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FAITS DIVERS > Brétigny-sur-Orge : une enquête bien trop silencieuse

Publié le 11 septembre 2013 par Fab @fabrice_gil

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Photo SNCF

En ce début de mois de septembre, la gare de Brétigny-sur-Orge ressemble à toutes les gares de banlieue parisienne. Du monde et un trafic ferroviaire revenu à la normale du fait des horaires de Rentrée. Tandis que la cause exacte de l’accident n’est toujours pas connue, le scénario d’un acte de malveillance avait été rapidement écarté. Un empressement qui intrigue l’opinion publique.
Seules des portions de quai refaites à neuf et des chaînes de protection neutralisant les voies 1 et 2 rappellent aux voyageurs la catastrophe du 12 juillet dernier. Oui, ce jour-là, à 17h11, le train Intercités 3657 Paris-Limoges déraillait à l’entrée de la gare, écrasant sur le quai ses voitures 5 et 6. Bilan : sept morts -deux dans le train et cinq sur le quai- et des dizaines de blessés.En pleine période de départ en vacances, l’émotion était forte. François Hollande lui-même s’était rendu sur place. Le Président de la SNCF, Guillaume Pepy assurait que tous les moyens seraient mis en œuvre pour faire la lumière sur la catastrophe. Dés le lendemain, un communiqué évoquait "le basculement d’une éclisse", explication reprise par le procureur de la République d’Evry, qui précisait que "les recherches allait se concentrer sur les causes de l’absence, de la rupture et/ou du desserrage des écrous de cette éclisse". Simultanément, l’hypothèse d’un acte de malveillance était étrangement écartée : "à ce stade, affirme Monsieur Pepy, il n’y a pas, de la part de la police ou de qui que ce soit, d’indices concordants qui vont dans la direction" d’un tel acte.
Une certitude qui ne satisfait pas d’anciens cheminots. Certains ont fait parvenir leurs réflexions, arguments techniques à l’appui. Schématiquement, une éclisse est une sorte d’agrafe qui relie deux rails entre eux et évite les décalages. Pesant une dizaine de kilos, elle est fixée sur les flancs du rail à l’aide de 4 ou 6 boulons. En soi, le desserrage d’un de ces boulons est un processus banal -usure, chaleur, pression due aux passages récurrents des trains- et vérifier les éclisses est une opération qui se fait de manière quasi systématique, au moins une fois tous les 15 jours, notamment au moment du graissage des aiguillages.Est-il possible qu’une éclisse se desserre totalement et aille se coincer dans l’aiguillage voisin ? "En admettant que cette éclisse soit tombée sur le sol, chose que je n’ai personnellement encore jamais vue, elle resterait tout simplement au sol", explique un ancien agent de la SNCF. A-t-elle pu être déplacée par le passage d’un train précédent, comme cela avait été évoqué ? "Le souffle d’un train voyageur qui roule à 130 km/h ne suffit pas à faire voler un caillou du ballast, alors une éclisse (…) cette histoire d’éclisse je n’y crois pas du tout…" Y aurait-il eu négligence d’une équipe de maintenance ? "Chacune de leurs interventions est répertoriée, ne serait-ce que parce qu’on dépose une DGPR (demande de protection graissage) avec l’heure de début, heure de fin, nom de l’agent, signature, etc., poursuit un autre cheminot. Les enquêteurs n’auraient eu qu’à monter au poste d’aiguillage afin de se saisir du carnet de dépêche concerné".
Déboulonner une éclisse demande une force colossale, du matériel et du temps. "Il faut faire levier contre les flancs du rail, puis dévisser les quatre boulons, enfin écarter l’agrafe." Chose faisable mais de nuit, et loin d’un poste de contrôle. Sauf que l’accident s’est produit en fin d’après-midi. De plus, plusieurs voitures ont roulées sur l’éclisse avant qu’elle se détache.Après les premiers éléments livrés, dés le lendemain de l’accident, l’enquête interne de la SNCF (dont le contenu a été versé au dossier d’instruction ouvert par le parquet d’Evry) a permis de préciser des points techniques : trois des quatre boulons de l’éclisse auraient été desserrés tandis que le quatrième, resté fixé au rail, s’est tordu sous le choc lors du basculement . Des photos montrent aussi une marque de peinture jaune sur l’éclisse, ce qui signifierait qu’un précédent contrôle avait pointé une anomalie. Inutile d’ailleurs, d’être un expert pour constater que l’état des rails peut parfois laisser à désirer. Le Parisien révélait, peu après les faits, la copie d’un courrier, envoyé à la SNCF par un habitant de Brétigny en novembre 2010. Ancien directeur d’un atelier de pièces mécaniques pour la SNCF, son auteur relevait en gare de Brétigny près d’une trentaine d’anomalies -tire-fond desserrés, cassés ou absents le long d’une cinquantaine de mètres de rail. Et de conclure que "l’absence constatée de ces fixations constitue une faute grave et peut mener à une catastrophe…"
Ce soir là, l’intervention des secours, aidés par des agents de la SNCF, a dérangé le lieu de l’accident. Les causes éventuelles du déraillement auraient-elles été brouillées ? Les boulons récupérés sont-ils vraiment les bons ? Y aurait-il eu la présence d’éventuelles empreintes ? Une énigme difficile à résoudre. Toutefois, nous pouvons nous étonner, devant le processus accidentel manifestement complexe, où les premiers travaux de recherches n’ont permis de tirer aucune conclusion, que le scénario d’un acte de malveillance aussi vite écarté.F/G (Sources / Valeurs Actuelles)

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