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Le Latin. Faisons de l'intertextualité.

Publié le 18 décembre 2012 par Vaisken

Le Latin. Faisons de l'intertextualité.

Le bureau du khâgneux se doit d'être rangé


Ce massage est très ciblé. Il répond à cet article de Khâro. Et surtout au sondage auquel j'ai répondu fermement Non. Je vous avouerai lâchement que si j'écris cet article, c'est aussi parce que ma colle d'Histoire Spé m'attend sur le bureau et que je n'ai qu'à remplir les parties. Je suis cependant tellement au bout du rouleau que faire autre chose peut me permettre de me sentir bien, oui, oui, oui. La fatigue est vraiment là, l'exténuation même. Enfin, je retourne à nos moutons. Et j'élargis sur le Grec ancien.
Qui n'a jamais eu devant lui une phrase latine ou même un mot ? Dès les études secondaires, la plupart des élèves ont eu en face d'eux un morceau de Latin. On a tous - ou pour la plupart - des souvenirs douloureux d'exaspération en face d'un/e prof qui se démène pour nous faire comprendre ce qu'est la captatio. Nous, on se demande bien pourquoi ne pas nommer cela en bon Français bien compréhensible plutôt que d'utiliser ces mots qui ne font que nous casser les pieds. Pire encore sont ceux qui ont commencé le Latin en 5e - comme moi, ouais - et qui sont allés jusqu'au Brevet en sa compagnie. Puis qui se sont dits Pourquoi pas le garder en Seconde pour faire des points pour le Baccalauréat. Puis qui chaque année se sont dits cela pour garder la foi face à cette matière qui ne les ont pas inspirés, mais alors pas du tout. Puis après le Bac, les points en poche : enfin la libération. Eh bien non. La prépa littéraire, pour quelques irréductibles - pardonnez je fais ma colle sur la révolte de Vercingétorix en 52 -, ils sont tombés dans le groupe des débutants ou continuants - ce sont les termes de mon lycée - et ont dû, encore et toujours continuer. Et il y a les masochistes, comme moi, qui sont allés en Ulm. Le cas du Grec est similaire à partir de la prépa essentiellement. Rares sont les fous qui ont commencé le Grec ancien avant la prépa. Quel est l'intérêt de nous faire apprendre une langue ancienne quand nous vivons dans un monde ouvert à de nombreuses langues vivantes ? Quelle signification a cette constance ancienne de l'Etat français qui ne voit pas que l'on a changé de cap ? Les langues mortes sont-elles mortes ? Je n'annonce pas mon plan par contre, hein. Préparez-vous à un gros pavé... j'vais tenter de sauter des lignes mais cela n'est pas garanti.
J'ai commencé le Latin en 5e. Aisé, apprendre les déclinaisons, faire des fiches de vocabulaire. Rigoler et laisser traduire la prof. Rien de bien compliqué. Puis il y a eu l'arrivée au Secondaire où la première claque a été donnée. Merde. C'est le mot, je suis une merde. Mais autant se complaire dans celle-ci, nous faisons déjà deux heures de plus que les autres. Puis c'est jouissif de voir que les profs vous considèrent parfois plus parce que vous faites une option. Puis la terminale a sonné l'entrée en guerre, les cloches des églises ont sonné et vous avez pris conscience que bon, à la fin d'année il y a le Bac et que, tant qu'à faire, rentabilisons les six ans de Latin. (Je me rends compte que mes phrases sont décousues, je m'en excuse mais je suis exténué donc comprenez l'idée générale) Puis l'entrée en Hypokhâgne, vous avez dû, coûte que coûte garder la langue ancienne, anciennement appelée langue morte. Pourquoi persévérer à enseigner cette matière ? Et pourquoi ne pas le rendre facultatif ? Car ici se trouve être tout le fond du problème posé par Khâroline. Véritablement, personnellement et honnêtement, je pense que l'apprentissage d'une langue ancienne est fondamental. Je suis une vraie brelle et je me casse la tête à traduire, le Latin me fait littéralement vous-savez-quoi mais c'est ainsi. There is a great discrepancy. Les sociétés antiques sont nos ancêtres. Le Français s'est fondé sur le Latin et le Grec même si on peut comprendre que le Latin est plus présent. Tous nos mots - hormis les derniers issus du brassage culturel actuel - sont tirés d'un héritage ancien qui a mis des décennies à se construire. Peut-on faire de l'histoire sans connaître le Latin ? Comment connaître les Gaulois - pour changer - sans connaître le Latin ? Parce que bon, les Romains et les Grecs sont les seuls à avoir écrit sur la Gaule. Comment faire du Français sans le Latin ? Comment traduire les manuscrits du Moyen-Âge voire la littérature de l'Antiquité ? Traduire du Latin n'est-ce pas déjà entrer en contact avec une langue comme le font les spécialistes de Langue en prépa ? Peut-on se passer de langue ancienne pour faire de la Philosophie ? Peut-on parler seulement sans faire de Latin ? Nous sommes plongés dans une langue latine. Même l'Eglise a repris cette langue... quelle vie ! Rien que pour cela, je crois que c'est essentiel. Certes en prépa, tous les étudiants ne sont pas prédestinés à faire du professorat ou de la recherche... mais quand même. D'autant plus que mis à part les Lettres Modernes Lyonnais et les Ulmiens, personne ne fait de langue ancienne en deuxième année. Je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi les Historiens Lyonnais ne font pas de langue ancienne m'enfin... passons.
Le Latin - et à moindre mesure le Grec - est notre culture. C'est notre héritage, notre patrimoine. Peut-on réellement penser aujourd'hui sans connaître ce qui nous a précédé ? Honnêtement, je ne le crois pas. Peut-être est-ce mon côté d'historien qui parle ce soir - sûrement même - mais en attendant, je le crois profondément. Oui, je me suis pris la tête pendant des années avec le Latin, le considérant comme une blague. Même l'année dernière. Même si cela me démoralise parfois, me détruit d'autres fois devant mon incompréhension totale, j'ai réussi à m'ouvrir un peu à cette langue morte-vivante. C'est plaisant de lire des textes antiques et de voir que non, les hommes ne sont pas plus intelligents qu'avant mais que oui, les relations anthropologiques ont évolué. C'est tellement magnifique de comprendre comment une société a pu étendre ses frontières de plus en plus loin telle la société grecque ou la société latine. C'est tellement jouissif de lire un texte de littérature et de lire une phrase latine à un moment qui n'est pas traduite et de ne pas avoir à chercher sur internet et autres plateformes. Comment comprendre la philosophie actuelle si on n'a pas lu Aristote et compagnie ? Certes c'est facile de se dire que des gens ont traduit donc maintenant, plus besoin. Mais n'est pas perdre quelque chose en ne perpétuant pas cet apprentissage ? Déjà peu de gens savent de quoi relève le Latin alors si en plus on l'enlève aux personnes qui font des études supérieures... - je ne veux pas ici adopter une attitude condescendante et critiquer négativement les personnes qui n'ont pas fait d'études... Je suis issu d'une famille qui n'en a pas fait. C'est un patrimoine, un patrimoine comme tout patrimoine quel qu'il soit. Et je crois qu'il est vital de le comprendre. Comment comprendre les politiques fascistes du XXe siècle sans avoir des notions de civilisation antique ? Je suis d'accord pour dire que ce n'est pas là que nous trouverons notre avenir et notre conduite quotidienne - quoique Sénèque et Epicure sont utiles. Mais en attendant, devons-nous faire table rase du passé ?
J'entends déjà tes protestations Khâroline ! :D Non, tu n'a pas dit qu'il faut brûler tous les Gaffiots. Quoique la retouche faite sur le tiens mériterait de le brûler. Rendre la langue ancienne facultative en prépa, c'est laisser, encore et toujours, les étudiants à la facilité. Les étudiants, les hommes... quelle différence en définitive ? Je n'aurais pas été contraint de prendre le Latin en HK, je ne l'aurais sûrement pas pris. Quoique je me pose de sérieuses questions quant à ma santé mentale dans la mesure où j'm'étais inscrit en Grec débutant aussi. WTF ? (Rêve de gosse de vouloir toucher du Grec, ça m'a passé... rassurons-nous) On est constamment poussés à la paresse et si on rendait facultatif la langue ancienne, ce serait laisser de moins en moins de place à ce patrimoine justement. De la même façon, c'est aussi réduire l'ouverture culturelle permise en prépa. Je m'explique. Ce que j'apprends en prépa... c'est simplement incroyable. Et grâce au Latin et au Grec, ça l'est d'autant plus. Mon prof de Latin est anthropologue de diplôme. Et honnêtement, les parallèles qu'il fait permet de ne pas faire du Latin pour faire du Latin comme des bêtes. Non. C'est pour faire des ponts, comprendre une civilisation. Entendre la voix de ces hommes et femmes qui ont vécu il y a longtemps. (mes doigts commencent à faiblir) Même si le Latin me fait grandement vous-savez-quoi, je reste persuadé que c'est une bonne chose que de l'avoir. Cette perversité qu'avaient les Romains lors de l'expansion impériale, comprendre qui est Néron pour comprendre Britannicus. Etc, etc. Je crois qu'il faut arriver à un stade où nous devons dépasser cette hantise et horreur du Latin ou du Grec.
Passons à une conclusion piteuse. Je dirais juste : Au pire, c'est pour l'espace de deux ans, trois maximum, en prépa. Après libre aux formations de le proposer ou pas. Je suis convaincu cependant qu'il est nécessaire de posséder cette étude des langues anciennes. De s'y essayer, de se casser la tête comme on peut le faire avec la Métaphysique. Parce qu'honnêtement, que m'apportent la Philosophie, les Lettres et l'Histoire... ? que m'apportent la Latin ou le Grec ? Comprendre notre société actuelle, comprendre qui est passé avant. Satisfaire notre libido sciendi tout simplement. Se satisfaire, se gaver, se gorger. Quitte à avoir 5.5 au concours blanc ? Et alors, j'ai aimé traduire. Même dans les mots fléchés que je fais avec ma mère - et non ce n'est pas hasbeen - il y a des mots latins comme l'ire ! Sur ces belles et magnifiques paroles, je retourne au gavage de mon plan pour l'Histoire Spé. Et que Vara soit avec vous !

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