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La maison et le vent (Héctor Tizón)

Publié le 17 mai 2013 par Despasperdus

« Ces notes, comme toute confidence, seront aussi une suite d'erreurs ou d'équivoques, puisque ce que l'on écrit n'est pas exactement ce que les autres vont lire.»

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La maison et le vent est le journal intime sans date, ou plutôt le journal de bord sans carte d'Héctor Tizón (1929-2102) qui s'exila en Espagne après le coup d'État des généraux de la sinistre junte militaire argentine. L'auteur narre sa fuite pour rejoindre la Bolivie.

« J'observais le vieux en silence et j'avais envie de lui dire ce que je venais moi-même de découvrir : que tout ce qui nous trouble ou nous angoisse est hors de l'homme : les monuments, le pouvoir, l'or. Ces choses-là sont d'ailleurs à la portée des méchants. Et des imbéciles. »

D'étapes en étapes en train, en camion, sur le dos d'une mule ou à pieds, le narrateur traverse des contrées pauvres, délaissées par la modernité, et des paysages hors du temps. Il rencontre des gens humbles et pauvres mais riches en légendes, en croyances et en humanité.

« Il n'était pas affligé par la mort puisqu'il ne l'attendait pas. Et même s'il en était affligé ça n'aurait rien changé ; car nous ne pouvons rien contre elle si ce n'est la devancer. C'est notre seul acte de liberté, notre seul risque par rapport à elle. »

Son chemin de traverse s'apparente à la fois à un retour aux sources et à un voyage initiatique. Une réflexion intérieure et philosophique, un dialogue avec la mémoire et le présent.

« Tout ceci, dans mes notes en tout cas, sera le témoignage balbutiant de mon exil; moi aussi, je le voudrais, de l'amour que je porte à cette terre, à ces hommes, aux gens de mon village, en ces jours où l'on intimide, où l'on terrorise, où l'on tue ; ce sera également le témoignage de ma solidarité avec ceux que l'on persécute, que l'on traque; et de mon désir de corriger un passé durant lequel, retranché derrière mes livres de droit, j'ignorais que la justice épuise l'amour, puisqu'elle n'est qu'un fruit sec et fade. Le témoignage enfin d'un homme qui s'était mis à un moment donné au service du malheur et qui maintenant s'enfuit ; mais qui consigne tout, car il se dit qu'un petit morceau de papier griffonné, un simple mot, peut empêcher le bourreau de dormir. »

Le contexte politique de la junte fasciste des années 70, qui est pourtant l'élément déclencheur de sa fuite, n'apparait qu'en filigrane dans le récit. En évoquant à peine cette tragédie qui frappe son peuple, probablement par pudeur mais aussi pour décrire quelqu'un face à sa conscience, le récit prend une dimension intemporelle et universelle.

« J'ai refusé de vivre parmi les brutes et les assassins ; j'ai abandonné, à l'ombre de mes arbres, la mémoire de mes morts. Le vent a effacé ma maison, mais je sais qu'elle est toujours là, debout dans mon cœur. »

Une tardive mais belle découverte...


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