Pour accrocher nos cœurs meurtris à un rideau de violettes, on pourra s’attacher les services d’un entraîneur de l’amour.
L’amour n’est pas chose légère. L’amour a ses règles et un terrain miné.
Dans sa variante la plus complexe, il se joue à plusieurs, mais pour les matches officiels, la Fédération des Jeux Amoureux a suivi les recommandations de la Fédération Internationale de Tennis: on retrouve donc deux joueurs et un filet au milieu. Si le tennis en simple privilégie l’affrontement de deux personnes de même sexe, l’amour tendra à opposer deux personnes de sexe opposé; il existe toutefois quelques exceptions : pensons par exemple à Richard Raskind, tennisman américain né en 1934, devenu tenniswoman américaine en 1975 sous le nom de Renée Richards. En 1976, l’Association Américaine de Tennis refuse son inscription au tournoi féminin de New York parce qu’un homme transformé en femme, on ne sait plus où placer le filet. Renée poursuit l’Association en justice et finit par gagner. Il, elle finit même par jouer en double mixte avec Ilie Năstase, droitier roumain et facétieux qui n’hésita pas à ajouter un smiley horizontal sur le premier "a" de Năstase pour mettre un peu de gaîté dans la loge royale un jour de pluie à Wimbledon.
On voit bien ici à quel point les choses se compliquent dès lors que le genre se mêle des choses du tennis.
En amour, les positions s’inversent et il s’avère extrêmement difficile d’opposer deux paires de shorts pour fouler le gazon. Et quand je dis shorts, vous pensez automatiquement garçons, alors que le port de la jupe offrirait aux hommes de multiples espaces de rangement où ranger leur deuxième balle. Mais voilà, les tenniswomen s’obstinent à être blondes et de type scandinave pendant que les garçons jouent en pantalons ou en pantacourts, c’est selon la saison.
Nous dirons donc que le tennis est un sport de balle codifié qui privilégie les affrontements entre personnes du même sexe alors que l’amour est un combat où tout le monde dézingue tout le monde, à grands coups de latte, à grands coups de batte dans les tibias : on débarque sur le ring, la cloche sonne et là, on découvre effrayé qu’on ne porte même pas de short et qu’on a oublié ses protège-tibias. Heureusement, dans notre coin, la main sur l’éponge plongée dans un seau d’eau, notre love coach est là qui hurle : Vas-y petit, surveille ton jeu de jambes, ta garde! Ta garde! Relève ta garde! Bouge! Vas-y, gauche, GAUCHE!
Vous avancez, votre crochet imparable roulé en boule dans votre main gauche, votre poing va partir à la vitesse de l’éclair, cueillir votre adversaire, l’envoyer dans les étoiles, BOUM! Vous vous retrouvez le derrière par terre : il y avait de la dynamite dans le gant de votre adversaire. Vous discernez à peine le visage de votre coach, perdu au fond du ring derrière un écran de brouillard. Il vous sourit. Il vous encourage : Allez petit, debout! Tu vas l’avoir, tu vas l’étendre, allez! DEBOUT!
Vous vous relevez, les jambes en manches de veste, un train de marchandises dans votre boite crânienne. Vous vous demandez si ce n’est pas lui que vous allez étendre, ce petit bonhomme gesticulant qui vous intime en souriant l’ordre de retourner vous faire défoncer le portrait.
À quoi sert un love coach, finalement ?