Mon cher Victor,
Hier soir, je suis sortie. Tiens ! C'est extraordinaire, ça ! Ne te fiche pas de ma poire, tu veux ? Mais non... C'est
juste qu'à la façon dont tu le dis, on pourrait penser que tu restes terrée chez toi toute la journée. Pas du tout pourtant ! Donc tu es sortie. Très
bien. Et alors ? Et alors pour la première fois depuis longtemps, j'ai rencontré un garçon. Un garçon à qui je plaisais beaucoup manifestement. Là,
cela devient intéressant... Un garçon qui disait amen à tout ce que je disais, qui était d'accord avec tous mes mots, qui aimait le jazz tout comme moi, qui aimait la lecture tout
comme moi, qui aimait tout pareil que toi. Enfin, c'est ce qu'il affirmait en tous cas... Il ne devait pas te plaire beaucoup... Tu fais une de ces têtes
! Ce n'est pas ça. C'est toujours agréable de savoir que l'on plaît. Et puis ça fait du bien de s'en souvenir, surtout, les soirs de déprime. Mais... Mais ? Je n'avais qu'une seule envie : lui dire que je voyais clair dans son jeu (et ça se voyait comme le nez au milieu de la figure, je t'assure... Il faisait
tout pour attirer mon attention !) et de me laisser tranquille. Tu es d'un dur ! Il ne te plaisait pas du tout, ce pauvre jeune homme ? Bon. D'abord,
il n'était pas si jeune que ça. Et puis à vrai dire, je ne me suis même pas posé la question. Hummm... Alors, si je comprends bien : tu sors, tu fais des
rencontres, on te fait la cour et toi tu repousses les avances de tes soupirants sans même te demander s'ils valent la peine ou non qu'on s'y arrête... C'est bien ça ? Euh... A peu
près. Il n'y a qu'une chose à en conclure, ma pauvre Mirabelle : tu n'es pas prête. C'est comme si la machine refusait de se mettre en route... Comme
si, malgré tous mes efforts, malgré toute ma bonne volonté, tous les soirs où je sors (et crois-moi qu'ils sont plus nombreux qu'à l'époque où j'étais en couple !), il n'y a rien qui se passe.
Rien. On en revient à ce que je disais : tu n'es pas prête. Ah la la... Je ne suis pas sortie de l'auberge...