Banc d’Essai

Publié le 02 septembre 2013 par Insideamerica

L’émigré qui retrouve son pays d’origine pour les vacances ne peut s’empêcher de l’examiner sous tous les angles pour voir ce qui a changé. Et puis une fois rentré, il compare. C’est son privilège. Chez lui partout, il peut juger du mieux et faire son shopping. Le comparatif est totalement malhonnête bien sûr : c’est moi qui choisis les critères et les expériences. Mais une fois n’est pas coutume, au diable l’objectivité !

Prise en main

Cendriers pleins, effluves d’urine persistantes, places de parking étriquées, et double barrières de sortie au cas où deux voitures voudraient sortir de l’aéroport avec un seul ticket de parking : la France vous accueille méfiante, mesquine et puante. Si vous l’aimez, faites le premier pas. Sa vertu se mérite. A l’opposé de la Californie aguicheuse qui vous saute au cou dès l’arrivée à LAX avec ses murs de lumière, ses baristas souriantes, ses alignements de palmiers géants et sa brise marine. Avantage Los Angeles : souriez, vous êtes dans la cité des anges !

Equipement

La bagnole, avec ses variantes Avis, taxi, “super shuttle”, “Executive Car” ou limousine, est la seule option que Los Angeles peut offrir au voyageur. Voiture, taxi, moto-taxi, bus, RER, TGV : la variété  des options à partir de Roissy l’emportent haut la main… Pour peu que l’on sache où les trouver et comment les utiliser. Les panneaux ne suffisent pas. Faut connaître (ben oui, on l’a déjà dit : la France, ça se mérite !). Et ça ne s’arrête pas aux aéroports parisiens : le transport combiné jusque dans les petites villes de Province, c’est vraiment un truc de fou dans ce pays ! Cerise sur le gâteau : les transports sont à l’heure ! Que celui qui n’a jamais passé quatre heures en transit à Dallas ou Chicago parce qu’il a plu la veille ose retirer les quatre étoiles que je donne à la France sur ce coup là.

Mais bon, faudrait quand même qu’ils pensent à passer à la 4G un de ces matins !!!

Consommation

Shopping :

Rien à faire : question shopping, c’est juste pas la peine de faire des emplettes en France. C’est cher, jamais vendu de bon coeur, et généralement déjà-vu chez nous. Notes de voyage :

  • J’ai remarqué qu’on trouve désormais des Apple Store partout. Va falloir réviser l’argumentaire pour convaincre les copains de venir faire du shopping en Californie. Heureusement, les prix restent bien moins élevés ici.
  • En France, toujours pas de monolithe de verre, de grosse pomme lumineuse, ou d’écran géant : les architectes de la ville ont eu raison des marques mégalomanes. Les stars des centre villes, se sont les arcs de pierre. Ça fait un peu musée à force, mais faut reconnaître que c’est joli.

  • Service toujours aussi exécrable. C’est glacial. On a vraiment l’impression de faire chier son monde à la moindre demande inhabituelle, obligé de se confondre en excuses auprès du vendeur. Insupportable. Avantage Californie sans même réfléchir. Cinq étoiles même.
  • Incroyable le monde qui continue de fréquenter les FNAC. Barnes & Nobles doit en crever de jalousie. Ils ont pas Amazon en France ou quoi ?
  • Comment on fait pour s’habiller dans ce pays ? Sans blague, t’as vu le prix du t-shirt ?
  • Il y a des magasins de chaussures ! Je ne parle pas des trucs de sport, non, des vraies pompes en cuir et tout ! Et il y en a plein partout. Sans doute qu’on marche beaucoup plus en France qu’en Californie.

Restauration :

  • Abstraction faite du service («bon, je dois vous dire, en principe on ne sert plus à cette heure, alors si vous pouvez passer commande vite fait…»), y a pas photo : c’est juste incroyable ce qu’on mange bien en France. Ça ne s’explique même pas. Je sais pas. Il y a tout les ingédients pour faire de bons petits plats en Californie, mais on n’y arrive pas. Y a un truc magique. 
  • Étonnant : il n’y a plus que des magasins d’alimentation haut de gamme dans les centre villes. C’est dingue. Les fromagers-affineurs, artisans glaciers, et charcutiers-traiteurs ont bouté le clacos Président et la vanille Carte d’Or dans les Leclerc de banlieue. Avantage France pour le plaisir et la qualité. Mais bonjour le prix du panier d’appoint !

Sécurité

  • Toujours au feu rouge et partout en ville : jamais vu autant de mendiants depuis longtemps. Et il est où le filet social ?
  • La kalashnikov et les militaires dans les lieux touristiques en France, c’est pour chasser les pauvres ? Ici, les GI sont à la télé, pas sur Hollywood Boulevard. Et dire que les Américains passent pour être paranos ! C’est le monde à l’envers.

Sur la route

Vitesse :

  • C’est VRAIMENT un changement dingue ! Ils ont bridés les bagnoles ou quoi ? Il n’y a plus un français qui dépasse les limites de vitesse. Même sur l’autoroute. C’est presque ennuyeux.
  • Je sais, c’est plus sûr et soit disant que ça fluidifie le trafic, mais tout de même, les milliards de sens giratoires qui ont fleuri en France à chaque croisement depuis mon exil californien sont-ils bien nécessaires ? Après deux semaines, j’en peux plus de zigzaguer. Et mes passagers en ont encore le mal de mer. Vive la ligne droite !
  • Entre deux sens giratoires, est-il bien nécessaire de placer trois ralentisseurs ?
  • C’est quoi ce truc qu’on a en Europe de préférer les voitures à trois pédales. C’est une exception culturelle ou juste de la connerie ?
  • Je ne peux plus m’en passer : en Californie, on peut tourner à droite même si le feu est rouge. Ça fait un bien fou quand on revient.
  • Ils ont ralenti sur la route, mais les conducteurs français sont toujours aussi réticents à faciliter l’insertion d’un véhicule sur leur file en cas de rétrécissement, laisser le passage dans les carrefours congestionnés, ralentir à la vue d’un piéton, et à ne pas klaxonner en toutes occasions. Avec si peu de sens civique pour céder un passage, on comprend mieux qu’il faille tout ces sens giratoires !

Routes de campagne :

Grosse réalisation de ce voyage en France : si Paris s’est endurcit, la douceur de vivre n’a pas disparu de nos campagnes. Bon d’accord, c’était le mois d’Août et tout ça. Mais tout de même, il y a des signes qui ne trompent pas… 

  • Que la France est bien peignée ! Les champs sont tout bien rangés, les vaches sont bien parquées, les arbres sont joliment disposés… Quel contraste avec les espaces sauvages américains. C’est bien organisé les jardins à la française.
  • Des “plus beaux village de France”, on en a compté plein. Tout vieux mais tout propre, comme un sou neuf. Pas de poussière qui vole, pas de tracteur tout rouillé : on n’est pas prêt de voir un “plus beau village” en Californie !

  • Les terrasses de café sont toujours aussi accueillantes, et les nouvelles locales qu’on peut lire dans le journal que se repassent les clients n’inspirent que de “bons soucis” : pas feu de forêt hors de contrôle, de déséquilibré mental ouvrant le feu sur des enfants, de cyclone ravageur, de concurrence des chinois ou de fluctuations sporadiques du Dow Jones… On parle des problèmes d’entretien des cimetières et de lueurs étranges dans le ciel provoquées par des OVNI la nuit dernière à la sortie d’une discothèque. Que du bonheur ! En comparaison, le Los Angeles Times est bien trop anxiogène !

Tout terrain :

  • Rien à faire : malgré les restos de plages et les fruits de mer en France, je n’échangerai pas mon baril de nature californienne contre deux barils de plages méditerranéennes. Même en Camargue : vraiment trop domestiquée pour moi cette côte « sauvage ».
  • Côté montagne, mon coeur balance entre une tarte au myrtille dans une ferme auberge des crêtes vosgiennes et un sandwich au sommet des pics sauvages de la Sierra Nevada. Pour le spectacle, mais sans la gastronomie : avantage Californie malgré tout.

Pause pipi :

  • Cherchez pas, y a pas. En France, on pisse parterre.
  • Quand il y a des toilettes publiques, c’est payant et personne pour faire de la monnaie. Quand c’est gratuit, c’est sale et ça pue.
  • Jamais d’urinoir à hauteur d’enfant. Quand on est petit, on pisse parterre.
  • C’est fou le nombre de gens qui prennent le temps d’écrire leur nom et la date où ils ont fait pipi sur les murs. Un truc d’homme des cavernes ?
  • Pour les problèmes de prostate : avantage Californie !

Bilan

Impossible de résister au charme de la France au mois d’août. Des vieilles pierres, des splendeurs architecturales, le plaisir de flâner à pieds, des villes hospitalières, des villages protecteurs, et une cuisine ensorceleuse. Quand on la traverse en la regardant, quand on n’écoute que les champs, pas les cris, quand on l’aime : la France nous le rend au centuple. Pour autant elle nous ennuie de ses humeurs, et la Californie souriante nous manque rapidement. Superficielle peut-être. C’est ainsi que la plupart des Français la qualifie. Mais si superficielle signifie facile, accessible, ouverte, charmeuse, accueillante et bien portante, alors la Californie le revendique haut et fort. Elle ne nous ennuie pas de ses problèmes, et nous séduit sans détour. Toujours spectaculaire.

On est heureux chez soi. Et le privilège de l’émigré, c’est de l’être un peu partout.