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Max | Nouveau Jourdain

Publié le 07 juillet 2013 par Aragon

paisible-jourdain_940x705.jpgUn jour bizarre et incertain, du moins au début,les parents redeviennent enfants de leurs enfants et les enfants sont alors les parents de leurs parents.

Pourquoi ne l'ai-je pas fait ? J'avais envie hier de te prendre dans mes bras, nous allonger sur ce lit étroit, pâle et si propre, te chanter "Swing low, sweet chariot..." ainsi que nous le faisait Martha Bäuerle quand nous étions petits mon frère et moi dans la maison des bois noirs de Baden-Baden.

Quand j'étais môme cette chanson me ravissait car je pensais qu'il y était question d'une merveilleuse, bonne et douce crème au caramel que j'allais recevoir... Coming for to carry me (caramel ) home...

Ma main posée sur ton coeur semblait t'apaiser, tes sursauts, tes soubresauts, s'estompaient, la moue que tu faisais les yeux fermés semblant déglutir quelque chose d'âcre et de douloureux te quittait, tu étais bien et j'aurais voulu t'allonger près de moi en te chantant la chanson que Martha nous chantait.

Le couloir était là, murs fins comme papier à cigarette, indiscrets presque obscènes. Des mots, des exclamations, de la vie bien sûr si je réfléchis bien, il ne pouvait pas y avoir une ambiance funeste même si l'aile de cet étage où nous étions toi et moi était aussi celle des soins palliatifs. La fille disait à l'autre qu'elle était "sexy", la charriait en rigolant et l'autre pouffait gentiment en disant qu'elle avait encore des chambres à faire. J'entendais aussi dans une chambre tout près le bruit de la porte qui s'ouvrait et une voix claironnante qui disait :  "On n'a pas mangé sa compote ?"

Redoutant ma violence intrinsèque, je préparais malgré moi le Scud meurtrier qui la dévasterait si elle osait entrer et te dire aussi la même chose, te dire aussi ce "on" que j'exécrais. "On a fait dans sa couche ?" Oui, on a fait dans sa couche et on n'a pas mangé sa compote, on est loin de tout ça jeune fille tu sais...

Rêves-tu d'un pays magique où je pourrais t'emmener ? Je peux te porter, te protéger tu sais...

Tu parlais dans tes délires d'hier d'avions qui piquaient, de camions et d'essence. Le Rhin en feu que tu traversais hier avec tes autres compagnons spahis et goumiers de la 4ème DMM sur les traces fraîches et sanglantes des loups fuyant d'Hitler a-t-il en ses eaux profondes la mémoire d'un nouveau Jourdain qui est prêt à t'accueillir après ton long voyage ?


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