Quatrième de Couverture
En Bretagne, sur plusieurs générations, une famille de dentelières dotée de pouvoirs de sorcellerie est liée par un mystérieux sortilège aux héritiers du manoir du Tremblay...
A la fin du XIXè, la jeune Dairine quitte son Irlande natale pour être dentelière au manoir du Tremblay, à Cancale. Dès son arrivée dans la sombre demeure, elle sent la menace d'une malédiction. Sa rencontre avec Frédéric Le Guen, le propriétaire du domaine, va sceller son destin... En 1903, Manon, la petite-fille de Dairine, dentelière d'exception, est engagée au manoir. Immédiatement, la jeune fille tombe sous le charme de Bertrand Le Guen. Manon court-elle un danger ? Qu'est-il vraiment arrivé à Dairine ? Au Tremblay, la malédiction qui poursuit sa lignée n'a pas fini de sévir...
Mon avis
Les sortilèges de Tremblay est un roman qui nous conte l’histoire de la lignée des femmes O’Shea aux XIXème et XXème siècles. Qu’est-il arrivé à Dairine, la première femme d’une lignée de rousses à la beauté envoûtante dont les aventures nous sont en partie offertes ? Comment vont faire ses descendantes qualifiées de sorcières pour vivre avec leur mystérieux héritage, teinté de passages bien sombres ? Et quelle est cette malédiction que les femmes de cette famille se transmettent de génération en génération ?
Ce roman de Karine Lebert est de ceux qu’on lit vite, auxquels on accroche dès le départ ou pas du tout. Pour ma part, j’ai très vite accroché : l’Irlande, la Bretagne, la sorcellerie, le côté historique… C’est un pot pourri de tout ce qu’il faut pour me séduire. L’histoire commence en Irlande en 1845 et se termine en Bretagne en 1980, plus d’un siècle en seulement 350 pages et pourtant, la forme utilisée par l’auteur permet d’en apprendre suffisamment et de s’accrocher jusqu’au bout à ces générations de femmes. Dairine O’Shea est la première jeune fille qu’on découvre mais qu’on ne connait que très peu : c’est son histoire qui est égrainée tout au long du roman car c’est à travers ce qu’il lui est arrivé que sa descendance subit une malédiction troublante. Viennent ensuite Nicolette, sa fille, et Manon, sa petite-fille. Nicolette et Manon sont plus approfondies, plus faciles à comprendre par ce fait. On poursuit l’histoire avec Gwen, la fille de Manon. Gwen est le personnage le plus intéressant du roman selon moi, elle est celle qui réussit à tout faire pour s’éloigner de cette malédiction, celle qui, au final, possède la force de caractère la plus profonde. Elle choisit de vivre une vie rangée plutôt que de se laisser embarquer par ce qui aurait dû être son destin. Elle se prive ainsi d’une passion qu’elle aurait du vivre mais acquiert une vie plus paisible. On aborde ensuite la vie de Morgane, fille aînée de Manon. Dotée d’un caractère fort et facilement irritant, c’est une femme forte de ses convictions que nous dépeint l’auteur. Elle m’a souvent énervée au cours de ma lecture mais en même temps, je n’ai pu m’empêcher de comprendre ses actes, ses pensées égoïstes ou mauvaises. On passe ensuite à sa sœur, Clara, qui est son exact contraire : douce, compréhensive, timide… Clara est un personnage très peu approfondi au départ mais à raison puisqu’elle prend une importance soudaine par la suite, une importance surprenante. Clara m’a touchée, c’est sûrement la jeune femme du roman que j’ai préféré. Je me suis beaucoup attachée à elle. Enfin, on termine avec Chloé dans l’épilogue du roman, la fille de Clara. On apprend avec elle toute la vérité sur la malédiction et les zones d’ombres que l’auteur a semées un peu partout dans son roman. J’ai eu un peu la même réaction que le personnage en apprenant le fin mot de cette terrible histoire.
Si j’ai préféré commencer par décrire les personnages, c’est parce que c’est à travers leur chronologie que le roman prend son sens. Chaque partie du roman aborde la vie d’une de ces femmes. On aborde donc assez brièvement chacune d’elle et pourtant, cela n’est pas un problème. Bien sûr, j’aurais préféré en apprendre un peu plus sur leur vie, leur histoire mais cela n’empêche pas de poursuivre la lecture avec acharnement. Le fait d’avoir choisi cette façon de construire l’histoire est une prise de risque de la part de Karine Lebert : il est clair que certains seront rebutés par le manque d’approfondissement sur chacun des personnages mais en même temps, ça a permis selon moi de ne pas traîner en longueur, d’aller à l’essentiel mais surtout, de faire planer le mystère jusqu’au bout. Et quel mystère ! La fin m’a laissée sans voix. J’ai été déçue par une partie des révélations, m’attendant à quelque chose de plus spectaculaire. Mais une autre partie m’a tout simplement bluffée : en repensant aux détails de l’histoire pourtant, ce dénouement tombait presque sous le sens. J’ai beaucoup apprécié ne pas découvrir l’évidence avant qu’on ne me la mette sciemment sous les yeux.
Le style de l’auteur est agréable à lire malgré quelques petites lourdeurs dans les descriptions, vite balayées par les passages descriptifs les plus prenants. Les points historiques comme le métier de dentelière ou les guerres m’ont séduite : un vrai travail de recherche a été fait et c’est un régal. Passionnée par les histoires bretonnes depuis toute petite, j’ai pu me nourrir des anecdotes du quotidien des bretons mais aussi de leurs croyances et légendes.
Les sortilèges de Tremblay n’est pas le roman de l’année mais il reste un roman agréable à lire, bien écrit et possédant une histoire bien ficelée. Les détails historiques sont un plus et l’organisation de l’histoire en plusieurs générations en fait son originalité et son intérêt. Je le conseille à tous ceux qui aiment les romans qui se lisent facilement et qui apprécient les légendes, l’histoire de la France et les ouvrages régionaux.
Un peu de mystère...