et la prière à l'intérieur du travail humain, même de nos jours. La laïcisation et la sécularisation du travail contribuent seulement à faire en sorte que l'homme haïsse presque le travail et le traite exclusivement comme source de profit. En travaillant ainsi, il ne réussit plus à voir l'homme en lui-même, il ne réussit pas à le voir dans l'autre qui peine à côté de lui.