La retrouver dans ce petit café de notre rencontre. Et y passer une bonne soirée. Une très bonne soirée. Sans évoquer les doutes, les espoirs, les peurs. Il n’y a pas de débat en amour. Simplement mettre du sourire dans nos voix m’a fait le plus grand bien. Reparler de ces moments gais, de nos souvenirs communs et rire enfin à nouveau. Pas de je t’aime tragique, ni de colère sourde. Voilà ce qui nous avait manqués à tous les deux. Voilà ce que j’espérais depuis si longtemps. Je vois à nouveau dans ses yeux une lumière. Elle me sent étrangement détaché. Elle a raison, j’ai fait le choix du bonheur. Quoi qu’il arrive je veux garder un beau souvenir d’elle. J’ai accepté de ne pas pouvoir lui voler ses rêves. Je la contemple en caressant le vieux cuir du chesterfield de Mme Shaun. Je la regarde longuement. Je la trouve belle. Comme au premier jour. Comme si c’était le dernier.
Et puis sur le trottoir de notre première rue, tout s’accélère. Voilà qu’elle s’anime tendrement. « Il faut que je lui parle » lache-t-elle, « il faut qu’il sache ». Je ne lui demande rien. Et je suis aussi étonné qu’elle.
Je l’embrasse tendrement sans s’évoquer d’adieu. Pourtant le romantique qui sommeille en moi s’éveille aussi. Et si elle revenait, et si cette simple soirée avait levé tous les doutes et les incertitudes qui se bousculent dans sa tête ? Et si elle débarquait au milieu de la nuit ? Convaincue à nouveau que je suis l’homme de ses rêves.
Non, bien sûr. Elle n’est pas revenu ce soir là pas plus que le lendemain. Elle réclame un moratoire, un droit de réflexion, une tentative de solitude imposée, un isolement abstinant. Et je prie qu’il ne soit pas obstinant.
Je la laisse dans un dernier élan de confiance prendre ce temps. Et cette lumière au bout du tunnel qu’elle trouvera peut-être semble déjà me prendre dans ses bras. J’ai des envies de renouveau avec elle, sans doute aucun. J’ai imprimé les images de nos bons moments passés ensembles, et quand elle me manque je me surprends à les regarder tendrement. Il faudra peut-être dans quelques jours que ces images partent à la poubelle. Tant pis. Je m’injecte encore une petite dose de rêve en attendant.