Corruption : Arvind Kejriwal, dénonce-moi si tu peux

Publié le 03 novembre 2012 par Dopalruka @DoPalRuka
Le nouveau meneur anti-corruption Arvind Kejriwal monopolise la Une des médias en rapportant des malversations dans les plus hautes sphères de l'Etat et du monde des affaires. Peut-il réellement changer le système et la politique indienne?

Depuis plusieurs semaines, les attaques de Arvind Kejriwal fusent. Pas une semaine sans que l'ex-camarade d'Anna Hazare, entré en politique, n'expose une nouvelle affaire de corruption, dans laquelle tremperaient les hommes politiques et les hommes d'affaires les plus puissants du pays. Le président du BJP, Nitin Gadkari, se serait accaparé des terrains publics. Salman Khurshid, ministre de la justice, aurait siphonné de l'argent destiné aux handicapés. Robert Vadra, beau-fils de Sonia Gandhi, se serait arrangé avec l'agence immobilière DLF pour obtenir des propriétés à bas prix. Sheila Dikshit, chef du gouvernement de Delhi, aurait augmenté les prix de l'électricité pour en faire profiter des fournisseurs d'énergie privés. La compagnie Reliance imposerait sa loi au gouvernement dans le domaine du gaz.
Arvind Kerijwal et son nouveau parti India Against Corruption (IAC) n'hésitent pas à pointer du doigt. Mais est-ce l'arme adéquate pour éradiquer le fléau de la corruption qui gangrène le pays? Pour R. Jagannathan, rédacteur en chef de Firstpost, Arvind Kerijwal risque à court terme de paralyser l'économie en s'attaquant au milieu des affaires et en exposant ses arrangements avec le gouvernement. Et il n'y a aucune certitude que le système soit « nettoyé » sur le long terme. La classe moyenne qui le soutient aujourd'hui pourrait bientôt se sentir menacée : « Pourquoi la population urbaine - qui n'a rien à gagner de la stagnation ou du déclin économique de l'Inde - voudrait continuer à le supporter si tout autour d'eux commence à s'écrouler? ». Udit Misra, de Forbes India, est plus optimiste sur l'avenir de l'activiste : « En créant un contraste avec l'establishment politique actuel, il pourrait devenir très influent sur la scène politique indienne ».

Kejriwal refuse de quitter la prison de Bawana, où il est détenu temporairement,
tant que le ministre de la justice Salman Khushid, qu'il accuse de corruption,
n'est pas démis de ses fonctions. Il est evacué par la force le 12 octobre.

Mais beaucoup de commentateurs moquent le fait que le nouveau monsieur propre n'ait pas de programme politique. En dehors de la délation, pas de propositions. « Le document diffusé au moment de la formation du parti (...) ne contenait pas grand chose en termes d'idées nouvelles, ce que la jeune et prometteuse Inde recherche en ce moment », affirme Rajesh Kumar dans LiveMint.
Selon Udit Misra, c'est peut-être mieux ainsi : « Sa vision pour l'Inde est un mélange désastreux d'idéalisme, de naïveté et d'aveuglement à la limite de la stupidité (...). Il doit dépasser ses propres inconsistances idéologiques (...) avant qu'il ne devienne une sérieuse menace pour l'ordre établi ». Les solutions qu'il propose seraient « simplistes »Misra affirme dans Forbes India que Kejriwal ne maîtrise même pas sa spécialité : la corruption. « Il maintient que toutes les maladies qui touchent le pays sont dues à la corruption (...) Mais cela prend plus la forme d'un symptôme que d'une cause », écrit-il.
Sur le site de Firstpost, Akshaya Mishra assure que Kejriwal ne saisit pas la complexité des décisions prises par le gouvernement et leur contexte.  Pourtant, il demande d'être indulgent envers le meneur anti-corruption. Certes, il ne détient pas de véritables scoops, certes ses allégations manquent de précision et de preuves, mais il a le mérite de mettre les vrais problèmes sur le devant de la scène : « La différence, c'est qu'il a soulevé un important sujet - les connexions entre le milieu des affaires et la classe politique - et l'a présenté de manière à le rendre compréhensible par le plus grand nombre ». Quoi qu'il arrive, « il a commencé à changer le jeu (...), clame R. Jagannathan. Il a envoyé un message très puissant aux Indiens : Si moi, le petit Arvind Kejriwal, je peux m'attaquer aux plus puissants, les simples citoyens peuvent aussi les défier s'ils s'unissent »
Reste à savoir quand les médias se lasseront de ses coups de théâtres... ou quand les ennemis qu'il se créé se feront plus agressifs.