Intuitions éparses
Ce que le dessinateur ignore, son dessin le sait. Et ce n'est qu'en le faisant qu'il peut le savoir.
Dessiner c'est être le témoin et le secrétaire de sa propre vie intérieure.
Chaque geste sur la page doit découler d'une nécessité. Comme un édifice en équilibre ( où retrancher un seul élément provoquerait la chute de l'ensemble).
L'encre est un fluide vital comme le sang. Un dessin réussit finit par vivre.
Un dessin est un ensemble de traces en un certain ordre assemblé. On pourrait dire aussi une cartographie, le déplacement de la main et de la pensée dans un espace et un moment donné.
Ce qui fait la force d'un dessin c'est qu'on ne puisse pas en parler. Qu'il nous cloue le bec.
Paradoxalement, alors même que le dessin devrait être le domaine attitré du visuel, il me semble qu'il a presque plus à voir avec le tâtonnement de l'aveugle et de sa canne. On palpe des contours invisibles dans le visible. Comme si on avait une image en tête, une matrice aveugle ou aveuglante qu'on tentait bon gré mal gré de fixer sur la feuille avant qu'elle ne s'échappe. Les comédiens répètent pour cerner leur personnage, les dessinateurs dessinent pour dégager leur regard.
Deviens ce que tu dessines. Dessine ce que tu es.
Dessiner est deviner.