« J’essaie de me concentrer sur ma concentration. »
de Martina NavratilovaLe travail est fait de relation(s), donc d'interruptions
Bien que les nouvelles technologies (smartphones, messageries, réseaux sociaux …) aient été pensées à l'origine pour améliorer la productivité et le confort de travail des salariés, il semble bien qu'elles soient source de perturbations. Dans une étude effectuée en 2012 en France par les sociétés Sciforma et PSNext, 84% des Français pensent que ces outils perturbent leur concentration et pour 89%, ils renforcent le sentiment d'urgence. Un constat qui va à l'encontre de leur objectif d'origine.Par ailleurs, en 2012, 23% des Français disent ne pas pouvoir travailler plus de 10 mn sans être interrompus et 67% disent ne pas pouvoir rester concentrés plus de 30 mn sans interruption.Il n'est pas question ici de s'interroger sur la source de ces interruptions. La façon de les gérer fera l'objet d'un article spécifique. Non, ce que nous allons aborder dans ce post concerne plus spécifiquement le développement de notre capacité à nous concentrer : l'idée est bien d'être plus efficace dans les moments, mêmes courts, où nous pouvons (devons) délivrer notre savoir-faire et notre énergie, de ne pas perdre son temps à recommencer ce qu'on vient de faire, et si possible de le faire bien.Qu'est-ce que la concentration ?
Le Petit Larousse nous en donne deux définitions :- Se rassembler.
- Faire un effort intense d'attention, de réflexion. ex : Se concentrer sur un problème. Ne pas parvenir à se concentrer
- l'existence de routines qui amènent à cet état particulier
- la mobilisation des sens et de tous les canaux perceptifs
- la motivation
- une durée adaptée au degré d'entraînement et à la difficulté de la matière
- un certain entraînement du à la répétition
Alors, si c’est si simple, pourquoi n’arrivons-nous pas si facilement à nous concentrer ? Quelques éléments de réponse figurent ci-dessous…
Pour garder une concentration efficace longtemps, il faut en effet se poser à tout instant la question suivant : « Tous les sens qui doivent me servir à me concentrer sont-ils à 100 % dédiés au sujet de ma concentration ? »Autrement dit :- Est-ce que je regarde bien ce sur quoi je suis sensé me concentrer ?
- Est-ce que j’écoute totalement le sujet sur lequel je dois me concentrer ?
- Est-ce que j’enregistre convenablement ce que je capte par mes sens sur un support quelconque, même s’il ne s’agit que de ma mémoire ?
- Suis-je en condition de me concentrer ?
Comment faire, donc, pour ramener notre concentration à son niveau initial, sachant qu'on est toujours distrait par quelque chose ?
- Fixer son attention
Il s'agit de se mettre en tension pour mobiliser ses sens, ce qui implique une démarche volontaire (volonté d'être attentif), mais aussi de développer sa capacité à fixer les informations reçues (attention aux sons, aux couleurs, aux mots, aux formes....).
Une autre façon de procéder est au contraire de faire le vide : fixer du regard un objet en faisant abstraction de ce qui l'entoure, fermer les yeux en se mettant à l'écoute de sa respiration...toutes les stratégies sont envisageables dans la mesure où elles permettent de libérer l'esprit des pensées parasites. - Accepter de se fixer des limites
On ne peut pas tout retenir, tout le temps, et notre capacité de fixation sur un sujet est limitée. Il est reconnu aujourd'hui que nous passons par des cycles de concentration dont la durée est en moyenne de 90 minutes. Avec la concentration vient la notion de rythme, rythme qui alterne des périodes d'attention et des périodes de relâchement. - Se convaincre de l'utilité de nos points d'attention
Tout n'est malheureusement pas intéressant dans ce que nous avons à faire, mais c'est néanmoins ce que nous avons à faire. Il n'est pas inutile dans ce cas de se rappeler la finalité vers laquelle tend l'activité sur laquelle il faut se concentrer. - Limiter les distractions
Cela semble une évidence, mais il y a peu de gens qui sont capables de se concentrer longtemps dans un environnement riche en distractions. Évidemment, on pourra toujours trouver des contre-exemples, mais il faut se fier aux statistiques. - Se donner des rituels de concentration
C'est un mécanisme bien connu de ceux dont le métier est d'écrire vite ou de parler en public ou qui ont besoin de mobiliser rapidement leurs ressources (les journalistes, les responsables de communication, les orateurs divers et variés, les sportifs de haut niveau... et les blogueurs, entre autres) : arriver à produire en peu de temps est très lié à des routines.
Pour certains cela peut être tailler un crayon, ou alors replacer un dossier, n'importe quel séquence de gestes un peu répétitifs, en quelque sorte associer une action au vide qui est le prélude à la concentration (et donc créer un conditionnement).
Pour d'autres cela peut passer par un questionnement systématique : quel est le sujet, pourquoi s'en préoccuper, que peut-on observer, quels problèmes se posent, que peut-on en penser soi-même, qu'est-ce que cela suggère comme solution ?Cette façon d'ordonner la pensée a de grandes vertus mobilisatrices pour ceux qui ont pris l'habitude de s'en servir. - Limiter les dérives
Cela veut dire être conscient que notre penchant naturel est de laisser capter par tous les autres motifs de distraction tellement plus intéressant que ce que nous faisons au moment où nous le faisons. C'est particulièrement sensible dans les contextes ou les nouvelles technologies de l'information et de la communication sont très présentes.
Quelques exemples :
- il est très facile de se laisser détourner d'une recherche initiale sur internet quand on n'a pas défini le contenu de sa recherche, et la tentation est alors grande d'aller fureter sur tous les liens connexes qui nous semblent intéressants
- dans une réunion, un ordre du jour mal défini ou une animation peu cohérente garantit la dérive obligatoire
- dans un entretien ou une discussion, l'échange informel peut prendre le dessus sur le sujet à traiter, de même qu'il peut s'ouvrir à des digressions certes intéressantes mais peu profitables
Dans ces trois cas, il devient nécessaire de procéder à un recentrage systématique qui peut passer par trois questions clés :
- quel est le sujet ?
- qu'est-ce que je veux avoir obtenu à l'issue de ma recherche, de la réunion ou de l'entretien ? pourquoi ne pas se l'écrire le cas échéant ?
- dans tous ces cas, qu'est-ce que l'on attend de moi ? - S'entraîner
Notre capacité de concentration ne s'use que si l'on ne s'en sert pas ! C'est en cela qu'une des conditions de mise en œuvre repose sur un acte volontaire qui sera facilité par la répétition, jusqu'à devenir inconscient. - Conserver de la fraîcheur et préserver ses capacités de concentration
C'est sans doute un cliché que de rappeler combien nos capacités physiques influent nos capacités intellectuelles (dont la capacité à fixer notre attention).
De ce point de vue, une hygiène de vie "correcte" est un préalable : temps de sommeil suffisant, existence de temps de récupération, limitation dans la prise de toxiques divers et variés (boissons fermentées, excitants, calmants, etc...), tonus...