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Génériques, merci mais non merci

Publié le 19 juin 2013 par Mari6s @mari6s

« Je voudrais du Doliprane® 500 s’il vous plaît.

- Bien sûr, me répond le pharmacien en mettant dans un sac plastique une boîte qui attire mon attention.

- Euh, je préfèrerais le princeps.

- On ne l’a pas. »

Il était tard, j’avais mal à la tête, j’ai acheté le générique sous le regard narquois du pharmacien. Il n’est pas près de me revoir chez lui.

Car oui, je fais partie de ces gens bizarres qui ne veulent pas de génériques. Pour le paracétamol, je n’ai jamais eu de problème – il faut dire qu’il ne doit pas y avoir beaucoup d’ingrédients genre excipients, et puis de toute façon 0% de notre paracétamol est fabriqué en France. Même celui du Doliprane®, si si (cf le 3ème lien de la liste à la fin de l’article).

Mais mon opposition aux génériques n’est pas basée que sur des principes théoriques que j’expliciterai plus bas. J’ai une santé fragile et attrape régulièrement de grosses laryngites, qui se traitent en général très bien par homéopathie/phytothérapie/kit basique du genre Vicks® Vaporub et collutoires. Mais une fois de temps en temps, cela finit en bronchite et il me faut alors un traitement antibiotique si je veux éviter de tousser comme un tacot pendant deux mois (le seul qui fonctionne étant l’amoxicilline, nom de princeps français Clamoxyl®). Il est arrivé qu’on me refile en douce le générique, résultat : j’ai passé deux semaines de plus (au lieu d’une petite semaine en général lorsque je prends le princeps) à cracher mes poumons et dormir trois heures par nuit. Ajoutez à cela les expériences de plusieurs personnes de mon entourage, et vous saurez pourquoi je me bats avec les pharmaciens.

Et même s’il y a bien sûr des pharmaciens qui s’exécutent sans ciller (voire avec des mots gentils car il ne faut pas croire, il y en a qui se sont fait leur propre opinion sur les génériques!), certains réagissent vraiment mal quand on demande le princeps. Je ne compte plus les occasions où j’ai dû écouter un laïus sur le manque de fondements de ma demande – et l’écouter jusqu’au bout à chaque fois même si on est pressé, sinon ils se vexent… Ou alors, on me lâche de façon pas très amicale : « Oui mais alors il faut payer » car en effet, la Sécu rembourse moins les princeps que les génériques (ou plus exactement, elle rembourse la même somme malgré le prix plus élevé du princeps) et pas tout de suite (on avance l'argent au lieu de bénéficier du tiers payant - cf le 5ème lien sur ma liste). Mais est-ce que j’ai dit que je ne voulais pas payer ? Sans doute ont-ils des clients qui râlent (et sur le principe je les comprends, car la politique de la Sécu quant aux génériques m’exaspère – cela dit j’évite personnellement de m’en prendre au messager) mais ce n’est pas une raison pour m’agresser avant même que j’aie eu le temps d’ouvrir mon portefeuille !

Je reprends cet article que j’avais commencé d’écrire il y a quelques temps, à l’occasion du scandale d’inversion de médicaments Teva. On en sait encore relativement peu sur ce qui s’est passé à l’heure où je vous parle, le fait que ce soit des génériques n’a donc peut-être pas grande influence sur l’affaire – si ce n’est que l’économie sur les enrobages facilite ce genre de confusion puisqu’un somnifère et un diurétique arrivent à avoir la même couleur et la même forme. Et puis de façon plus générale, quand on rogne les coûts, les risques d’erreur augmentent…

Je vais maintenant exposer les principes théoriques évoqués précédemment. Contrairement à ce qu’on nous rabâche, le générique n’est pas identique au princeps ! D'ailleurs, légalement, il ne doit être qu'équivalent. Tout d’abord, il peut contenir des excipients différents, et dosés différemment. Et ceux-ci peuvent avoir une incidence sur l’efficacité du médicament… et aussi sur les réactions allergiques, en général plus nombreuses avec les génériques (c’est notamment le cas de l’amoxicilline dont je vous parlais plus haut). Et même la substance active peut être dosée à plus ou moins 10% par rapport au princeps. 10%, ce n’est peut-être pas dramatique pour du paracétamol, mais pour un antibio ça commence à faire, et pire encore pour des traitements au long cours, hormonaux par exemple (d’ailleurs les médecins conseillent en général à ce type de patients de toujours garder le même médicament, que ce soit le princeps ou l’un des génériques, pour que la dose reste constante).

Pour autant, peut-être avez-vous suivi des traitements génériques sans que ça vous pose aucun problème. Tant mieux pour vous ! Peut-être êtes-vous tombé sur un « bon » générique, peut-être vos problèmes de santé sont-ils assez bénins ou votre constitution assez solide pour que cela n'ait pas d'influence... Que sais-je. Je ne dis en aucun cas que toute personne qui consomme des génériques va mourir dans d'atroces souffrances, contrairement à la façon dont certains déforment mes arguments pour en rire. Simplement il faut être conscient que la population qui consomme des médicaments, surtout de façon régulière, est en moyenne affaiblie par rapport à la population globale, et que les risques sont donc plus importants. Moi-même n'ai pas une santé flamboyante par rapport à la moyenne des gens de mon âge, et j'ai un terrain allergique et de problèmes d'immunité... Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si les morts liées à l'inversion de médicaments Teva sont des personnes âgées et... malades ! Comme c'est bizarre de la part de personne qui avalent des pilules !

De plus, pour réduire les coûts, de nombreux labos font fabriquer leurs génériques à l’étranger (notamment en Chine), et il est notamment arrivé que des bris de verre se retrouvent dans des lots de médicaments, ou encore des poils de balai ou des insectes (cf 3ème lien de la liste). Cela laisse rêveur quant aux conditions de sécurité et d’hygiène de ces usines et à ce qui peut passer au travers des (rares) contrôles. C'est malheureusement un problème qui se pose également pour les princeps, mais plus on veut baisser le prix, plus ce genre de risque est présent.

Enfin, je ne peux que m’étonner d’entendre ou de voir à la radio et à la télévision des publicités du style : « le labo Machin-Chose vous propose le médicament Machin-Truc ® et son générique Machin-Trucmuche – aucune différence, sauf le prix ». On nous répète que l’économie vient de l’absence de coûts de Recherche & Développement pour les labos qui se basent sur les recherches de celui qui a lancé le princeps, une fois le brevet arrivé à expiration. Dans ce cas, il faudrait qu’on m’explique comment les génies de chez Machin-Chose arrivent à vendre leur Machin-Trucmuche moins cher que Machin-Truc ®, alors qu’eux ont eu les coûts de R&D plein pot, et continuent d’ailleurs à vendre Machin-Truc ® au prix fort… Un prix plus fort que nécessaire, peut-être ? Ou rogneraient-ils sur les coûts d’une façon ou d’une autre sur la fabrication du générique… Dans les deux cas, il y a anguille sous roche.

Pour conclure, la mesure la plus urgente me semble être le retour du droit à l'information pour les patients. J'arrive encore à me faire avoir quand je suis distraite, alors que je suis sensibilisée à ce problème - alors imaginez des gens plus influençables, moins bien informés... ! Sans même parler des remboursements par la Sécu ou des catastrophiques conditions de sécurité des usines de médicaments à l'étranger, il me semble donc primordial que la Sécu arrête de pousser les pharmaciens à refourguer des génériques sans prévenir, ou en piégeant, leurs clients. Dès lors que l'argent sort de la poche du patient (ce qui est inquiétant pour l'égalité devant les soins), je ne vois pas en quoi ça les regarde !

Quelques liens si le sujet vous intéresse :

Les différences générique/princeps :
http://sante.planet.fr/medicaments-et-risques-sante-la-verite-sur-les-generiques.173291.70.html

Génériques – arguments pour et contre (pharmacienne & médecin), copies conformes ou non, risques.
http://www.terrafemina.com/forme/bien-etre-beaute/articles/3219-les-medicaments-generiques-sont-ils-dangereux-.html

Médicaments fabriqués à l’étranger - problèmes sanitaires et difficulté des contrôles :
http://www.bastamag.net/article2172.html

Les génériques : différences avec le princeps, motivations financières, marketing et matraquage publicitaire :
http://www.lexpress.fr/actualite/sciences/sante/medicaments-generiques-copies-non-conformes_1237007.html

La prise en charge par la sécu :
http://www.mutuelle-land.com/dossiers-mutuelle/questions-pratiques-sur-les-mutuelles/le-remboursement-des-princeps-et-des-generiques.html


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