Magazine Humeur

Le poète de la rue de Lappe

Publié le 01 mai 2013 par Fbaillot

Voici ce que j'ai déclaré ce 1er mai 2013, lors de la cérémonie de remise des médailles du travail, salle Robert Blézel.

Le poète de la rue de Lappe

L'assaut des forces de l'ordre contre les grévistes de Mc Cormick, à Chicago, en mai 1886

Comme nous le faisons chaque année, nous nous retrouvons en cette Fête du Travail pour honorer ceux d’entre vous qui ont voué une grande partie de leur existence à leur univers professionnel.

Plus encore peut-être que les années précédentes, je me dois de commencer mon intervention en parlant des absents : à Templemars comme ailleurs, ils sont trop nombreux celles et ceux qui sont exclus de cette fête parce qu’ils n’ont pas ou ne trouvent pas d’activité. J’ajouterais aussi, nombreuses et nombreux sont celles et ceux qui ne trouvent pas une activité correctement rémunérée à plein temps.

Vous le savez, notre pays vient de battre un record peu enviable : nous avons dépassé le précédent pic de janvier 1997, et le nombre de demandeurs d’emploi s’établit en France à 3.224.600 personnes, soit 11% de la population active

Certes, nous pouvons nous rassurer : ce record est dû en grande partie à une crise mondiale qui touche aussi nos voisins (6 millions de demandeurs d’emploi en Espagne, soit 26% de la population  active, 27% en Grèce). Le chômage a également atteint un nouveau record absolu dans la zone euro à 12,1% en mars,  les chiffres sont tombés hier.

La métropole lilloise s’en sort plutôt mieux que la France et la région, et dans la métropole, le sud de la métropole s’en sort plutôt mieux que d’autres secteurs. Mais notre commune dénombrait 197 inscrits à Pôle Emploi au 31 décembre dernier, soit 7,25% de la population active. C’est honorable, mais le chiffre est en évolution de +8,2% sur un an. Parmi ces demandeurs d’emploi, on compte à Templemars 17,3% de jeunes, et 16,8% de demandeurs inscrits depuis plus de 2 ans.

Dans chaque foyer, dans chaque famille, on redoute pour un proche, on se demande comment nos enfants vont pouvoir s’en sortir. Et je ne vous cacherais pas que les élus et les services municipaux voient se multiplier le nombre de foyers surendettés, les situations personnelles compliquées, les effets secondaires du chômage sur la santé, le moral, la délinquance.

Je n’ai évidemment pas la réponse à ces situations, et je crois que chacun sait que nous devrons gérer pendant de longues années encore les effets de cette crise économique.

A notre échelle, nous essayons de gérer avec nos moyens, par exemple en ne touchant pas à la fiscalité, pour ne pas alourdir les charges qui pèsent sur chaque citoyen, mais aussi en essayant de répartir au mieux le coût des services que nous proposons au public, et en appliquant sur l’ensemble de nos tarifs des critères sociaux.

Nous travaillons aussi sur ces sujets-là avec nos voisins, et nous avons mis en place une batterie d’outils intercommunaux pour aider à l’insertion professionnelle, au reclassement, à la recherche d’emploi, à la formation professionnelle.

Nous sommes également présents à travers l’action sociale municipale, le CCAS, l’aide alimentaire, et tous les services que nous avons mis en place pour toute la population et notamment les plus âgés, les handicapés, les plus fragiles. Nous le faisons aussi en aidant les plus démunis à participer à la vie associative, parce que ce sont ceux qui en ont le plus besoin.

Je sais, en ce jour où nous célébrons le travail, parce que nous savons combien il est source d’équilibre, de bien-être, mais aussi parfois de bonheur, il est un peu paradoxal de parler d’absence de travail. C’est pourtant une réalité qu’on ne peut ignorer.

Un peu partout dans le monde, on fête aujourd’hui le travail, et l’initiateur n’en est pas le maréchal Pétain, comme on le prétend souvent, mais le congrès de l’Internationale socialiste qui s’est tenu à Paris en 1889, qui souhaitait rendre hommage hommage aux grévistes du constructeur de machines agricoles Mac Cormick à Chicago, en 1886. Le 1er mai sera à l’origine des lois sur le repos hebdomadaire en 1906 et des huit heures quotidiennes en 1919, avant de se banaliser et de devenir en 1947 un jour chômé et rémunéré. Paradoxalement, aux Etats-Unis et au Canada, on fête le Labor Day le premier lundi de septembre.

Aujourd’hui, nous sommes réunis autour de ceux d’entre nous qui ont beaucoup donné à leur travail. Chacun à sa place, par notre travail, nous participons à ce que notre pays soit plus agréable, nous participons à la création de richesses, qui nous permettent de manger, de nous habiller, de nous déplacer, d’être en meilleure santé, de profiter d’un peu plus de confort que nos aînés. Tous, nous participons à ce que notre société se porte mieux.

Depuis de longues années, vous avez été présents, pour les bons et les moins bons moments que comporte la vie au travail, et à travers cette cérémonie conviviale et amicale, nous voulons saluer vos efforts, votre persévérance, votre savoir-faire, votre “professionnalisme”. Le travail vous a formé ; souvent aussi, il vous a modifié, quand il ne vous a pas déformé, usé, au point que peut-être vous aspirez à une retraite pour profiter un peu mieux des vôtres, de ce qui vous est cher.

Le travail nous construit, nous émancipe, nous procure de la liberté. C’est aussi pour ces raisons que vous êtes là, et que je crois chaque Templemarois tient aujourd’hui, par mon intermédiaire, à vous féliciter.

Je voudrais terminer ce propos de manière plus souriante que je ne l’ai commencé. Le 1er mai, et le travail, nous procurent une impressionnante collection de chansons au sein de laquelle j’ai voulu puiser une pépite d’un artiste aujourd’hui disparu : Francis Lemarque. Ce Parisien de la rue de Lappe, près de la Bastille, ami d’Aragon, de Prévert, de Trénet, mais aussi de Django Reinhardt et Yves Montand, disparu en 2002, nous a laissé un magnifique patrimoine, au sein duquel je vous ai choisi une chanson interprétée ici par Montand. Je n’en dis pas plus, je vous propose ces trois minutes qui parlent avec beaucoup de poésie du travail, de sa richesse mais aussi de sa rudesse.

"Les routiers" de Francis Lemarque, chanté par Yves Montand


Retour à La Une de Logo Paperblog

Magazine